Bételgeuse a momentanément perdu de son éclat, mais ce n’était finalement pas le signe annonciateur d’une supernova. D’ailleurs, quelles sont vraiment nos chances de voir un jour cette supergéante rouge exploser ? Elles sont assez minces.

La perte d’éclat de l’étoile Bételgeuse n’était finalement pas le signe annonciateur d’une supernova. Le 16 juin 2021, une équipe de scientifique a annoncé dans Nature que l’astre s’était retrouvé partiellement dissimulé par un nuage de poussière. Bételgeuse a dû éjecter une imposante bulle de gaz, qui s’est condensé et a temporairement obscurci l’hémisphère sud de l’étoile, entre novembre 2019 et mars 2020.

Bételgeuse est une supergéante rouge (c’est-à-dire une étoile plus froide que le Soleil), située dans la constellation d’Orion, à une distance complexe à déterminer — d’où les incertitudes sur l’âge exact de l’étoile. Ce type d’étoile passe par plusieurs phases d’évolution : à un stade avancé, les étoiles massives connaissent un effondrement de leur cœur de fer et une explosion qu’on appelle supernova. Lorsque Bételgeuse a connu une diminution de sa luminosité, la possibilité que l’étoile puisse exploser a été soupçonnée.

Finalement, cet épisode n’indiquait pas une explosion imminente. Cependant, les auteurs concluent avec prudence dans leur étude que l’éventualité que Bételgeuse explose un jour prochain ne peut être totalement écartée : « bien que le comportement actuel de perte de masse de Bételgeuse ne semble pas présager de sa disparition, il reste possible qu’elle explose sans préavis ».

Bételgeuse n’explosera « probablement pas de notre vivant »

Quelles sont vraiment les chances que cela advienne de notre vivant ? L’astrophysicien Miguel Montargès, principal auteur de l’étude et membre du Laboratoire d’Études spatiales et d’Instrumentation en Astrophysique (LESIA) à l’Observatoire de Paris, a apporté une réponse sur Twitter le 17 juin, à l’occasion d’une session de questions-réponses organisée par l’Observatoire européen austral (ESO). « Réponse courte : nous ne savons pas, mais probablement pas de notre vivant », indique le spécialiste, avant de détailler son explication.

« La phase de supergéante rouge est censée durer environ 100 000 ans. Cela signifie que la transition de la géante bleue vers la supergéante rouge doit avoir eu lieu depuis l’Homo habilis [ndlr : premier représentant du genre humain apparu il y a environ 2,5 millions d’années], pas avant », poursuit le scientifique. S’il parait peu probable que nous puissions assister à l’explosion de Bételgeuse, c’est parce que l’étoile semble être, d’après ce que nous connaissons d’elle, une supergéante relativement jeune.

Vue d'artiste de Bételgeuse. // Source : ESO/L. Calçada

Vue d'artiste de Bételgeuse.

Source : ESO/L. Calçada

VY Canis Majoris devrait exploser avant Bételgeuse

Comme l’explique Miguel Montargès dans la suite de son thread, Bételgeuse est visible à l’œil nu. À titre de comparaison, il cite l’exemple de VY Canis Majoris. Cette étoile hypergéante rouge, située dans la constellation du Grand Chien, est cinq fois plus éloignée et est plus lumineuse que Bételgeuse. Pourtant, on ne peut pas la voir à l’œil nu, car « elle est entourée par un épais cocon de poussière », mentionne l’astrophysicien.

Il se trouve que VY Canis Majoris a perdu 30 % de sa masse, tandis que Bételgeuse n’en a perdu que 2 %. « La meilleure hypothèse est que VY Canis Majoris va exploser plus tôt que Bételgeuse. Et Bételgeuse perdurera pendant des milliers, sinon des dizaines de milliers d’années », poursuit Miguel Montargès. L’expert apporte un peu de nuance en indiquant que ces hypothèses sont fondées sur les modèles existants et sur ce que nous savons des étoiles supergéantes rouges : « Si elle explose demain, je serai le premier à être content d’avoir tort, mais je ne serai pas totalement content de voir Bételgeuse partir. »

Même si elle n’est pas si unique en son genre, Bételgeuse est une étoile assez populaire, un fait qui tient principalement à la facilité de l’identifier dans le ciel. L’étoile forme « l’épaule gauche » de la constellation d’Orion, et son contraste avec sa voisine bleutée Rigel aide à bien la distinguer. Nombre d’astronomes professionnels et amateurs ont probablement appris à distinguer cette étoile en premier dans le ciel — d’où un petit pincement au cœur qui pourrait accompagner son éventuelle disparition.

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