Pendant un week-end, on a pu enchaîner les kilomètres à bord d’une Tesla Model S Plaid. L’occasion d’essayer le fameux volant Yoke, qui est désormais une option sur la berline premium.

Le volant Yoke de la Tesla Model S et du Tesla Model X a déjà tant fait parler, depuis les premières images de l’habitacle des deux véhicules (tous deux rafraîchis début 2021). Le constructeur va-t-il trop loin dans l’audace ? Pourquoi ce design, au fond ? De manière plus pragmatique : allait-il être homologué en France ? La réponse à cette question est oui, puisqu’il est bien possible de commander une Model S ou un Model X avec un volant classique ou cette version Yoke (qui a d’abord été imposée de série).

Le volant Yoke est intrigant, car il suppose une nouvelle adaptation à un dispositif qui a toujours été circulaire dans l’esprit collectif. À l’autoécole, on apprend à conduire avec un volant circulaire. Dans les concessions classiques, on ne trouve que des voitures pourvues d’un volant circulaire. Bref, le volant Yoke exige d’en finir avec des habitudes parfois ancrées depuis des décennies. Pourtant, il m’a peut-être fallu 10 minutes pour m’y accommoder, à l’occasion d’un essai de plusieurs jours d’une Model S Plaid.

Le volant Yoke de la Tesla Model S Plaid // Source : Thomas Ancelle pour Numerama
Le volant Yoke de la Tesla Model S Plaid. // Source : Thomas Ancelle pour Numerama

90 à 95 % du temps, le volant Yoke est parfait

Pourquoi ce design, au fond ? Le volant Yoke laisse forcément songeur, et beaucoup se diront sans doute que Tesla n’a pas besoin d’être aussi transgressif pour vendre des voitures. En réalité, il est difficile de ne pas voir le volant Yoke comme autre chose qu’une course effrénée à l’épuration au sein de l’habitacle — dans laquelle la multinationale dispose déjà d’une avance considérable. Un design rectangulaire permet d’enlever de la pollution visuelle : le demi-cercle supérieur peut gâcher la vue sur l’écran de bord, voire la route. Les autres acteurs du marché automobile ont tenté des approches différentes, dans le sillage des parties plates chez les derniers volants Peugeot, ou de l’affichage tête haute.

On se surprend à oublier très vite nos habitudes

La philosophie derrière le Yoke est donc d’aller encore plus loin : on supprime le superflu, comme on a déjà supprimé les boutons physiques pour tout concentrer sur un immense écran. Tesla est même allé jusqu’à retirer les commodos, qui servent généralement à indiquer sa direction et à actionner les essuie-glaces. Ces fonctionnalités sont déportées sur des surfaces tactiles avec un retour haptique — ni trop léger, ni trop envahissant (soit bien dosé). Pour remplacer le commodo droit normalement dédié aux modes de conduite sur les autres voitures de Tesla, il faut passer par la partie gauche de l’écran. Elle affiche une petite voiture que l’on fait glisser vers le haut (avancer) ou vers le bas (reculer). Enlever sa ceinture enclenchera automatiquement le mode Parking, tandis qu’il existe une option pour que la voiture suggère elle-même quel mode activer (exemple : si l’on fait face à un mur, elle se mettra en marche arrière).

Oui, il faut appuyer sur des « boutons » pour signaler que l’on va à droite ou à gauche avec un volant Yoke entre les mains. On appuie vers le haut pour droite, vers le bas pour gauche, sachant qu’il y a une petite barre pour séparer les deux zones. C’était le point qui m’effrayait le plus avec ce volant Yoke. Finalement, tout tombe étonnement bien sous le pouce. Tout juste a-t-on des gestes fantômes (par instinct) et se sent-on perdu quand le volant est tourné à plus de 90 degrés et qu’il faut signaler sa direction (exemple : quand on prend la troisième voie dans un rond-point). On appréhende alors ces situations, même si elles restent rares quand on roule. Aussi, les premiers virages serrés pourront paraître effrayants, le temps de comprendre comment fonctionne le volant Yoke.

Vers la gauche Vers la droite

Bien évidemment, on cherche parfois ses gestes lorsqu’on manœuvre avec le volant Yoke. Instinctivement, nos bras ont tendance à faire de petits gestes vers le haut, en quête de ce demi-cercle auquel se raccrocher. Le volant Yoke impose un petit réapprentissage : au lieu de multiplier les mouvements qui tirent vers la droite ou vers la gauche, il faudra pousser depuis le bas du volant. Il faut réaliser des gestes plus fermes et plus précis, là où l’on a une marge d’erreurs plus grande sur un volant classique (puisqu’on fait plus de petits gestes). En tout cas, pendant nos 1 500 km à bord de la Model S Plaid, on ne s’est jamais mis en danger à cause du Yoke, pas plus que nous n’avons raté de manœuvres. À ce sujet, il faut noter un point essentiel : le rayon de braquage de la Model S Plaid est incroyablement faible, ce qui la rend très maniable malgré ses 5 mètres de long.

En ligne droite, le volant Yoke livre tous ses bénéfices. On pose ses paumes de chaque côté, et l’on a l’impression d’être un pilote (pour rappel, les volants de F1 sont rectangulaires). C’est grisant, et l’on comprend pourquoi Tesla a opté pour cette forme, effrayante de prime abord, mais très pertinente à l’usage. On se surprend à oublier très vite des habitudes, qui s’effacent avec beaucoup de naturel derrière de nouvelles.

Pendant l’essai, j’ai laissé le volant Yoke à Thomas Ancelle, vidéaste pour Numerama, qui m’accompagnait. Ses impressions sont positives également : « En ligne droite, le volant Yoke est très agréable, l’aspect ‘poignée’ procure une prise en main ferme et confortable, en plus du plaisir esthétique d’avoir la sensation de conduire une voiture de course. Il m’aura fallu un temps pour perdre mes vieux réflexes, ma mémoire musculaire cherchant en permanence les commodos. Malgré un petit exercice mental au moment d’effectuer un créneau, je pense que je pourrais très rapidement m’habituer à ce volant Yoke. En tout cas, j’y ai déjà pris goût. »


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