L’ISS abrite de nombreuses bactéries, apportées par les humains. Pourraient-elles compromettre la santé des astronautes ? Il vaudrait mieux le savoir avant d’envoyer des humains confinés dans des vaisseaux vers Mars.

À bord de la station spatiale internationale, les astronautes en mission ne sont pas seuls : l’intérieur de l’habitacle est rempli de bactéries. Une équipe de scientifiques, dont des chercheurs du Jet Propulsion Laboratory de la Nasa, a étudié les surfaces de l’ISS. Les résultats sont parus dans la revue Microbiome le 8 avril 2019.

Les scientifiques ont dressé un inventaire de 133 populations de bactéries et 81 populations de champignons qui peuplent la Station spatiale internationale. Ils ont découvert que la plupart de ces organismes font partie du microbiote de l’organisme humain, c’est-à-dire les bactéries que notre organisme contient. En d’autres termes : ce sont les astronautes qui ont amené ces microbes dans l’ISS.

Comprendre l’impact de ces micro-organismes sur la santé est capital pour les futures missions de la Nasa : l’agence spatiale compte envoyer un humain sur Mars dans 14 ans. Parmi les nombreux préparatifs de cette expédition, l’étude des micro-organismes et de leur accumulation dans des espaces confinés ne peut pas être délaissée.

Un risque pour la santé humaine ?

Une importante partie des microbes appartient au genre des staphylocoques — des espèces de cette bactérie vivent dans nos fosses nasales ou notre peau. Le staphylocoque dorée représente 10 % des bactéries identifiées. Cette espèce est présente chez l’humain mais peut devenir pathogène dans certaines circonstances, causant des intoxications alimentaires ou des infections. Les scientifiques ont aussi retrouvé la bactérie du genre Enterobacter, qui se trouve dans l’intestin humain et peut être responsable d’infections nocosomiales (attrapées dans des lieux de santé).

Pourquoi est-il si important d’étudier ces microbes ? La Station spatiale internationale est un espace clos, où les moyens médicaux sont limités (par rapport à ceux disponibles sur Terre). On sait aussi que, dans l’espace, le système immunitaire des humains devient particulièrement actif. « Des microbes spécifiques dans ces espaces intérieurs ont un impact sur la santé humaine », rappellent les scientifiques. Dans l’espace, le corps humain peut devenir plus sensible à certaines maladies — le virus de l’herpès peut par exemple se réactiver en plein vol.

Un astronaute de l'ISS pendant une sortie. // Source : Pixabay (photo recadrée)

Un astronaute de l'ISS pendant une sortie.

Source : Pixabay (photo recadrée)

Difficile de savoir depuis quand ces microbes sont arrivés et quels astronautes les ont apportés. « Les microbes sont connus pour survivre et prospérer dans des environnements extrêmes, et les microbes présents dans l’ISS peuvent avoir existé depuis la création de l’ISS, tandis que d’autres ont pu être apporté à l’arrivée de chaque nouvel astronaute ou charge utile », écrivent les auteurs de l’étude.

Des échantillons recueillis pendant plus d’un an

Pour étudier ces organismes, les scientifiques se heurtent à des limites : seule une partie d’entre eux peut être cultivée en laboratoire, sur Terre. Dans la station spatiale, les instruments disponibles ne permettent pas non plus de surveiller cette communauté de microbes. Voici comment la Nasa a procédé : pendant plus d’un an, des astronautes ont récupéré des échantillons sur 24 lingettes différentes. Ils les ont frottées sur 8 surfaces de l’habitacle, comme la table permettant de déjeuner ou le compartiment destiné aux déchets et à l’hygiène. Quelques lingettes ont simplement été exposées à l’environnement de l’ISS, sans récolter d’échantillon, pour servir de comparaison.

Les résultats de ces tests révèlent que l’ISS n’est finalement pas si différente d’autres lieux clos sur Terre, comme les hôpitaux : les bactéries présentes dans ces espaces sont principalement apportées par les humains. Pour l’instant, les chercheurs ne savent pas dire si ces microbes pourraient compromette la santé des astronautes : « Cela dépend de l’état de santé de chaque individu et du fonctionnement de ces organismes dans l’environnement spatial », concluent les auteurs, ouvrant la voie à d’autres recherches.


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