Je fais partie de celles et ceux qui ont adoré Death Stranding. J’ai adoré la proposition à part d’Hideo Kojima. J’ai aimé le voyage, parfois pénible, qu’il cachait. J’y vois un chef-d’œuvre que, paradoxalement, je ne conseillerais à personne. Je comprends tout à fait qu’on puisse le détester, et c’est ce que cherche à produire Hideo Kojima : des expériences polarisantes qui ne font pas l’unanimité. Ce qui est tout à son honneur — si on met de côté son immense égo d’artiste.
Il n’empêche, en dépit de tout l’amour que je ressens pour Death Stranding, je n’ai jamais été partisan d’une suite. Quand Death Stranding 2: On the Beach a été officialisé, j’étais à la fois curieux et sceptique. J’avais quand même hâte de découvrir ce nouveau plongeon dans l’univers atypique d’Hideo Kojima. Dès les cinq premières minutes, tandis qu’on trouve son chemin en pleine montagne, Death Stranding 2: On the Beach m’a cueilli. Puis, cinq heures plus tard, l’enthousiasme n’a fait que s’estomper. L’extase a fini par se transformer en déception.
Points forts
- Visuellement époustouflant
- Partie action bien plus agréable
- La bande son parfaite
Points faibles
- Gros, gros sentiment de redite
- Kojima va parfois trop loin
- Ça manque de boss inoubliables
Visuellement, Death Stranding 2 est époustouflant
Je pense savoir pourquoi j’ai d’abord été saisi, voire bouche bée, par mes premiers périples dans Death Stranding 2: On the Beach. Visuellement, le nouveau projet d’Hideo Kojima est époustouflant. Une fois encore, il fait confiance au Decima Engine, moteur graphique de Guerrilla Games qui en met déjà plein la vue dans les jeux Horizon. Le studio Kojima Productions le maîtrise désormais à la perfection et, sur la PS5 Pro, Death Stranding 2: On the Beach est une véritable vitrine visuelle (y compris en mode performance, qui offre une fluidité irréprochable).
Death Stranding 2: On the Beach est une véritable vitrine visuelle
De la modélisation des personnages, incarnés par des célébrités, aux petits détails qui nourrissent constamment l’écran, on en prend vraiment plein les yeux. Le voyage en Australie proposé par Hideo Kojima s’appuie sur des panoramas ébouriffants. Quand la caméra s’éloigne pour mettre en avant des paysages à perte de vue, une véritable sensation de vertige nous anime. Et, à une échelle moindre, certains n’hésiteront peut-être pas à compter le nombre de cailloux qui s’écrasent sous les pas de Sam Porter — toujours incarné par Norman Reedus.

On peut tout autant s’extasier devant la réalisation d’Hideo Kojima, l’un des plus cinéastes des créateurs de jeux vidéo. Oui, les cinématiques ressemblent parfois à des clips où les personnages offrent leurs meilleures poses pour prouver. Mais ce serait réduire la science du cadre et de la mise en scène d’Hideo Kojima, qui pense chaque scène comme un moyen de valoriser sa sensibilité artistique et étale son immense passion pour le Septième art. L’intéressé avale des films à longueur de journée, et ça se ressent, pour le meilleur, dans Death Stranding 2: On the Beach. Il y a des moments vraiment inoubliables, permis autant par un lore tarabiscoté que par une forme d’une richesse rare.
Death Stranding 2: On the Beach est un jeu qui se regarde, ou plutôt, qui s’admire. C’est aussi une expérience qui s’écoute. Quand Dollman, le nouveau compagnon de route — très mignon et rigolo avec ses animations en stop-motion, ne jacasse pas, le périple s’anime au rythme d’une bande son idéale. On y retrouve notamment Woodkid, artiste français ô combien talentueux. Là encore, Hideo Kojima utilise son art pour mettre en avant un autre art. C’est brillant, et parachève un habillage d’une prestance incroyable.

Kojima nous refait le même jeu
« Nous avons un problème. Je vais être très honnête, nous avons fait des tests avec des joueurs et les résultats sont trop positifs. Ils ont trop aimé. Cela veut dire que quelque chose ne va pas. Nous devons changer », aurait confié Hideo Kojima à Woodkid en plein milieu du développement. Le créateur japonais aurait donc procédé à des changements pour que Death Stranding 2: On the Beach plaise moins. En réalité, il n’a pas modifié grand-chose par rapport au premier Death Stranding, reprenant globalement une structure similaire. De l’objectif principal (reconnecter l’Australie plutôt que les États-Unis en faisant des livraisons) aux rebondissements, en passant par la construction de l’intrigue, il y a un sentiment de déjà-joué qui finit par perdurer.
Pire, on se rend compte que Death Stranding 2: On the Beach tombe parfois dans la caricature, le grand-guignolesque voire la provocation (les références criardes à Metal Gear Solid, façon règlement de comptes). Ainsi, Hideo Kojima multiplie les personnages, les notions lunaires (il y en a quasiment une par cinématique…) et les arcs. Le tout additionné donne une narration soustraite aux élucubrations d’un génie-escroc — ou d’un escroc-génie. En résulte une équation à mille inconnus qui va sans nul doute diviser, et certainement pas pour mieux régner. Il a des idéaux, Kojima. Mais il lui arrive de tomber bien bas. Heureusement, il excelle, comme à son habitude, dans l’écriture des personnages, qu’ils soient bons ou mauvais. Ses freaks et ses parias savent toucher et, mieux, sont parfaitement incarnés par le casting (le faux Snake en tête). Dommage de constater qu’ils soient sous-exploités.

La force de Death Stranding 2: On the Beach reste quand on arrive malgré tout à s’immerger dans un monde d’une complexité immense. On ne comprend pas toujours tout (les membres de Reddit se feront un plaisir de tout analyser), mais il demeure cette envie d’avancer coûte que coûte, poussé par ce colis d’après à livrer. Par l’infiltration de cette base qui tournera sans doute très mal. Il y a une carotte dans le brouillard très épais concocté par Hideo Kojima. Sauf qu’après le générique de fin, on se demande si on ne vient pas de s’en prendre une belle.

Plus d’action, c’est un petit oui
Il faut quand même reconnaître une évolution positive dans cette suite : la partie action est beaucoup plus agréable. Hideo Kojima a puisé dans la saga Metal Gear — qu’il a créée puis lâchée après sa séparation d’avec Konami. Death Stranding 2: On The Beach est d’ailleurs tout ce que n’est pas Metal Gear Solid V: The Phantom Pain, jeu malade et rafistolé au niveau de la narration mais qui cache la simulation d’infiltration ultime. Hideo Kojima s’en inspire, même si Sam n’est pas Snake non plus (il lui est impossible de ramper, par exemple).
Quand on doit passer par une zone infestée d’ennemis, on a le choix : contourner au risque de faire un immense détour ; s’infiltrer ; ou tout nettoyer. Plus souple et un tantinet réaliste, le gameplay de Death Stranding 2: On The Beach offre de belles sensations. Mais on perçoit quand même un souci d’équilibrage. D’un côté, les ennemis sont capables de nous voir de très loin, de l’autre, Sam peut vite devenir une machine de guerre avec un équipement quasi illimité. Par conséquent, s’infiltrer est pénible — et si peu récompensé –, quand foncer dans la mêlée est d’une simplicité enfantine. Et comme se faire repérer ne rameutera jamais la foule, il ne sert à rien de s’ajouter des contraintes. Vous aurez même tout le loisir d’équiper un véhicule de tourelles automatiques pour faire le ménage à votre place.

On espérait par ailleurs mieux des quelques boss. Impressionnants visuellement, à l’instar du reste du jeu, ils déçoivent par le peu d’opposition qu’ils offrent et leur faible nombre. Hideo Kojima, de nature inspiré et imaginatif, va jusqu’à en recycler plusieurs sur les dizaines d’heures nécessaires pour boucler l’aventure.
Bref, les phases d’action, bien plus présentes, ne sont là que pour respirer — et s’amuser ? — entre deux livraisons au sein d’environnement vertigineux. Comme dans le précédent, Death Stranding 2: On the Beach joue sur la physique, la condition du héros et les contraintes de poids pour rendre les voyages un minimum interactifs (lire : presser la bonne gâchette quand on perd l’équilibre). On bénéficie quand même de toute une palanquée d’accessoires pour se faciliter — beaucoup trop — la vie, sachant qu’on en débloquera davantage en faisant les tâches annexes (qui cachent aussi des missions plus exotiques). Le feeling reste le même, donnant l’impression de jouer à une version 1.5 à peine chahutée par les quelques catastrophes de terrain et autres événements climatiques.

Ce qu’on écrivait pour Death Stranding se retrouve peu ou prou ici : « on passe l’essentiel de son temps à parcourir, seul, de vastes territoires jusqu’à atteindre sa prochaine destination. Toute la subtilité du gameplay se niche dans le réalisme des déplacements. Ils sont régis par les conditions extérieures (dénivelé, qualité du terrain, météo…), le trajet choisi, le poids des colis et de l’équipement portés, ainsi que la gestion de la jauge d’endurance de Sam. En somme, il ne s’agit pas de foncer tête baissée, mais d’anticiper les problèmes. Il est nécessaire de bouger avec équilibre et prudence, sous peine de tomber et de ruiner sa marchandise. À ce titre, le moteur physique est phénoménal. On ressent l’importance de chacun des pas de Sam, dans le sens où ils peuvent le faire réussir ou faillir en fonction de la vitesse d’exécution. » Et, bien sûr, n’oubliez pas de profiter des constructions des autres, grâce au multijoueur asynchrone. Nous voilà donc passés d’une terre inconnue à un terrain connu. En plus simple.
Le verdict

Death Stranding 2: On the Beach
Voir la ficheOn a aimé
- Visuellement époustouflant
- Partie action bien plus agréable
- La bande son parfaite
On a moins aimé
- Gros, gros sentiment de redite
- Kojima va parfois trop loin
- Ça manque de boss inoubliables
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