Ce fabricant de lidar veut prouver qu’Elon Musk a tort

Hesai Technology a fait passer le coût d’un lidar de 10 000 $ l’unité à seulement 200 $. Voilà qui pourrait bien démocratiser cette solution boudée depuis plusieurs années par Elon Musk et Tesla.

Le lidar est une technologie qui oppose les constructeurs : indispensable pour certains, inutile pour les autres… sans que l’on sache encore qui a vraiment raison. Le lidar est un faisceau laser qui scanne l’environnement pour créer une carte 3D ultra-précise autour du véhicule. Une technologie que les constructeurs voient comme la clé de la conduite autonome sûre, capable de détecter un piéton dans le brouillard ou une voiture à l’angle mort, avant même que le conducteur ne la voie.

Néanmoins, tout le monde n’y croit pas. Elon Musk, notamment, en a fait son cheval de bataille : selon lui, les caméras et l’intelligence artificielle suffisent pour analyser l’environnement du véhicule. Xpeng tente désormais la même approche. Mais, au-delà des performances de la technologie, c’est aussi le coût d’un tel équipement qui a largement motivé le choix de ces constructeurs. Or, avec une baisse spectaculaire du coût de ses lidars, Hesai Technology pourrait bien relancer le débat, d’après Nikkei Asia, le 1er novembre 2025.

Un lidar à 200 dollars pour changer la donne

Il y a encore peu, un tel équipement coûtait près de 10 000 dollars l’unité, de quoi refroidir n’importe quel constructeur voulant l’intégrer à grande échelle. C’était généralement réservé aux modèles les plus haut de gamme, essentiellement chinois, qui sont les plus avancés pour démocratiser la conduite autonome de niveau 3.

HiPhi Z au salon de Munich 2023 // Source : Raphaelle Baut — HiPhi Z équipée de lidar Hesai, à l’IAA Francfort 2023. // Source : Raphaelle Baut

Mais le fabricant chinois Hesai Technology a décidé qu’il fallait absolument démocratiser cette technologie. Un objectif qu’il a atteint aujourd’hui, et qui vient de bouleverser l’équation : son nouveau modèle ATX ne coûte plus que 200 dollars. Après une première étape avec un modèle à 500 dollars développé en collaboration avec Bosch et Nvidia, Hesai a décidé d’internaliser plus largement la production de certains éléments (lasers, capteurs, récepteurs) pour faire baisser drastiquement les coûts.

Ce pari industriel, amorcé en 2022, a permis à Hesai de diviser ses coûts par 50, tout en conservant des performances de haut niveau : champ de vision large, détection longue portée et haute précision. Il ne s’agit pas d’un produit aux performances rabotées, mais d’une vraie proposition pour que la technologie devienne enfin économiquement viable pour des véhicules de série. Le CEO Li Yifan l’explique sans détour : « Les airbags, autrefois hors de prix, sont désormais de série sur tous les véhicules. Nous voulons parvenir au même résultat avec le lidar. »

Les caméras et Lidar sur les actuelles Jaguar Waymo // Source : Waymo — Les caméras et Lidar sur les actuelles Jaguar Waymo. // Source : Waymo

Avec plus d’un million de modules vendus, l’entreprise est déjà numéro 1 mondial du secteur avec 33 % de part de marché. Hesai équipe aujourd’hui 24 constructeurs (majoritairement chinois) et compte bien convaincre les marques européennes. « Les constructeurs automobiles européens considèrent le lidar comme essentiel pour la conduite autonome de niveau 3 », déclare-t-il au média Nikkei Asia. Il affiche une certaine confiance quant à l’idée que ses lidars seront adoptés en Europe, après avoir convaincu Toyota pour sa coentreprise en Chine.

Quand le low-cost du lidar défie la vision d’Elon Musk

Pour Elon Musk, le lidar est depuis toujours un gadget inutile : « Quiconque s’appuie sur le lidar est voué à l’échec », a-t-il affirmé dès 2018. Tesla a fait le choix radical d’une conduite autonome reposant uniquement sur des caméras et de l’intelligence artificielle, une approche baptisée « vision only ». Malgré des années de promesses, la conduite entièrement autonome n’est toujours pas reconnue comme telle à grande échelle. Néanmoins, les progrès de l’IA de Tesla commencent à être visibles avec les dernières générations du logiciel FSD dans sa version 14.

Le simulateur de Tesla recrée un environnement plus vrai que nature, imitant les vues des différentes caméras. // Source : Ashok Elluswamy via X

Elon Musk a toujours considéré que cette technologie générait des faux positifs pour justifier son choix, mais c’est aussi la question du coût de ces équipements qui a orienté le choix du patron de Tesla de s’en passer sur ses modèles (notamment les plus abordables). Mais à 200 dollars l’unité, cette avancée pourrait bien faire vaciller les nouveaux partisans du « tout caméra », comme Xpeng.

De son côté, Hesai brandit ses propres chiffres : selon les données de Li Auto, un de ses clients, les véhicules équipés de lidar peuvent éviter 90 % des accidents mortels sur autoroute et réduire de 20 % les collisions sur route classique. De quoi rappeler qu’en matière de sécurité, la redondance technologique a parfois du bon.

Le patron d’Hesai n’hésite plus à provoquer : « Presque 100 constructeurs considèrent désormais le lidar comme une technologie essentielle pour sauver des vies. Certains affirment désormais que Musk s’est trompé. » Mais est-ce vraiment suffisant pour statuer qu’Elon Musk a fait erreur ? Rien n’est moins sûr. Une certitude : la bataille Chine – États-Unis pour la suprématie de la conduite autonome n’en est qu’à ses débuts.