Les « bulles » sociales au travail dans le foyer pourraient être un moyen de freiner la propagation du coronavirus. Mais c’est un principe contraignant et contesté.

L’infection par le coronavirus a principalement lieu lors de contacts humains rapprochés, dans des espaces clos. C’est ainsi que la maladie se propage de groupe social en groupe social : par exemple, le virus peut contaminer lors d’une soirée, puis être apporté par la suite sur le lieu de travail. Dans le Canadian Medical Association Journal, des chercheurs relèvent ainsi qu’une « proportion substantielle de la diffusion de SARS-CoV-2 est provenue de contacts au travail », et que des stratégies spécifiques doivent prendre cela en compte.

Le risque de contamination au travail chute lorsque des mesures sont misent en place par l’employeur pour protéger les employés : masques, distanciation physique, aération, horaires décalés, recours par alternance au télétravail. Mais certains types de professions ne sont pas forcément adaptés, par leur nature, à ces aménagements. C’est le cas notamment dans les usines ou les commerces. Ces lieux de travail, qui nécessitent du présentiel, peuvent être profondément impactés en cas de cluster : l’intégralité de l’équipe se retrouve cas contact, ne pouvant plus se rendre au travail. Les entreprises peuvent alors être en danger économique. Par ailleurs, même les lieux de travail où le télétravail est possible peuvent avoir besoin du maintenir du lien social, avec des réunions physiques régulières. Quelle est la solution ?

C'est le type de configuration à éviter absolument au travail : dans une salle de réunion, il faut porter un masque et maintenir une distanciation physique. // Source : Pexels - modifié

C'est le type de configuration à éviter absolument au travail : dans une salle de réunion, il faut porter un masque et maintenir une distanciation physique.

Source : Pexels - modifié

Des groupes distincts au travail ?

Pour éviter la création de tels clusters à l’échelle de toute une entreprise, les auteurs de ce papier suggèrent la création de « bulles de travail ». « Il est largement admis que les mesures de distanciation physique ont considérablement réduit la propagation du SRAS-CoV-2 », écrivent-ils. Concernant le travail, cela passe souvent par le télétravail, au moins d’une partie des salariés. Mais lorsque c’est impossible et que tous les salariés doivent être présents au quotidien, comment équilibrer la distanciation physique et le travail en commun ?

Pour les auteurs, l’employeur doit structurer ses équipes en groupes distincts. Ces groupes, ou « bulles », sont séparés physiquement, tant et si bien que les contacts n’existent qu’au sein d’une seule et même bulle, pas entre bulles. Ainsi, en cas de contamination d’une personne, seul son groupe est isolé, et les autres groupes peuvent continuer à travailler normalement. L’entreprise n’est pas paralysée.

Les auteurs montrent qu’une entreprise canadienne comme Bombardier fonctionne de cette façon. Les bulles y sont construites à partir de trois principes : elles sont composées du nombre minimal de personnes nécessitant leur bon fonctionnement ; elles sont réfléchies de façon à ce que si cette bulle est isolée, ne pouvant plus travailler, l’entreprise ne soit pas paralysée ; les bulles sont éloignées dans l’espace et les horaires (chez Bombardier, il s’agit d’un seul groupe par avion, par exemple).

« Tu veux être dans ma bulle ? »

Le principe avancé par les auteurs de ce papier est dans la continuité de l’idée de « bulles sociales » : il s’agit de la même mécanique, mais appliquée dans la vie quotidienne pour les sphères familiales et amicales. C’est ce qu’applique la Belgique. Au sein d’un même foyer, les Belges doivent choisir un cercle de 5 personnes maximum avec qui ils et elles auront un contact approché. Par « contact rapproché », il faut entendre par exemple manger ensemble, regarder un film, prendre un verre, etc. : des personnes que l’on voit sans masque et sans distanciation physique. Voir d’autres personnes en dehors de la bulle est possible mais sans ces contacts rapprochés, en respectant tous les gestes barrières.

Les bulles sociales ne sont pas sans causer quelques choix délicats chez les Belges. C’est ce que raconte avec humour la tiktokeuse Alizée (@Alzliz), habitante de Bruxelles, en comparant la mesure aux Hunger Games de l’amitié : « Tu dois choisir trois personnes, trois amis, que tu veux voir pendant plusieurs mois, car tu ne peux pas changer ta bulle. Donc si tu te disputes avec quelqu’un, tant pis ! (…) Et si tu choisis quelqu’un dans ta bulle, l’autre personne doit te choisir aussi. » Dans les commentaires de la vidéo, plusieurs personnes relèvent toutefois que la mesure n’est pas vraiment respectée.

D’autant qu’elle a sans cesse évolué au fil de l’épidémie, passant de 2 à 4, ensuite de 5 à 15, puis à nouveau à 5, puis à 3 (dernier chiffre en date). Son rôle fait débat au sein du pays, entre des épidémiologistes qui estiment qu’il faut abandonner la bulle, non-contrôlée, non-contrôlable et superflue ; et d’autres qui considèrent que c’est justement son instauration qui aide à contrôler l’épidémie et qu’il ne faut pas trop l’élargir.

En France, la bulle sociale fait partie des mesures plus fortes envisagées par le gouvernement et qui pourraient être annoncées par Emmanuel Macron ce mercredi 14 octobre, comme l’éventualité d’un couvre-feu localisé.

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