Le lithium, ou « or blanc », est une ressource essentielle à l’ère de l’électromobilité. La Commission européenne estime qu’en 2030, l’Union européenne aura besoin de 18 fois plus de lithium (un matériau alcalin dont la formule chimique est LiOH,H2O). De son côté, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime qu’il sera nécessaire de multiplier par 40 la production de ce métal d’ici à 2040 pour « répondre aux besoins des nouveaux usages liés à la mobilité électrique ». Même si le sodium pourrait un jour remplacer le lithium, ce métal est devenu un élément essentiel au développement des véhicules électriques et la France aimerait réduire sa dépendance aux pays producteurs.
Trois nations dominent l’extraction de lithium à travers le monde : l’Australie (loin devant), le Chili et la Chine. En Europe, le Portugal est le premier pays producteur, mais reste largement derrière l’Argentine, le Brésil ou encore le Zimbabwe. Selon une étude menée par Statista en juin 2023, c’est le Chili qui détient les plus grandes réserves de lithium au monde. En France, il y a vraisemblablement un potentiel. C’est en tout cas ce que montre une étude réalisée par le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM).
Où se trouvent les réserves de lithium en France ?
Selon les estimations de l’établissement public français, la France disposerait de « trois types de minéralisation : les pegmatites lithinifères, les granites à métaux rares et les greisens associés ». Dans le détail, 41 minéralisations lithinifères appartenant à 6 types différents de gisements sont recensées dans notre pays. Il ressort de l’étude que le Massif central apparaît comme « le domaine le plus prospectif pour l’exploration minière ».
D’autres parties du territoire français pourraient également convenir à l’extraction de lithium. C’est, par exemple, le cas du sud du Massif Armoricain, des massifs varisques isolés de la Montagne Noire, des Maures-Tanneron et des Vosges. Le BRGM recommande d’effectuer des recherches en priorité dans les zones de Beauvoir, de Montebras, de Richemont et de Tréguennec en Bretagne. La prospection de nouvelles zones dans le massif de Montmarault, le nord de la Margeride et le flanc ouest du massif du Millevaches, est envisagée.
Imerys, un projet concret sur le territoire français ?
Pilier de l’industrie française et leader mondial des spécialités minérales, Imerys fait figure de sauveur sur le sujet de l’extraction du lithium en France. C’est certainement l’entreprise qui avance sur le projet minier le plus concret : le projet EMILI à Beauvoir, dans l’Allier. Selon l’entreprise, ce pourrait être « le plus grand projet d’extraction de lithium en Europe à ce jour. L’entrée en production du site est prévue pour 2028. »
Avec une production annuelle estimée à 34 000 tonnes d’hydroxyde de lithium, ce projet pourrait permettre de répondre à la demande mondiale qui pourrait atteindre 2,3 millions de tonnes d’équivalent carbonate de lithium. L’entreprise française veut contribuer à la création d’une filière européenne pour les batteries des véhicules électriques. Avec EMILI (pour « Exploitation de MIca Lithinifère par Imerys »), Imerys ambitionne d’offrir une solution à long terme afin de répondre aux « ambitions de décarbonisation de l’Europe ».
C’est un beau projet, mais au sujet duquel beaucoup d’interrogations subsistent. Imerys multiplie forages et études techniques sur sa carrière de kaolin d’Echassières. Mais, pour aller chercher du lithium, il faut profondément creuser dans la roche dure et ce n’est pas du gâteau. Le travail effectué par l’industriel français consiste à augmenter le degré de confiance dans la qualité du gisement. Rappelons qu’elle n’est pour le moment que « présumée ».
Comme le rappelle Fabrice Frébourg, chef de projet environnement chargé des procédures d’autorisation pour le projet EMILI, auprès de l’Usine nouvelle, « c’est un projet à étapes. Nous en sommes à la phase de cadrage et de validation des procédés en laboratoire, mais nous devrons ensuite passer à la phase de préfaisabilité, puis de faisabilité ». Aujourd’hui, le projet n’en est encore qu’au stade de l’embauche.
Le début de l’exploitation de la mine prévu pour 2028 pourrait donc être largement retardé. Sans parler du prix du lithium actuellement en baisse avec lequel Imerys devra composer. Détenu à 80 % par cinq grandes compagnies, Imerys n’est donc pas près de révolutionner le marché de l’or blanc.
Lithium de France, l’autre acteur qui veut sa part
En Alsace, à Bischwiller, se trouve Lithium de France. Cette filiale du groupe Arverne regroupe une vingtaine de salariés, mais compte bien se développer dans les années à venir. L’entreprise travaille sur « sa propre méthode d’extraction du lithium par géothermie » et prévoit d’investir 44 millions d’euros afin d’exploiter des gisements de lithium en Alsace. Une région qui pourrait « représenter 30 % des besoins français en lithium », d’après Jean-Jacques Graff, président de l’Association française des professionnels de la géothermie.
Lithium de France a officialisé une levée de fonds début 2023 et se revendique comme étant l’entreprise pionnière « de la chaleur et du lithium géothermal ». En moins de 18 mois, l’entreprise a levé 52 millions d’euros. Pierre Brossollet, Président de Lithium de France, précise dans un communiqué que « cette opération de financement en capital constitue une étape décisive et structurante pour notre développement ».
De son côté, Guillaume Borrel, Directeur Général de l’entreprise, est convaincu que les eaux géothermales du sous-sol français constituent une ressource propre et inépuisable en chaleur à usage local. Il assure, dans le même communiqué, qu’elles permettent l’extraction du lithium « dont on connaît le potentiel dans le Bas-Rhin et l’importance des besoins en France et dans toute l’Europe ». Lithium de France affirme que les premiers résultats de ses explorations en Alsace sont déjà très prometteurs.
À terme, l’extraction du lithium en France devrait permettre de créer une filière forte des batteries électriques. Plusieurs usines vont voir le jour dans les prochaines années dans les Hauts-de-France. Si ces différents acteurs parviennent à extraire du lithium sur notre territoire, on peut espérer produire des batteries pour les véhicules électriques moins polluantes et moins chères.
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