Après avoir converti son salaire en BTC pendant un an, le parlementaire bruxellois Christophe De Beukelaer réalisera une ultime transaction symbolique à la fin du mois. Aucun lien avec les catastrophes en série qui sapent la réputation (et le cours) des actifs numériques, affirme-t-il, déterminé à concourir au succès de la « révolution crypto ».

« Je toucherai mon salaire de 2022 en bitcoin », avait annoncé à la surprise générale Christophe De Beukelaer en janvier dernier. Convaincu que son rôle politique lui incombe de sensibiliser la population aux changements sociétaux, ce jeune député bruxellois entendait marquer les esprits autour des cryptos. « On ne peut plus rester dans l’ignorance de ce nouveau monde ! C’est un peu comme s’accrocher à la bougie alors qu’apparaissent les ampoules électriques », insistait-il, bien prêt à dépasser le simple discours et proposer un acte concret. Une façon de démontrer sa confiance dans ces technologies émergentes, d’exhorter les décideurs à s’y intéresser sérieusement, et d’amener les citoyens à s’interroger sur la politique monétaire.

Douze mois plus tard, Christophe De Beukelaer reste l’unique mandataire connu en Europe pour percevoir l’entièreté de son salaire politique en bitcoin. Et au prochain jour de paie, dernier versement de 2022, le député centriste belge opèrera l’ultime conversion symbolique de sa rémunération en cryptomonnaies. « C’était prévu dès le départ, je posais pendant un an cet acte politique et pas financier. Pour défendre des idéaux. Comme certains se font pousser la moustache au mois de novembre pour lutter contre le cancer de la prostate. C’était un investissement personnel et pas spéculatif », nous explique-t-il.

Le pire moment pour investir dans le bitcoin

Le député crypto, comme on aimait depuis l’appeler sur les réseaux sociaux, ne pouvait pas choisir pire année pour se lancer dans une telle démonstration politique s’est retrouvé en plein hiver crypto. Le marché du bitcoin a essuyé plusieurs chocs majeurs, notamment en mai avec le naufrage de Terra ou en novembre dernier avec le scandale FTX. Rien que le BTC a perdu plus de la moitié de sa valeur. Ce qui a naturellement amputé le salaire politique de Christophe De Beukelaer.

« Sans regret ! Je reste totalement confiant et j’estime que mon acte politique en ressort d’autant plus pertinent. Ça renforce mes convictions d’en faire un point à l’agenda politique pour démontrer l’innovation technologique. Car malgré ces chocs, la technologie n’a pas failli. Toutes les dix minutes, un bloc a été créé sur Bitcoin. C’est resté le réseau informatique le plus solide au monde », insiste le parlementaire bruxellois.

Factuellement, difficile d’infirmer les dires du député De Beukelaer. Le fonctionnement de la blockchain publique Bitcoin s’est déroulé sans accroc : zéro redémarrage d’urgence, zéro piratage ou bug au niveau du protocole. L’émission de coins a strictement continué selon les règles définies par Satoshi Nakamoto… en 2008. Bitcoin est resté disponible pour n’importe qui dans le monde toute l’année, malgré les krachs, les scams et autres hacks en série.

Et cela, sans l’intervention d’une organisation centrale, d’un service technique, ou d’un dirigeant, en se basant seulement sur la fiabilité de la cryptographie et la prévisibilité mathématique.

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Le temps moyen de confirmation d’un bloc sur le réseau Bitcoin en 2022. // Source: Blockchain.com

Absence de débat public et ignorance des décideurs politiques

L’expérience que Christophe De Beukelaer a menée cette année n’aurait donc pas entamé son enthousiasme à l’égard des nouveaux outils comme le bitcoin. Ni les escroqueries gangrénant l’industrie du bitcoin ni ses propres pertes financières ne freineront son « évangélisation », selon lui. Car, dit-il, le soutien de l’écosystème crypto et des citoyens sensibles aux enjeux sociétaux a été à la hauteur de son acte.

« J’ai été amené à rencontrer des entrepreneurs, des acteurs crypto mais aussi des citoyens défenseurs des notions de liberté financière et de souveraineté économique. Cet écosystème m’a offert un véritable soutien. Je ne me suis pas senti seul », évoque le député De Beukelaer.

Il ne peut certainement pas en dire autant du monde politique, où il dénonce un manque de débat démocratique sur les enjeux liés à la crypto. Christophe De Beukelaer souligne pourtant que les technologies popularisées par les crypto-actifs pourraient proposer des solutions à des défis de notre société, comme le risque d’un système d’hypersurveillance qui pourrait se profiler avec un « euro numérique » de banque centrale.

« Je suis effaré du manque d’efforts consentis par des hommes et femmes politiques pour aller au-delà des préjugés. J’estime être allé jusqu’à la moelle de ce sujet du bitcoin. Or, tous les porte-drapeaux anti-crypto n’ont pas pris le temps de réellement étudier les enjeux politiques et sociétaux des technologies. Ils s’arrêtent vite à la spéculation », estime le parlementaire belge.

« L’adoption crypto prendra plus de temps que je ne le pensais »

L’ampleur des obstacles à surmonter ne décourage manifestement pas celui qui demeurera le premier (et le dernier ?) député en Europe rémunéré en bitcoin. Par contre, « j’ai pu prendre la mesure des développements encore nécessaires et l’adoption prendra plus de temps que je ne le pensais. La prise de conscience des législateurs, des dirigeants et des utilisateurs est lente », concède Christophe De Beukelaer.

Voilà même, aux yeux du parlementaire, une raison supplémentaire de poursuivre son « effort politique » en faveur des cryptos. Christophe De Beukelaer veut poursuivre sa « lutte pour une finance juste » en promouvant le secteur crypto et les solutions de finance décentralisée (DeFi).

« Nous voyons la crypto améliorer l’ancien système, l’assainir. On croit en la saine concurrence et en l’équilibrage des forces de chaque partie. Le système financier actuel manque de transparence, d’accessibilité, du partage d’informations », aime rappeler le député bruxellois.

Il est « urgentissime » de s’emparer d’outils comme le bitcoin, alertait Christophe De Beukelaer en janvier passé. Une bonne résolution que le député crypto nous recommande pour la nouvelle année.

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