Cambridge Analytica, l’entreprise qui est au cœur du scandale des données personnelles aspirées via un quiz sur Facebook, a annoncé jeter l’éponge. L’entreprise britannique considère qu’il n’est plus possible de continuer face au tsunami médiatique contre elle.

C’est terminé pour Cambridge Analytica. La société britannique, qui était au centre du scandale des données personnelles récupérées via un quiz publié sur Facebook, a fait savoir mercredi 2 mai qu’elle mettait la clé sous la porte. Elle et sa maison-mère, Strategic Communication Laboratories (SCL), ont annoncé avoir enclenché une « procédure d’insolvabilité au Royaume-Uni ».

« L’entreprise met immédiatement fin à toutes ses activités », déclare le groupe dans un communiqué, dans la mesure où « il a été établi qu’il n’est plus viable de continuer cette activité, ce qui a laissé Cambridge Analytica sans alternative réaliste ». Cela vaut aussi pour les activités américaines de l’entreprise, qui feront prochainement l’objet d’une procédure pour organiser leur faillite.

Cambridge Analytica

Les données sont le moteur de tout ce que nous faisons.

Le scandale Cambridge Analytica a éclaté en mars, grâce à un lanceur d’alerte.

Dans cette affaire, il a été découvert que cette entreprise collectait des données via le concours d’une autre firme, Global Science Research, qui agissait comme un sous-traitant. Une application de quiz, « This Is Your Digital Life », avait été développée. Or, celle-ci n’enregistrait pas que les réponses des internautes : elle aspirait aussi leurs données et celles de leurs contacts sur Facebook.

Si l’application n’avait été installée « que » par un peu plus de 300 000 personnes, ce sont en tout 87 millions d’internautes qui ont été touchés, du fait des règles à l’époque très lâches de Facebook sur l’accès aux données. En France, on a dénombré environ 211 000 personnes touchées. Il est possible de vérifier si ses renseignements ont été siphonnés en suivant ce lien.

Cambridge Analytica conteste en bloc

À l’occasion de la publication de son communiqué, Cambridge Analytica a encore une fois contesté la manière dont les choses ont été présentées dans les médias.

« Ces derniers mois, Cambridge Analytica a fait l’objet de nombreuses accusations non fondées et, malgré les efforts de la société pour corriger ça, a été vilipendée pour des activités qui sont non seulement légales, mais aussi largement acceptées comme un aspect classique de la publicité en ligne dans les domaines politique mais aussi commercial », assure-t-elle.

« Malgré la confiance inébranlable de Cambridge Analytica dans le fait que ses employés ont agi de façon éthique et légale, […], le siège provoqué par la couverture médiatique a chassé pratiquement tous les clients et fournisseurs de la société ». En outre, s’appuyant sur une enquête indépendante réalisée à sa demande, qu’elle cite, Cambridge Analytica dit que « rien de ce que ses employés ont lu ou entendu ne correspondait à ce qu’ils faisaient réellement pour gagner leur vie ».

Alexander Nix

Alexander Nix.
CC Web Summit

Ces démentis constants de Cambridge Analytica ont toutefois été ébranlés par les déclarations de plusieurs cadres et anciens responsables, captées par une caméra cachée d’une télévision britannique (c’est le cas du patron de Cambridge Analytica, qui a ensuite été suspendu par le conseil d’administration) ou prononcées dans le cadre d’un témoignage devant le parlement britannique.

Le scandale de Cambridge Analytica ne concerne d’ailleurs pas uniquement la simple aspiration des données personnelles. L’autre volet de l’affaire est leur utilisation des fins politiques. Ainsi, lors de la caméra cachée, le patron de Cambridge Analytica déclarait que son groupe a « géré toute la campagne numérique » pour Donald Trump et que des coups tordus ont parfois été utilisés.

Facebook éclaboussé

Ces révélations ont aussi éclaboussé Facebook, puisque c’est via le réseau social que la firme britannique a pu déployer ce quiz et récupérer des données personnelles. L’affaire a mis en lumière le manque de contrôle de la part du site communautaire, alors qu’il a été constaté qu’il connaissait dès 2015 que la société spécialisée dans l’analyse de données avait franchi la ligne jaune à quelques reprises.

Depuis, Facebook a multiplié les initiatives pour redorer son image de marque : Mark Zuckerberg s’est présenté devant les représentants et les sénateurs des États-Unis, est intervenu dans la presse et sur son propre mur. En parallèle, des annonces sur le ciblage de la publicité, la chasse aux abus, la vérification de ses données (une mesure qui était prévue avant le scandale) ont été faites.

parlement-europeen

CC Diamond Geezer

Cela étant, le réseau social n’échappera pas à un certain nombre d’enquêtes malgré les effets d’annonce et les efforts médiatiques déployés depuis mars, que ce soit celle de la Commission fédérale du commerce aux USA, celle de la Cnil britannique, soutenue par les autres autorités de contrôle (celle-ci enquêtant en outre que Cambridge Analytica, cette fois au sujet du Brexit).

L’Union européenne souhaiterait aussi pouvoir auditionner Mark Zuckerberg, comme l’ont fait les parlementaires américains. En mars, Antonio Tajani, le président du Parlement, a ainsi invité le patron et fondateur de Facebook à venir sur le Vieux Continent, une initiative soutenue par les chefs des partis politiques dans l’enceinte parlementaire mais aussi par la Commission européenne.

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