Ford a connu meilleure forme en Europe et doit redresser la situation. Jim Baumbick est arrivé à la tête de Ford Europe le 10 octobre 2025, en pleine tempête. L’électrification a coûté cher à la marque, que ce soit en investissements autant qu’en pertes de parts de marché Les modèles thermiques vieillissent, certains best-sellers disparaissent, et l’équilibre financier est rompu. Ford paie le prix d’une stratégie qui ne porte pas ses fruits sur le Vieux Continent.
Les modèles électriques vendus aujourd’hui perdent de l’argent, l’ensemble de la stratégie industrielle nécessite un ajustement rapide. L’article d’Automotive News Europe du 14 novembre décrit une situation tendue, dans laquelle restructurations, licenciements et doutes technologiques s’accumulent. Le nouveau patron hérite d’un dossier où chaque pièce est plus urgente que la précédente.
Des ventes électriques encore insuffisantes
Ford s’est longtemps reposé sur le Mustang Mach-E pour amorcer sa transition énergétique en Europe. Conçu et produit aux États-Unis, ce modèle n’a jamais rencontré le succès escompté, malgré des ventes à 21 000 unités en 2023. Ses volumes ont depuis chuté à 16 193 véhicules en 2024, puis seulement 3 605 unités durant les huit premiers mois de 2025, soit une baisse d’environ 72 %, même après des remises importantes.
Les ventes se sont partiellement reportées sur le Ford Explorer EV, mais très peu sur le Capri. Il est encore un peu tôt pour juger des résultats du dernier modèle Puma Gen-E. Fin 2024, les modèles électriques représentaient environ 7,3 % des ventes de la marque en Europe, néanmoins ce score devrait être supérieur en 2025. Il flirtait autour de 12 % à la rentrée 2025. Ford a pourtant dû faire appel à Tesla face aux échéances de la norme CAFE pour créer un pool.
Le nouveau patron de Ford Europe a un premier défi à affronter : les électriques européennes ne sont pas rentables. Les volumes actuels sont insuffisants pour renverser la vapeur. Selon Automotive News Europe, la CFO Sherry House a expliqué le 23 octobre que la Puma Gen E, l’Explorer électrique et la Capri électrique sont encore déficitaires. Ces pertes s’ajoutent aux 3,6 milliards de dollars engloutis par la division Model E sur les neuf premiers mois de l’année, dont 600 millions pour le développement de la future Universal EV Platform.
Le souci reste que ces modèles coûtent plus cher à fabriquer qu’ils ne rapportent. Deutsche Bank, cité par Automotive News Europe, rappelle que les solutions existent déjà : réduire les coûts pour faire baisser les prix. Rien de très glamour, mais c’est la réalité du marché européen, où la concurrence progresse plus vite que Ford. La marque américaine essaye de recoller au marché, mais a pour le moment toujours un temps de retard et, surtout, ne jouit pas sur l’électrique de la notoriété qu’elle avait sur les modèles thermiques.
La future plateforme américaine à la rescousse de l’Europe ?
La Skunkworks (une équipe spéciale et indépendante) de Ford développe la prochaine plateforme électrique universelle du groupe. Cette architecture doit permettre à Ford de produire des modèles électriques beaucoup plus abordables, capables de rivaliser avec les constructeurs chinois comme BYD, mais aussi avec Hyundai, Kia, Renault, Stellantis et Tesla. Sur le papier, cette architecture pourrait révolutionner l’offre.
Le premier véhicule basé sur cette plateforme devrait être un petit pickup, lancé en 2027 avec un prix d’environ 30 000 $. Ce n’est pas le type de véhicule qui pourrait venir sauver le marché européen pour Ford. D’ailleurs, Jim Farley, le patron de Ford, avait indiqué dans un premier temps que les produits développés par l’équipe Skunkwork seraient réservés au marché américain. Ce qui a surpris à plus d’un titre : il est incohérent de ne réserver cette évolution qu’au marché américain, dont les perspectives d’évolution ne sont pas bonnes. Il est alors possible d’imaginer que cette plateforme ultra modulable pourrait aussi malgré tout atteindre notre marché.
Reste une question stratégique que Jim Baumbick, le patron européen, devra trancher : cette plateforme sera-t-elle suffisamment efficace et bon marché pour être produite en Europe ?
Vers un rapprochement encore plus fort avec Volkswagen
Si la plateforme de l’équipe Skunkworks n’offre pas une solution européenne viable, l’alternative existe déjà. Ford pourrait prolonger sa collaboration avec Volkswagen et relancer la Fiesta sous la forme d’un petit modèle électrique basé sur la future VW ID Polo. Volkswagen présente cette voiture comme le premier EV réellement rentable de sa gamme, ce qui a de quoi intéresser Ford.
Ce serait un choix pragmatique, mais pas très glorieux pour Ford. L’Explorer vit déjà dans l’ombre de son cousin ID.4 (et ses autres variantes du groupe), le Capri est carrément éclipsé. Cela serait néanmoins une solution efficace. Surtout sur un segment où la marque n’a plus de modèle électrique capable de rivaliser en prix ou en volumes.
Il n’est pas encore évident de savoir ce que Ford réserve pour l’avenir, mais jusqu’à présent la branche européenne de la marque semble avoir opté pour une stratégie à court terme qui n’est pas payante. N’est-il pas temps de tout remettre à plat pour ce nouveau patron ?
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