Le Nord est en passe de devenir l’eldorado français de la production de batteries pour les voitures électriques. Alors que 3 projets de Gigafactory sont déjà lancés, selon Les Echos, l’annonce d’une quatrième usine doit s’officialiser le vendredi 12 mai en présence du président Emmanuel Macron. Quels sont ces différents projets ? Quand doivent-ils commencer à produire ? Quels constructeurs vont pouvoir disposer de batteries françaises ?
Les constructeurs, comme les politiques, ne veulent plus dépendre exclusivement de la production chinoise. La pénurie des semi-conducteurs, suite à la pandémie de Covid, a montré les limites de cette dépendance extrême à la Chine. À cela s’ajoute aussi une volonté de développer une industrie automobile plus verte, avec une meilleure maîtrise des émissions de CO2 durant la phase de production. C’est donc dans cet objectif qu’une partie des batteries seront désormais produites localement en Europe, mais aussi pour certaines en France.
Des batteries françaises dès fin 2023
Quatre projets d’usine ont été progressivement lancés ces dernières années. Selon les calendriers établis, le démarrage des productions devrait s’échelonner dans le temps de la fin de cette année jusqu’en 2026 pour le dernier projet actuellement en phase d’officialisation :
- ACC (Automotive Celles Company) : second semestre 2023
- Envision AESC : fin 2024 / début 2025
- Verkor : mi-2025
- Prologium : 2026 (à confirmer)
L’usine de batteries ACC (coentreprise de Stellantis, TotalEnergies et Mercedes-Benz) est le projet le plus avancé. ACC s’est installé à Douvrin dans le Pas-de-Calais sur l’ancien site de production de moteurs thermiques de Stellantis. La production sur ce site devrait débuter dans les prochains mois. Dans une première phase, la production est estimée à 13,4 GWh puis devrait augmenter graduellement jusqu’à 40 GWh d’ici 2030. Les premiers emplois pourvus le seront par des employés en reconversion du groupe Stellantis, mais plusieurs centaines d’emplois seront ouverts rapidement pour renforcer les effectifs.
D’ici fin 2024 ou début 2025, c’est l’usine de l’entreprise japonaise Envision AESC qui devrait entamer sa production française, sur un ancien site de Renault de Douai. Le projet intégré au pôle ElectriCity de Renault prévoit de produire 9 GWh pour débuter, pour ensuite atteindre jusqu’à 24 GWh. Cela représente 1 000 emplois au démarrage, puis jusqu’à 2 500 à 3 000 salariés lorsque la production atteindra son rendement maximal.
En 2022, l’entreprise française Verkor a décidé d’installer sa première Gigafactory sur un site proche de Dunkerque. Le siège de la société restera à Grenoble, où sont imaginées les nouvelles batteries. Dans cette usine, la capacité de production est prévue pour démarrer avec 16 GWh de batteries en 2025 pour atteindre jusqu’à 50 GWh en 2030. Verkor estime pouvoir équiper environ 300 000 voitures électriques par an d’ici à 2027.
Enfin, le groupe Taiwanais Prologium va officialiser dans les prochains jours l’implantation de sa future méga-usine de batteries à Dunkerque également. Les données précises ne sont pas encore confirmées. Les premières indications semblent estimer un objectif de production de 50 à 60 GWh d’ici à 2031, soit de quoi équiper 500 000 à 750 000 voitures électriques. Une telle usine devrait entraîner la création de 3 000 emplois.
Quels types de batteries et pour quels constructeurs ?
Ces principaux projets vont en priorité répondre aux besoins des constructeurs français. Les batteries produites par ACC devraient équiper d’abord les modèles du groupe Stellantis. Mercedes, qui est partenaire de l’entreprise, va aussi en bénéficier. Envision AESC et Verkor ont eux signés des partenariats avec Renault. Les deux groupes Renault et Stellantis seront ainsi prioritaires sur la production des batteries électriques françaises, mais les différents projets sont ouverts pour livrer d’autres clients.
Aucun des projets implantés en France n’a prévu de produire des batteries à chimie LFP (lithium-fer-phosphate). Les batteries les plus abordables devraient rester majoritairement produites en Chine. L’Europe et la France se concentrent plutôt sur la production de batterie Lithium-ion à haute densité de type NMC (nickel-manganèse-cobalt), mais pas uniquement.
Pour la forme des cellules, Verkor prévoit de produire en France des cellules haute performance de grande taille de type Pouch, mais pourrait aussi produire des cellules cylindriques de taille plus réduite (équivalent au format 2170 et au-delà).
Envision AESC produit aujourd’hui également des batteries ensachées (pouch), mais le fabricant imagine également proposer d’autres types de batteries selon les besoins des constructeurs : prismatiques et cylindriques. Elles seront toutes basées sur de la chimie NMC.
Prologium se concentrerait sur la prochaine génération de batterie : les batteries solides. Elles sont censées être l’avenir pour les voitures électriques avec plus d’autonomie, plus de sécurité, moins de risques d’incendies et un temps de charge plus rapide.
Pourquoi sont-elles toutes concentrées dans le Nord ?
Ce que l’on appelle désormais la « vallée de la batterie » concentre en effet tous les projets de Gigafactory de batteries. Pour les usines installées sur d’anciens sites de Renault et Stellantis, la question ne se pose pas. Pour les autres, Dunkerque et son port offrent de nombreux avantages stratégiques, essentiellement sur les questions de logistique. Le bassin industriel local évolue avec son temps, et la main d’œuvre ne manque pas. D’ici à quelques années, ces différents sites de production devraient employer localement plus de 8 500 personnes.
Deux éléments ont plaidé en faveur de ces localisations face à d’autres pays :
- Une énergie décarbonée, contrairement à l’Allemagne ;
- Une filière de formation qui s’est mise en place pour pouvoir former les futurs employés à ces nouveaux métiers.
Deux éléments cruciaux pour ces entreprises, que des représentants de Verkor nous avaient confirmé lors d’un échange, fin octobre, sur un événement organisé par Renault.
Une vague de création d’usines en Europe également
La France ne concentre pas tous les projets de création de Gigafactory pour la production de batteries. En fonction des alliances avec les constructeurs européens, les projets sont nombreux à voir le jour également en Allemagne, en Italie, en Espagne et dans les pays de l’Est.
ACC a notamment confirmé deux autres usines à venir en Italie et en Allemagne. Les groupes tels que Volkswagen ou BMW ont par ailleurs développé des projets locaux en s’associant avec des fabricants de batteries reconnus. La Gigafactory Tesla de Berlin devait aussi produire des batteries 4680, mais c’est finalement un site aux États-Unis qui a été développé prioritairement, sans que l’on sache si le projet allemand est abandonné.
Les géants chinois ne sont pas en reste, ils commencent à implanter des usines en Europe, en commençant par l’Allemagne. Selon nos confrères de Frandroid, nos voisins allemands semblent avoir pris un léger avantage sur le nombre de projets d’usines de batteries, mais la France pourrait séduire bien d’autres industriels avec son électricité décarbonée.
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