MegaUpload a peut-être plus fait pour la promotion des films indépendants que nombre de studios de cinéma. Une étude européenne soutient en tout cas que la plate-forme de téléchargement avait un impact plutôt positif sur la fréquentation des films indépendants, en jouant le rôle de recommandation sociale.

Des années durant, MegaUpload a été la bête noire de l'industrie cinématographique. Les principales sociétés de production craignaient en effet que son laxisme dans la lutte contre le piratage d'œuvres protégées par le droit d'auteur ne pèse sur leurs activités. Aussi ont-elles soutenu toute mesure visant à faire chuter le service d'hébergement, au motif qu'il représentait un danger pour le cinéma.

Aujourd'hui, MegaUpload n'est plus. Peut-être reviendra-t-il un jour, sous une forme ou sous une autre. Peut-être n'est-ce tout simplement qu'une provocation de plus, destinée à agacer les ayants droit. Toujours est-il que la plate-forme est fermée depuis bientôt un an. Or contre toute attente, une étude européenne vient battre en brèche la position tenue par les studios en estimant que MegaUpload avait un rôle positif.

MegaUpload, béquille des films indés ?

Les travaux ont été menés par l'Allemand Christian Peukert, doctorant et chargé de cours à l'université Louis-et-Maximilien de Munich, et le Danois Jörg Claussen, maître de conférences associé au sein de l'école de commerce de Copenhague. Leur recherche révèle que la fermeture de MegaUpload a eu un effet négatif sur la fréquentation des salles de cinéma.

Tous les longs-métrages n'ont cependant pas été  touchés de la même manière. Sur les 1344 oeuvres sélectionnées pour l'étude, il ressort que les superproductions n'ont pas trop souffert de la disparition de MegaUpload. Mieux : l'arrêt du service a légèrement amélioré la fréquentation en salles pour les blockbusters. En revanche, les films indépendants sont les perdants de cette fermeture.

Sur l'échantillon observé, les chercheurs expliquent que les films sont issus de 49 pays et sont sortis au cinéma entre 2007 (semaine 31) et 2012 (semaine 35). Ils ont cherché à ratisser large, en observant des longs-métrages de différents genres, dotés de budgets différents et bénéficiant ou non d'une importante visibilité (dans l'étude, les blockbusters sont considérés ainsi lorsqu'ils sortent au moins sur 500 écrans).

Les films indépendants en ont profité

Comment est-ce possible ? Pour les auteurs de l'étude, la raison est évidente : les films indépendants disponibles sur MegaUpload étaient recommandés par les internautes, incitant ces derniers à les voir dans les salles obscures. MegaUpload s'est ainsi retrouvé un peu par hasard au centre d'un système de recommandation sociale, poussant les hésitants à acheter une place de cinéma.

Faut-il en conclure que MegaUpload soutenait indirectement les films au budget marketing inexistant face aux blockbusters soutenus par une impitoyable machine de guerre marketing ? L'étude ne va pas jusque là, mais laisse entendre en filigrane que le service d'hébergement a d'une certaine manière comblé l'espace qui aurait dû être occupé par les sociétés de production.

En effet, les films indépendants ne jouissent pas de la même visibilité médiatique qu'une superproduction. Les moyens engagés pour chacune des deux catégories ne sont, certes, pas les mêmes. Un échec sur une superproduction peut mettre un studio en grande difficulté, à l'image de la perte importante (200 millions de dollars) essuyée par Disney avec John Carter.

Cette étude va en tout cas alimenter la thèse selon laquelle les échanges sur les réseaux P2P, les newsgroups ou les services dédiés contribuent à la médiatisation d’œuvres n'étant pas toujours soutenues par l'industrie du divertissement, notamment lorsqu'il s'agit de contenus créés par des créateurs par encore bancables, à défaut de pouvoir compter sur le soutien des industries culturelles.


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