La place des sujets environnementaux et climatiques n’était pas à la hauteur des enjeux dans le débat du second tour opposant Emmanuel Macron et Marine Le Pen. L’écologie a été négligée tant dans la nature des discussions que dans le temps qui y était accordé. Ce qui pose un très gros problème compte tenu du rapport du GIEC.

Si l’on ne réduit pas suffisamment les émissions de gaz à effet de serre, et immédiatement, le scénario optimiste pour le réchauffement de la planète sera plus difficilement atteignable. Si l’on n’agit pas pour protéger les écosystèmes de la pollution (plastique notamment), la sixième extinction de masse des espèces vivantes poursuivra sa route. Voilà deux enjeux qui peuvent changer littéralement l’état de la planète d’ici quelques années.

Voilà pourquoi beucoup sont ressortis estomaqués du débat de la présidentielle ayant opposé Emmanuel Macron et Marine Le Pen, le mercredi 20 avril, en amont du second tour ce 24 avril 2022. Au total, sur les 2h30 du débat de l’entre-deux tours, 17 minutes ont été consacrées à une urgence dont le niveau d’alerte est extrême.

Le débat de l'entre-deux tours était très décevant quant à la place de l'écologie, pourtant l'urgence du siècle. // Source : France 2 / TF1
Le débat de l’entre-deux tours était très décevant quant à la place de l’écologie, pourtant l’urgence du siècle. // Source : France 2 / TF1

« Extrême », car le 6e rapport du GIEC, soit le document qui fait le plus autorité sur le sujet, est très clair : les solutions existent et doivent être appliquées immédiatement avec amplitude. En chiffre, il ne faudrait pas dépasser 2025 pour atteindre le pic des émissions, afin de pouvoir les réduire de 43 % d’ici 2030. C’est ainsi qu’il serait possible de seulement « frôler » les 1,5 degré de réchauffement.

Un débat écologique monomaniaque sur le nucléaire

Le problème le plus saillant du débat n’est peut-être pas tant ces simples 17 minutes dédiées à l’urgence climatique, que leur nature. Au-delà du creux de certaines invectives qui faisaient perdre du temps au fond, l’échange fut presque exclusivement consacré à l’énergie, et en particulier, au sein de ce volet, aux positions du candidat et de la candidate sur le nucléaire et la construction ou non de nouvelles centrales. Le débat fut alors strictement restreint à l’électricité, sans réflexion plus poussée, comme l’a relevé sur Twitter un climatologue comme Christophe Cassou.

Les réponses écologiques, parmi celles existantes ou à envisager, sont bien plus vastes. Même sans prétendre à l’exhaustivité, l’urgence climatique ne peut être résumée à ce sujet, qui appartient en réalité à une question plus globale de décarbonation — une sortie des énergies fossiles dans le quotidien et l’industrie. Dans le dernier volet de son 6e rapport, le GIEC évoque pas moins de 43 solutions, dont l’effet potentiel est très précisément indiqué. Le solaire et l’éolien sont en (très) bonne place, mais d’autres thèmes ont un impact clairement déterminant :

  • L’agriculture et l’alimentation
  • La restauration des écosystèmes et la gestion des forêts
  • La construction et la rénovation de bâtiments pour un moindre coût énergétique
  • La décarbonation de l’industrie
  • Les transports

Aux pistes plus précises de solution, s’ajoute la justice écologique et sociale très prégnante aussi dans le rapport du GIEC (une société « plus juste et équitable » comme préalable aux avancées pour l’environnement), tout comme l’enjeu plus global de la sobriété. Des points aucunement abordés frontalement lors de cette séquence télévisée de deux heures et trente minutes.

Un site spécialisé comme BonPote conclut que « le niveau du débat n’est pas à la hauteur des enjeux ». Mais plus encore : au regard des axes évoqués notamment par le GIEC, l’écologie devait non seulement faire l’objet d’un débat plus varié et étayé, mais il aurait dû également imprégner d’autres chapitres. En somme, les questions environnementales ont été une nouvelle fois séparées des autres, à une époque où elles doivent être intégrées bien plus largement à l’intégralité du débat politique.

C’est pour ces raisons que l’échange entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen semblait issu du passé, dans la droite ligne d’une inconsciente écologique pourtant mortifère. L’évocation introductive d’une « angoisse pour les jeunes » montrait déjà, à elle seule, un manque de compréhension sur l’importance réelle de l’enjeu.

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