Numerama fête ses dix ans. Plus exactement, Numerama célèbre ses 10 ans au sein du groupe Humanoid, qu’il a rejoint officiellement un certain 12 octobre 2015. Une époque désormais lointaine, mais que l’on peut retracer à travers les thèmes que le média couvre quotidiennement : les jeux vidéo, la voiture électrique, le streaming, la science ou encore la tech.
Et la conquête spatiale, alors ? On ne l’a évidemment pas oubliée : voilà les 10 moments marquants de la période 2015-2025.
Récupération du premier étage Falcon 9, et un processus qui s’industrialise (2015)
Le 21 décembre 2015, SpaceX a réussi ce que beaucoup jugeaient encore irréaliste : faire revenir sur Terre le premier étage d’une fusée orbitale. Et pourtant, c’est bien ce que le lanceur Falcon 9 de la mission ORBCOMM-2 est parvenu à faire, en se posant verticalement à Cap Canaveral, en Floride. C’est une bascule technique et économique, qui depuis a largement infusé dans le reste de l’industrie spatiale.
En prouvant qu’une fusée peut être récupérée puis réutilisée plusieurs fois, SpaceX déclenche une rupture de modèle. C’est un séisme. Dix ans plus tard, la récupération est devenue une routine industrielle pour cette société, qui domine désormais largement le marché des lancements, grâce à des coûts comprimés et une cadence infernale. Un pari réussi, donc, et un modèle que beaucoup suivent dorénavant.
ExoMars et rover Perseverance en route pour Mars (2016 et 2020)
Le 14 mars 2016, l’Avence spatiale européenne envoie la mission ExoMars, qui inclut la sonde Trace Gas Orbiter et le démonstrateur Schiaparelli. L’objectif : rechercher des traces de vie passée et déceler les gaz rares de l’atmosphère martienne. Si Schiaparelli s’écrase à l’atterrissage, TGO fonctionne toujours, scrutant le méthane et préparant la suite. Rendez-vous en 2028 avec le rover Rosalind Franklin.
Côté américain, la même décennie voit la mission Mars 2020 s’imposer : le rover Perseverance, lancé le 30 juillet 2020 et posé le 18 février 2021, devient presque iconique dans le milieu de la science. Son compagnon Ingenuity effectue, deux mois plus tard, le premier vol motorisé (inhabité) sur une autre planète. Mars n’est plus seulement une destination : c’est un terrain d’expérimentation de plus en plus audacieux.
Thomas Pesquet, deux missions spatiales à son actif, et star en France (2016 et 2020)
Le 17 novembre 2016, Thomas Pesquet décolle pour la mission Proxima à bord d’un vaisseau russe Soyouz, pour un séjour de six mois. Pendant cette durée, il transforme la perception du spatial en France : l’ISS devient un lieu familier, et ses tweets, alimentés régulièrement par ses photos, un rendez-vous pour les aficionados. Tout cela, en parallèle de ses autres prérogratives et ses sorties spatiales.
Le 23 avril 2021, il repart pour la mission Alpha, à bord d’une capsule Crew Dragon affrétée par SpaceX. Il devient alors le premier Européen à voler sur ce nouveau véhicule, là encore pour une durée de six mois. Il participera même à la promotion des J.O. d’été de 2024, avec l’enregistrement d’une petite séquence au saxophone dans l’ISS, lors d’une revisite musicale de l’hymne national, La Marseillaise.
Premier vol habité d’une capsule Dragon de SpaceX, et fin de la dépendance à la Russie (2020)
Le 30 mai 2020, la capsule Crew Dragon emmène Bob Behnken et Doug Hurley vers la Station spatiale internationale, lors d’un vol test pour valider la capacité de SpaceX à transporter du personnel en toute sécurité. C’est la première fois qu’un vaisseau conçu par une entreprise transporte des humains en orbite. Et, accessoirement, les ramène sur Terre.
Pour les États-Unis, c’est la fin d’une dépendance de neuf ans aux fusées russes ; pour SpaceX, la confirmation d’un statut d’acteur central du vol habité. L’industrie spatiale entre dans sa phase commerciale. Depuis lors, SpaceX a multiplié les transports. Les astronautes qui ont été convoyés se comptent désormais en dizaines.
Montée en puissance rapide de la Chine dans les programmes spatiaux, vers la Lune et Mars (2020 et 2021)
En décembre 2020, la mission Chang’e 5 ramène sur Terre des échantillons lunaires — une première depuis 1976. Quelques mois plus tard, Tianwen-1 place un orbiteur autour de Mars et y dépose le rover Zhurong le 14 mai 2021. Dans la foulée, la Chine lance Tianhe, le module central de sa station Tiangong, et y envoie ses premiers équipages.
En une poignée d’années, l’Empire du Milieu a progressé suffisamment vite pour rejoindre le trio de tête des puissances spatiales, avec les États-Unis et la Russie. Son programme est d’ailleurs suffisamment financé et soutenu qu’il met Washington sous pression, que ce soit pour le retour d’astronautes sur la Lune ou, plus ambitieux encore, pour en voyer pour la première fois sur Mars. La course à l’espace est là.
Développement du Starship, entre explosions et réussites indiscutables (2021…)
Le Starship explose, se crashe parfois, et connait toutes sortes de péripéties. Mais le Starship progresse. Depuis 2021, SpaceX teste sans relâche son futur lanceur géant. Après beaucoup de coups dur, un premier prototype finit par atterrir sans encombre le 5 mai 2021. Le premier vol complet de l’ensemble (étage supérieur Starship + propulseur Super Heavy) a lieu le 20 avril 2023.
Depuis, 10 autres essais ont lieu, et des progrès ont été enregistrés. SpaceX sait par exemple récupérer l’étage inférieur, en le faisant atterrir entre les bras mécaniques d’une tour de lancement, pour le réutiliser ensuite. Il sait aussi envoyer le Starship à l’autre bout du monde. Certes, Starship n’a pas encore volé vers la Lune, mais cela viendra : son développement rythme l’avenir du programme Artémis.
Lancement du télescope James Webb par une fusée Ariane 5, pour voir l’Univers comme jamais (2021)
Le 25 décembre 2021, après des années d’attente, une Ariane 5 décolle de Guyane avec un passager hors norme : le télescope spatial James Webb. Arrivé à son point d’observation le 24 janvier 2022, il se déploie. Au passage, on se rend que le lancement a été tellement bien exécuté qu’il a de bonnes chances de voir sa durée de vie s’allonger.
Depuis, ses images infrarouges ont redéfini la cosmologie observationnelle. En juillet 2022, il montre son tout premier vrai cliché, suivi rapidement par d’autres images tout aussi spectaculaires. Des informations précieuses pour la communauté scientifique, en quête de compréhension de ce qui se passe dans l’Univers, mais aussi des scènes poétiques et spectaculaires pour le public, qui se perd dans ces fenêtres donnant sur le cosmos.
Vols spatiaux privés lancés par des personnes très riches pour le plaisir d’autres individus fortunés (2021…)
Juillet 2021 : deux milliardaires se payent le rêve d’un vol suborbital. Richard Branson atteint 86 km d’altitude avec Virgin Galactic, Jeff Bezos franchit la ligne de Kármán (100 km) à bord de Blue Origin. Au passage, une relative controverse éclate entre les deux, car l’espace n’a pas vraiment de frontière très claire avec l’atmosphère.
Ces vols qui profitent à des personnes très fortunées n’ont pas bouleversé la science, mais ils marquent un virage médiatique : le tourisme spatial devient une industrie émergente — même s’il existait déjà un peu avec l’ISS qui a pu accueillir plusieurs civils dans les années 2000 et 2010. L’espace n’est plus seulement une affaire d’agences spatiales nationales, mais aussi de groupes privés : il se consomme, se vend, se vit.
Lancement de la mission Artémis I autour de la Lune, pour préparer le retour des astronautes (2022)
L’Amérique va revenir sur la Lune. Son plan a même déjà commencé le 16 novembre 2022, avec le programme Artémis, qui a relancé les grands vols lunaires. Précisément, le 16 novembre a eu lieu la mission Artémis I, qui a consisté à envoyer le vaisseau Orion pour un périple de 25 jours autour de la Lune, sans équipage. Le tout, grâce à la fusée Space Launch System (SLS) de la NASA.
Cette première étape est pour l’instant la seule qui a été accomplie, et sans doute la plus simple. La suite prévoit un retour d’humains sur la surface lunaire dès Artémis III et, avant cela, Artémis II, qui consistera à reproduire le vol d’Artémis I avec un équipage à bord. Vol prévu en 2027. S’il y a encore beaucoup de travail, symboliquement, Artémis I a refermé la parenthèse de cinquante ans ouverte depuis Apollo 17, il y a plus de 50 ans.
Inauguration d’Ariane 6, la nouvelle fusée de l’Europe, après Ariane 5 (2024)
Le 9 juillet 2024, la nouvelle fusée européenne Ariane 6 s’élance enfin depuis Kourou. Le vol inaugural place plusieurs charges en orbite, mais se conclut sur une anomalie de l’étage supérieur, empêchant la dernière phase prévue. Rien de critique cependant, le lanceur ayant par ailleurs validé assez largement ce qu’on attendant de lui.
Malgré cette petite sortie de piste, l’Europe retrouve un accès autonome à l’espace, et c’est là l’essentiel (Ariane 5 étant alors en fin de course). Ariane 6 doit désormais démontrer sa fiabilité et son modèle économique dans un marché où SpaceX, Rocket Lab et d’autres ont déjà changé les règles. Mais la fusée va évoluer elle aussi, et la suite est déjà partiellement connue : elle s’appelle Ariane Next.
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