Yuga Labs était surtout connu pour le Bored Ape Yacht Club, la collection de NFT à la popularité impressionnante et aux prix vertigineux. Mais Yuga Labs sera peut-être bientôt connu pour autre chose : pour avoir presque cassé la blockchain de l’Ethereum.
Dans la nuit du 30 avril au 1er mai 2022, Yuga Labs organisait la première mise en vente de ses Otherdeeds, les NFT représentant des bouts de terrain de son futur métaverse, nommé Otherside, dont le groupe est en train de préparer la sortie. Les 55 000 NFT, qui étaient mis en vente à 305 ApeCoin (soit 5 800 dollars), la crypto-monnaie du projet, se sont très rapidement vendus. Si rapidement que toute la blockchain Ethereum, sur laquelle le projet est basé, s’est retrouvée complètement bouchée.
Une blockchain « congestionnée »
Comment une blockchain, qui n’est pas réelle, peut-elle se retrouver bouchée ? Pour expliquer comment une telle chose a pu se produire, il faut comprendre le mécanisme qu’utilisent les chaines de blocs.
Toutes les blockchains partagent quelques caractéristiques : il s’agit, de manière grossière, d’un registre décentralisé, c’est-à-dire un carnet dans lequel toutes les opérations réalisées par les utilisateurs sont consignées. Tout le monde peut consulter les opérations, tout le monde peut y accéder, et pour s’assurer que personne n’inscrive de fausses informations dans ce carnet, il existe plusieurs solutions : le protocole de proof of work, ou celui de proof of stake dont nous parlons plus en détail dans cet article.
Ici, la question du protocole n’est pas centrale, mais elle a un impact sur ce qui nous intéresse : le nombre de transactions par seconde qu’une blockchain peut traiter. Ce nombre varie de manière très importante d’un réseau à l’autre — et il est vital pour le futur des blockchains.
Par exemple, la blockchain du bitcoin ne peut traiter que 7 transactions par seconde, car il faut 10 minutes pour valider un bloc avec son protocole de proof of work. Il s’agit d’un nombre extrêmement bas pour un réseau utilisé largement dans le monde, et qui a pour ambition de se développer. L’Ethereum fait face à un problème similaire : le réseau ne peut valider que jusqu’à 15 transactions par seconde. Seulement, le réseau Ethereum est de plus en plus saturé : de plus en plus de DAO (decentralized autonomous organizations, ou organisation autonome décentralisée, ndlr) sont construites sur sa blockchain. Et depuis le début de l’année 2021, les NFT sont venus encombrer encore un peu plus la blockchain.
Il faut rajouter à cela une autre particularité de l’Ethereum : les frais de gaz (ou gas fees en anglais). Il s’agit de frais dont doivent s’acquitter les utilisateurs de la blockchain, et dont une partie revient aux mineurs qui font tourner le réseau. Le prix de gas fees varie en fonction du taux d’utilisation de la blockchain : en heure de pointe, une opération coutera plus cher à réaliser que lorsque le réseau est moins utilisé.
Qu’est-ce que les NFT de Yuga Labs viennent faire là-dedans ?
La mise en vente des nouveaux NFT de Yuga Labs, le 30 avril, a tendu encore un peu plus le réseau. Les Otherdeeds étaient particulièrement attendus par les fans, qui se sont rués sur les 55 000 tokens sur le marché. Selon CoinTelegraph, ils ont tous été vendus quasiment instantanément pour près de 5 800 dollars / pièce. Le nombre de transactions enregistrées sur la blockchain à ce moment a atteint un pic (sans toutefois battre son record).
Les gaz fees qui se sont alors appliqués sur les transactions ont été particulièrement hauts : les utilisateurs parlent de frais de gaz entre 6 500 dollars et 14 000 dollars, à régler en plus du prix de leur NFT. Pendant les quelques minutes qu’a duré la vente, c’est plus de 123 millions de dollars qui ont été payés en gas fees. Des sommes hallucinantes qui montrent à quel point l’engouement pour l’univers créé par Yuga Labs est fort, mais surtout, à quel point le réseau Ethereum doit changer.
Les créateurs de l’Ethereum ont pensé le réseau pour accueillir, à terme, une vaste communauté et de nombreux projets. Le nombre de transactions que la blockchain va devoir traiter ne va faire qu’augmenter. Et pour pouvoir arriver à cela, il faut qu’Ethereum puisse traiter un plus grand nombre de transactions par seconde.
L’Ethereum doit devenir plus rapide
Des propositions ont déjà été mises en avant pour répondre à ces questions. La mise à jour London, en août 2021, était ainsi censée régler le problème de la fluctuation des gas fees en mettant en place des frais de base, calculés en fonction d’une grille fixe et précise afin d’éviter les coûts surprises. L’histoire de Larva Labs montre que la méthode ne suffit pas. L’autre piste mise en avant par les développeurs d’Ethereum est le passage à la proof of stake, un événement très attendu par la communauté et connu sur le nom de « The Merge ».
Seulement, il n’y a pas encore de date précise pour le changement, qui doit normalement se dérouler en 2022, et The Merge a déjà été retardé. Vitalik Butterin, l’un des co-fondateurs de l’Ethereum, estime que lorsque le changement vers la proof of stake sera fait, le réseau pourrait accepter 100 000 transactions à la seconde — mais au minimum 2 ans après le changement de protocole.
En attendant la transition vers la proof of stake et l’augmentation de capacité de l’Ethereum, d’autres en profitent. La blockchain Solana, qui accueille aussi des projets NFT et de DAO et se vante d’avoir des frais de gaz très faibles, peut d’ores et déjà enregistrer jusqu’à 1500 transactions par seconde.
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