Sur le tournage de WandaVision, la production a demandé aux figurantes de se placer devant des caméras, pour les filmer sous toutes les coutures. C’était un scan visant à pouvoir produire leur avatar numérique. C’est ce que dénonce une enquête du média NPR, qui a interrogé des personnes concernées.

« Mettez vos mains vers l’extérieur. Mettez vos mains vers vous. Regardez par ici. Regardez par là. Montrez votre visage effrayé. Montrez votre visage surpris. » Comme des dizaines d’autres figurants et figurantes, Alexandria Rubalcaba a suivi ce type d’instructions lorsqu’elle a été scannée sur le plateau de tournage de WandaVision, rapporte une enquête de NPR publiée le 2 août 2023.

Elle explique qu’après une douzaine de semaines de tournage, la production lui a demandé de se placer sur la remorque d’un tracteur. Là, elle fit face à toute une série de caméras, installées chacune sur un support métallique, le tout derrière une vitre. L’objectif : scanner son visage et son corps, pour produire un avatar numérique. La session durait un quart d’heure, se rappelle Alexandria. Sauf que cette dernière — comme aucun figurant ni aucune figurante — n’a pas donné son accord pour la création de cet avatar. Sur place, le flou régnait sur l’usage de ce scan.

« Elle n’a jamais été informée de la manière dont cet avatar numérique d’elle-même serait utilisé à l’écran, ni même si c’était le cas. Si c’est le cas, elle ne le saura peut-être jamais », alerte NPR. Si cette réplique venait à être utilisée, les personnes scannées ne seraient jamais rémunérées pour cela.

Les règles de l’utilisation de l’IA au cœur de la grève

« Et si je ne veux pas participer à MarioVision ou à SarahVision ? », s’inquiète Alexandria, interrogée par le média. « Je crains que l’IA ne finisse par éliminer les acteurs de second plan. Ils n’auront plus besoin de nous. » On touche là à un point central de la grève des acteurs et des scénaristes, qui se joue en ce moment même à Hollywood : l’usage de l’intelligence artificielle (en plus de métiers sous-payés).

Le tournage de WandaVision, c'était un épisode de Black Mirror ? // Source : Disney+
Le tournage de WandaVision, c’était un épisode de Black Mirror ? // Source : Disney+

L’usage de ces technologies s’accroît dans les studios, menace des emplois et pose la question du consentement des images. « Notre image est en fait la seule chose que nous possédons vraiment, alors, pour nous, cela constitue une menace existentielle », confie, dans cette enquête, Katrina Sherwood, qui travaille comme doublure et figurante à Los Angeles.

À la mi-juillet, un porte-parole de l’un des syndicats organisant la grève a mis en lumière l’une des propositions avancées par une association de studios. « (…) Ils ont proposé que les acteurs de second plan puissent être scannés, recevoir un jour de salaire, et que les entreprises soient alors propriétaires de ce scan, de leur image, de leur apparence, et puissent l’utiliser pour le reste de l’éternité sur n’importe quel projet, sans consentement ni compensation. » Un représentant de l’association des studios avait renié cette affirmation, en particulier l’aspect « ad vitam eternam », indiquant que les studios n’auraient la propriété de l’image que pour la production durant laquelle les acteurs sont scannés.

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Disney a scanné des figurants de WandaVision : pour ne plus avoir à les payer ? 😳 #wandavision #writerstrike #acteur #actrice #greve #disney #numerama #marvel #storytime #cinema

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Il n’en demeure pas moins que les acteurs et actrices, tout comme les scénaristes, sont inquiets de la généralisation de cette pratique. « Imaginez les scènes de bal, les scènes de fête, toutes les scènes qui nécessitent des tonnes de figurants », confie, auprès de NPR, Andrew Susskind, professeur associé au département cinéma et télévision de l’université de Drexel. « Imaginez les sommes d’argent qu’ils économiseraient. Ils ne paieraient pas 180 dollars par jour. Ni les repas. Ni les costumes. » Avant d’ajouter : « Les acteurs, les figurants et les scénaristes ont raison de considérer ce moment comme leur meilleure chance de définir les règles de l’utilisation de l’IA. »

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