L’obsession pour les robots humanoïdes prend de plus en plus de place chez les constructeurs automobiles. On pourrait se dire que certains patrons réalisent un rêve d’enfant : vouloir son propre C-3PO. Mais l’intérêt récent pour les robots est bien plus pragmatique qu’il n’y paraît.
Qu’on le veuille ou non, la robotique pourrait devenir stratégique, et il n’est pas question de robots industriels qui assemblent déjà nos voitures. Certains constructeurs disposent déjà d’une partie du savoir-faire nécessaire pour s’y lancer. Ceux qui maîtrisent le mieux les véhicules définis par logiciel (SDV) et l’IA partent avec une longueur d’avance ; pour les autres, c’est une autre paire de manches.
Ceci n’est plus de la science-fiction
Lorsque Elon Musk a annoncé en 2021 vouloir développer son Tesla bot, devenu depuis Optimus, les réactions ont été diamétralement opposées. Certains ont applaudi l’idée, même si la « démo » n’était qu’un humain en costume de robot. D’autres, dont je fais partie, se sont demandés pourquoi il s’engageait sur un terrain aussi éloigné de l’automobile. Pourtant, le patron de Tesla n’est pas le seul à avoir avancé ses pions sur la question. Il suffit de regarder les dernières démonstrations du robot Iron de Xpeng pour comprendre que le sujet n’a plus rien d’une lubie de milliardaire un peu perché.
Les constructeurs japonais ont d’ailleurs été les vrais pionniers : Honda avec Asimo dès les années 2000, puis Toyota. Et quand Hyundai a mis la main sur Boston Dynamics, le signal était clair… mais peu l’ont vraiment entendu. Depuis, les Japonais se sont fait doubler par les acteurs chinois qui ont mis les moyens pour devenir leaders en développant tout l’écosystème nécessaire. Comme une impression de déjà-vu avec la voiture électrique ? C’est normal, c’est la même recette. Les robots humanoïdes d’aujourd’hui ont encore l’air gauches et un peu limités, mais au rythme où les choses avancent, il sera difficile de tenir ce discours dans un an.
Deux univers plus proches qu’il n’y paraît
Au salon automobile de Shanghai, j’avais été frappée par l’omniprésence des robots, à tous les stades de développement. Ils n’étaient pas là juste pour attirer les curieux, ils faisaient partie intégrante du savoir-faire que les constructeurs chinois voulaient montrer. Une impression confirmée lors du voyage en Chine organisé par Renault, où Xin Shao, directeur du recrutement et de l’innovation technique d’ACDC, nous expliquait pourquoi tous les acteurs locaux se lancent dans la robotique : les synergies avec l’automobile sont évidentes, aussi bien sur le software que sur le hardware. « Pour animer les robots, ce sont des moteurs électriques miniaturisés », expliquait-il. C’est la même chose pour la batterie qui leur donne leur autonomie, ou la gestion de leur environnement grâce aux caméras. La robotique s’inscrit pour ces constructeurs automobiles chinois dans une continuité naturelle.
Là où l’Europe se concentre encore sur la montée en puissance de la voiture électrique, la Chine travaille déjà sur la technologie suivante : celle des « AIOT » (« Intelligence artificielle des objets » ou des véhicules intelligents et autonomes). Un expert du marché automobile chinois rencontré durant ce même voyage l’a résumé simplement : « L’IA sera la prochaine révolution industrielle de la Chine, et la Chine dominera. » Les robots humanoïdes ne sont qu’une des applications possibles. Les voitures autonomes en sont une autre.
Mais pourquoi ?
Pour le défi ? Développer un robot humanoïde est bien plus complexe qu’un véhicule, même autonome. Une voiture reste un engin (rustique) programmé pour une mission claire : aller d’un point A à un point B en respectant les règles de circulation. Un robot humanoïde, lui, doit pouvoir exécuter des milliers de tâches différentes, avec des mouvements calibrés au millimètre, sous peine de devenir une catastrophe ambulante.
Au-delà de la prouesse technologique qui est en jeu, c’est un juteux business qui se profile : autant pour remplacer l’humain dans certaines tâches (comme en usine) que pour le suppléer au quotidien (comme un majordome ou une aide à domicile). Les dilemmes éthiques ? Personne ne veut vraiment en parler. Pas encore. On attendra le moment où il sera un peu tard pour découvrir qu’on aurait peut-être dû freiner plus tôt.
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