La « stratégie zéro covid » est mise en application par plusieurs pays, et elle est défendue par de nombreux collectifs de scientifiques. Voici comment cela fonctionne et ce qu’on sait de son efficacité.

Comment freiner au maximum la propagation du coronavirus ? Dans sa stratégie actuelle, la France opte presque pour « vivre avec le virus » en fixant, pour le déconfinement, un seuil élevé quant au le taux d’incidence (400 pour 100 000 habitants) ; tout en vaccinant au fur et à mesure. D’autres pays, comme l’Angleterre, avaient opté pour confinement total, strict, en choisissant de déconfiner quand la circulation du virus est redevenue basse, et la vaccination élevée.

Des pays comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande, ou encore la Corée du Sud, ont opté quant à eux pour la « stratégie zéro covid ». Quelle est la spécificité de cette approche ? Comment s’applique-t-elle ? Est-elle efficace ?

Est-ce efficace ?

Une courte étude publiée dans The Lancet le 28 avril 2021, s’intéresse à l’efficacité de la stratégie zéro-covid, y compris sur le plan économique. Les chercheurs expliquent que « les pays qui visent systématiquement l’élimination — c’est-à-dire une action maximale pour contrôler le SARS-CoV-2 et stopper la transmission le plus rapidement possible — s’en sortent généralement mieux que les pays qui optent pour l’atténuation. »

Les pays qui ont opté pour la stratégie zéro covid, donc l’élimination avec des mesures strictes prises très tôt, ont considérablement freiné la mortalité mais également permis la reprise rapide de l’économie ; et ce avec plus d’efficacité que les pays qui ont essayé de vivre avec le virus ou de prendre les mesures plus tardivement. Les cinq pays ayant le plus clairement opté pour la stratégie zéro covid (Australie, Islande, Nouvelle-Zélande, Japon, Corée du Sud) ont retrouvé leur niveau économique pré-pandémique. Par ailleurs, les mesures prises par ces pays, pourtant plus strictes et plus soudaines, semblent paradoxalement vécues comme moins liberticides par la population.

« Les pays qui optent pour vivre avec le virus vont probablement représenter une menace pour les autres pays, notamment ceux qui ont moins accès aux vaccins », ajoute l’étude.

Confiner vite et strictement

La méthode zéro covid consiste notamment en trois grands axes simultanés dès l’apparition de quelques cas dans un lieu :

  • Confiner localement (la ville, le département, la région concernée) ;
  • Confiner strictement (écoles fermées) ;
  • Confiner immédiatement (le jour même de la détection).

L’idée de cette stratégie est d’éviter de « vivre avec » le coronavirus, et donc de l’éradiquer à la moindre apparition en prenant à ce moment-là les mesures fortes, afin que le quotidien soit dénué de cette menace constante. En clair, l’objectif n’est pas d’aplanir la courbe, mais de l’« écraser ».

Comme les études scientifiques l’ont démontré, un confinement est efficace pour freiner le taux de reproduction du coronavirus, y compris un confinement local, mais il faut pour cela des mesures cohérentes durant cette période — notamment la fermeture des établissements scolaires et un dépistage massif à cette occasion. Il est par ailleurs nécessaire que les entrées et sorties de la zone confinée soient limitées et contrôlées.

Stratégie zéro covid : l’exemple néozélandais

Prenons l’exemple néozélandais. Le dimanche 14 février 2021, après des semaines sans infection, 3 cas positifs sont détectés au sein d’une même famille, à Auckland. Résultat, le dimanche soir à minuit, toute la ville est confinée, soit 1,5 million de personnes. C’était un confinement strict : écoles fermées, lieux publics fermés, commerces non alimentaires fermés. À cela s’ajoute un isolement local : les entrées et sorties de la ville sont bouclées sauf exception. Ce confinement a été levé quelques jours plus tard.

Evolution des cas positifs au coronavirus en Nouvelle-Zélande. // Source : JHU CSSE COVID-19 Data

Evolution des cas positifs au coronavirus en Nouvelle-Zélande.

Source : JHU CSSE COVID-19 Data

La même stratégie avait été adoptée cet été. Après une centaine de jours sans le moindre cas, 4 contaminations au coronavirus ont été détectées, ce qui a déclenché immédiatement un confinement de deux semaines dans les grandes villes. La Nouvelle-Zélande est souvent citée comme exemple dans la bonne gestion de la crise sanitaire : s’il y a quelques contaminations, le bilan ne s’élève qu’à quelques 2 300 cas positifs en tout, et 26 décès.

L’applicabilité de cette stratégie

En février 2021, un collectif de médecins publiait dans Le Monde une tribune défendant la stratégie zéro covid. Même son de cloche dans une autre tribune collective intitulée Zéro Covid : pour une stratégie sanitaire d’élimination du coronavirus. Pour les auteurs, la stratégie française d’une mitigation « qui impose à la population des contraintes considérables pour une durée indéfinie, a conduit à un haut plateau épidémique faisant 400 morts et 20 000 contaminés par jour ».

Parallèlement, la stratégie du zéro covid « qui vise à l’élimination du virus, a été appliquée avec succès dans plusieurs pays, qui ont retrouvé leur vie sociale et leur activité productive ». En Allemagne aussi, un collectif appelait à du zéro covid : « Nous devons créer un consensus social autour de l’idée que, en tant que société, nous ne pouvons ni ne voulons vivre avec le virus, mais que nous souhaitons le vaincre. » Dans The Guardian, deux scientifiques estiment qu’il est préférable, tant sur le plan sanitaire qu’économique, de chercher à éliminer le virus plutôt que de vivre avec.

Ces idées ne font toutefois pas l’unanimité dans la communauté scientifique. Quelques voix estiment que cette stratégie est difficilement applicable en Europe. Les pays qui ont mis en œuvre le zéro covid sont essentiellement des pays insulaires (Nouvelle-Zélande, Australie). Mais est-ce vraiment un frein ? « S’il est vrai que l’insularité a aidé certains pays comme la Nouvelle-Zélande, une concertation entre pays frontaliers permettrait de pallier cette difficulté en Europe », contrebalancent les auteurs de la tribune parue dans Libération, rejoignant alors une correspondance parue dans The Lancet et qui appelait à une concertation européenne pour maintenir les contaminations à des niveaux très bas.

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