En 20 ans, la compréhension du génome humain a progressé de manière fulgurante. Pour le moment, les scientifiques ont uniquement réussi à faire de « l’édition génomique », c’est-à-dire à intervenir et à modifier les gènes à un endroit précis.
Cependant, le projet SynHG a pour ambition de changer la donne. Son but est, comme l’explique un communiqué de l’Université de Manchester ce 27 juin 2025, de réussir à synthétiser de grandes sections complexes d’ADN.
Ce projet, qui durera pendant les 5 prochaines années, réunit des chercheurs des universités de Cambridge, du Kent, de Manchester, d’Oxford et de l’Imperial College de Londres. Il a reçu 10 millions de livres sterling (soit environ 11 millions d’euros) de financement de la part d’une association caritative, Wellcome Trust.
Pourquoi synthétiser un chromosome entier ?
Réussir à créer entièrement un chromosome humain permettrait diverses avancées, par exemple au niveau de « thérapies cellulaires ciblées et de la transplantation de tissus résistants aux virus », présente le communiqué de presse. Le texte précise aussi que cela pourrait aller plus loin, et « permettre l’ingénierie d’espèces végétales avec de nouvelles propriétés, y compris la capacité de résister à un climat rigoureux ».
Aujourd’hui, les outils ne permettent pas « de produire de grandes sections plus complexes de matériel génétique, comme celles que l’on trouve chez les cultures, les animaux et les humains ». Synthétiser un chromosome humain entier est un véritable défi, car celui-ci contient environ 3 milliards de paires de base.

Pour réaliser ce pari, les scientifiques comptent s’appuyer sur l’intelligence artificielle. « Nous exploitons l’IA générative de pointe et des technologies avancées d’assemblage robotique pour révolutionner l’ingénierie des chromosomes synthétiques des mammifères », déclare le professeur Patrick Yizhi Cai, titulaire de la chaire de génomique synthétique à l’Université de Manchester, cité par cette même université. Le communiqué n’en dit cependant pas plus sur la manière dont l’IA sera concrètement mobilisée dans ces recherches.
Enfin, une partie de ce projet comportera un volet socio-éthique dénommé « Care full Synthesis ». Il sera dirigé par la professeure Joy Zhang, qui a fondé le Centre pour la science mondiale et la justice épistémique (GSEJ) à l’Université du Kent.
Des avis divergents au sein de la communauté scientifique
Les avis de la communauté scientifiques divergent déjà au sujet de cette initiative. Le biologiste Julian Sale, du Laboratoire de biologie moléculaire à Cambridge (impliqué dans le projet), est ainsi très optimiste auprès du Guardian : « Il y a une quantité incroyable de ce génome, parfois appelée la ‘matière noire’, dont nous ignorons la fonction. Si l’on parvient à construire des génomes avec succès, on pourra les comprendre pleinement. »
En revanche, d’autres avis sont plus nuancés et soulignent déjà des risques de dérives éthiques possibles. C’est notamment le cas du professeur Iain Brassington de l’Université de Manchester, qui étudie l’éthique de la technologie génétique. Il émet des réserves, dans ce même article du Guardian. Selon lui, ces travaux pourraient aboutir à la fabrication de bactéries, au génome synthétique, capables de digérer des produits pétrochimiques. Ce serait un bénéfice pour décomposer des déchets… mais ces bactéries devraient être manipulées avec grand soin. « De telles bactéries qui se retrouveraient dans l’environnement pourraient être catastrophiques. »
Par ailleurs, le projet est tellement ambitieux qu’il ne faut pas s’attendre à des résultats immédiats. Les scientifiques rappellent qu’il faudra probablement des décennies avant d’arriver à un résultat fiable, et pour obtenir des applications concrètes pour la santé.
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