Opposé à la 5G, le maire de Grenoble a maintenant la 6G en ligne de mire. Mais les possibilités pour l’édile d’édicter des moratoires sont très limitées, car ces sujets ne sont pas directement de son ressort.

Après le moratoire sur la 5G, la ville de Grenoble édictera-t-elle un moratoire sur la 6G, qui n’arrivera pas en France avant une dizaine d’années ? Le maire de la commune, Éric Piolle, exprime en tout cas une vive réticence à la perspective de voir arriver cette future génération de la téléphonie mobile, selon des propos rapportés par Actu.fr le 29 juin.

« Après le 30 juin, un nouvel enjeu se posera devant nous, celui de la 6G dont on nous annonce une mise en place rapide, à l’horizon 2030 », a fait remarquer l’édile étiqueté Europe Écologie-Les Verts (EELV). « Les enjeux sont trop importants pour nos vies, notre santé, notamment mentale, pour le climat et pour notre sécurité géopolitique. »

La 6G est aujourd’hui une technologie tout juste balbutiante dont les contours sont encore très flous. Sa promesse centrale est d’accroître encore plus le débit (Samsung se félicitait d’un transfert à 775 Mo/s lors d’un test), mais la portée du signal s’avère l’un des principaux obstacles, à cause des caractéristiques particulières des fréquences chargées de porter les données.

Quant aux usages, c’est encore un terrain à investir. Les industriels commencent à imaginer des applications (réplique numérique, hologramme, réalité immersive étendue, etc.). Plusieurs grandes puissances industrielles et de recherche — États-Unis, Chine, Japon, Union européenne, mais aussi France — s’emploient à être au rendez-vous et à peser sur la définition de la norme.

Une hostilité affichée contre la 6G, après l’opposition à la 5G

L’hostilité de la ville de Grenoble et de son maire à l’arrivée de la 6G s’inscrit dans un contexte de défiance à l’égard des technologies sans fil, qui reposent sur l’usage des ondes pour acheminer les communications. Plusieurs mairies avaient appelé à prendre un moratoire sur la 5G avant le début effectif du déploiement par les quatre opérateurs nationaux, à partir de fin 2020.

Parmi les communes notables impliquées dans ce mouvement figuraient Besançon, Blois, Bordeaux, Bourg-en-Bresse, Grenoble, Lyon, Marseille, Paris 12e, Poitiers, Pointe-à-Pitre, Strasbourg, Tours et Villeurbanne. Dans le cas de Lille, cela avait donné lieu à une intervention de Cédric O, alors secrétaire d’État au numérique, pour critiquer la décision de sa maire, Martine Aubry.

Les travaux de l’Agence nationale des fréquences (Anfr), mais aussi de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), n’ont pas permis de montrer des risques manifestes pour la santé, y compris sur les futures fréquences de la 5G. L’analyse de la littérature scientifique disponible à l’international non plus.

5G santé
La question sanitaire revient régulièrement à chaque nouvelle génération de la téléphonie mobile. // Source : Melvyn Dadure pour Numerama

Cela étant, les autorités ont pris la mesure de la défiance qui existe au sujet de ces technologies. Promesse a donc été faite d’augmenter les contrôles aussi bien au niveau des smartphones que des antennes-relais, tandis que la recherche est invitée à poursuivre ses travaux pour compléter les études disponibles et se pencher sur des fréquences jusqu’à présent peu analysées.

L’opposition de plusieurs maires, classés à gauche (une tribune avait été publiée en 2020, mais reposant sur des arguments discutables), a donc parfois donné lieu à des actes administratifs, comme le moratoire à Lille. Grenoble aussi avait pris un arrêté décrétant un moratoire sur la 5G. Texte qui a été examiné le 30 juin par le tribunal administratif — d’où l’échéance citée par Éric Piolle.

Et justement, la mesure prise par Éric Piolle est en mauvaise passe. Comme l’a fait observer l’avocat Alexandre Archambault, spécialiste des réseaux, le rapporteur public a conclu à l’annulation de ce moratoire sur la 5G à Grenoble. La ville n’a pas tenu à se faire représenter, a signalé d’ailleurs Le Dauphiné Libéré. Il reste toutefois encore au tribunal de rendre son jugement.

Au-delà de l’exactitude des reproches qui peuvent être formulées contre les ondes (l’hostilité rencontrée aujourd’hui par la 5G est la même subie en son temps par la 3G et la 4G et qu’affrontera certainement la 6G dans quelques années), cette affaire illustre toutefois la marge de manœuvre réduite des maires sur la 5G. Car ce sujet n’est pas directement de son ressort.

Source : Numerama

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