Heartstopper est un cocon d’amour. Mais, c’est aussi une série dédiée à des sujets importants, qui sont merveilleusement bien représentés. On en parle ?

Heartstopper est sans aucun doute l’une des séries ados les plus marquantes de l’histoire du petit écran. Notamment, car elle constitue un immense bond en avant en matière de représentations. À l’âge adulte, elle reste toujours valide sur nombre de sujets qui peuvent nous parler très profondément — et on se dit aussi très facilement que l’on aurait aimé la voir durant l’adolescence. Les ados, quant à eux, peuvent y trouver une bonne fresque de leurs sentiments, doutes, quêtes.

Alors que la saison 2 toujours aussi réussie (et fidèle aux romans graphiques) est enfin sur Netflix, depuis le 3 août 2023, voici 6 représentations pour lesquelles Heartstopper excellence tout particulièrement, toujours entre douceur et gravité dans son approche.

Il est recommandé d’avoir vu la saison 2 de Heartstopper avant de lire la suite de l’article.

L’amour gay, tout simplement

Les romances gay ont rarement été bien traitées dans les séries TV. Heartstopper a marqué les esprits, dès sa saison 1, en réparant ce manque. Dans cette série Netflix, l’histoire d’amour entre Nick et Charlie échappe à plusieurs malédictions stéréotypées dans la fiction. Notamment parce que, malgré les (nombreuses) embuches, le couple a le droit au bonheur et la discrimination du monde extérieur ne les sépare pas.

Heartstopper, la saison 2 à Paris. // Source : Netflix
Heartstopper, la saison 2 à Paris. // Source : Netflix

Heartstopper est enfin une fresque réaliste sur ces sujets de l’orientation sexuelle et amoureuse. Elle parvient à développer une exploration détaillée, sans biais hétéronormés, du vécu LGBTQIA+ à cet âge — et des violences homophobes, lesbophobes, biphobes, transphobes, dont celles intériorisées –, sans que cela constitue l’entièreté de l’identité des personnages concernés. Leurs passions, problèmes, traits de personnalité se combinent alors naturellement à l’orientation sexuelle et amoureuse. Comme on le disait dans notre critique de la saison 1, Heartstopper rend aux ados gays et introvertis la coolitude qu’ils méritent. Et ce, avec une douceur dont on se délecte.

La bisexualité de Nick

Si Charlie et Nick forment un couple gay littéralement parfait, Heartstopper est aussi une série sur la bisexualité. Celle de Nick.

La bisexualité souffre d’une difficulté majeure dans sa représentation, en particulier dans la vision que le public peut en avoir, en fonction du couple montré. Comment représenter une orientation, un sentiment, une attirance qui, par définition, n’est pas binaire ? C’est bien de ce problème dont souffrent les personnes bisexuelles (et pansexuelles) au quotidien, une quête d’identité alourdie par des regards qui ne comprennent pas totalement et cherchent absolument d’autres cases, jusqu’à l’épuisement.

Heartstopper a réussi son pari sur cette représentation. D’abord, en montrant comment Nick a réalisé qu’il pouvait être attiré et aimer tout à la fois des garçons et des filles, en regardant un film par exemple, ou en repensant à un bisou passé. Ensuite, en mettant sans cesse en scène la difficulté de Nick à expliquer qu’il est bi. C’est même au cœur de son coming out. Au début lorsqu’il l’annonce à sa mère, qui lui rétorque (avec bienveillance dans son cas) qu’il ne doit pas se sentir obligé de dire qu’il aime aussi les filles — alors que c’était d’emblée sa vérité. Puis, durant la saison 2, le phénomène est accru : il ne se passe presque pas un épisode sans que Nick doive rappeler qu’« en fait, je suis bi ». Même s’il le précise sur son post Instragram, publiquement donc, il doit de nouveau le redire sans cesse par la suite.

Le cocon de l’amitié

Regarder Heartstopper, c’est aussi se dire que l’on mérite des amitiés aussi belles que celles intégrées à cette série. Le groupe formé par Charlie, Nick, Elle, Tao, Isaac, Darcy, Tara est l’incarnation même de la safe place. Un cocon de compréhension, d’écoute et d’amour, avec des liens que même de brefs conflits ne parviennent pas à briser. La façon dont Tao parvient à prendre la défense, sans cesse, de Charlie ; le fait qu’il se sente affecté par ce que ce dernier a subi durant son harcèlement scolaire : voilà des images d’une amitié puissamment véritable. De même, Isaac parvient à lire éternellement en toute circonstance sans être vilipendé pour cela, tout comme l’introversion est un trait de personnalité tout à fait normalisé au sein de ce groupe.

On le ressent aussi très fortement lors du voyage à Paris, par exemple, durant la saison 2. Imogen, alors avec Ben et ses amis, demande à notre dream team adorée si elle peut les rejoindre. On la sent enjouée, et apaisée, une fois qu’elle a fait cette démarche. On la comprend.

Nos coeurs fondent déjà // Source : Netflix
Nos coeurs fondent. // Source : Netflix

Heartstopper rappelle combien les choix amicaux sont aussi déterminants que tout le reste. La série invite même à relever la barre de l’exigence : une amitié saine et entière, ou rien du tout. À l’âge adulte, cela fait partie des raisons pour lesquelles on se dit qu’on aurait aimé avoir Heartstopper au collège/lycée : une éducation à prendre soin de soi en s’entourant de personnes qui ne se contentent pas de nous tolérer, mais qui nous acceptent pleinement.

Le harcèlement scolaire de Charlie

Heartstopper n’a jamais directement montré à l’écran le harcèlement scolaire vécu par Charlie lors de son propre coming out, bien que ce soit souvent évoqué. C’est d’une autre façon que la série parvient à en parler avec beaucoup d’acuité : les effets au long terme. Ils se perçoivent très régulièrement sur le manque de confiance en lui de Charlie, ou sur certains réflexes qui relèvent de l’intériorisation de violences.

Mais, la saison 2 se distingue encore davantage, lorsque Nick, son amoureux, commence à s’intéresser à la question, à creuser, dès lors que les troubles alimentaires arrivent dans la série. Cette interrogation donne lieu à une fin puissante en termes de santé mentale, et qui procure un écho d’une rare force aux personnes ayant subi un tel épisode dans leur jeunesse.

Charlie dans la saison 2 de Heartstopper.  // Source : Netflix
Charlie dans la saison 2 de Heartstopper. // Source : Netflix

C’est là une conséquence rarement évoquée du harcèlement scolaire : le traumatisme durable, profondément inscrit, jusqu’à provoquer divers troubles physiques et mentaux — parfois (souvent) jusqu’à l’âge adulte. La démarche de Nick est par ailleurs très saine à montrer : il est rare que les proches saisissent l’ampleur de ce traumatisme et cherchent à en savoir davantage. Espérons que le visionnage de la série génère ce genre de prises de conscience dans les entourages concernés.

Les troubles alimentaires

Très présents dans les romans graphiques d’Alice Oseman, les troubles alimentaires de Charlie ont fait leur arrivée dans la saison 2. La réaction de Nick est très importante : il remarque d’abord le trouble par de petits détails, avant de lui-même chercher à se renseigner pour mieux comprendre. Puis il ne « force » jamais Charlie à se nourrir, il accompagne ses incitations à manger de traits d’humour et d’intentions affectueuses.

Heartstopper se penche donc sur plusieurs aspects du trouble : ses causes possibles, ses indices, les réactions des proches.

L’asexualité/aromantisme d’Isaac

Dans sa diversité de représentations, Heartstopper aborde l’homosexualité de Charlie, la bisexualité de Nick, la transidentité de Elle, ou encore le couple de lesbiennes formé par Tara et Darcy. La saison 2 s’est mise à explorer, via Isaac, l’asexualité et l’aromantisme. Ce, avec beaucoup de subtilité, car en instaurant une véritable progression.

À plusieurs reprises, la mise en scène installe Isaac au cœur d’un groupe constitué de couples. La caméra semble appuyer une forme d’isolement… avant que tout cela se matérialise plus concrètement.

Conclusion : il faut aimer la vie comme Isaac aime les librairies // Source : Netflix
Conclusion : il faut aimer la vie comme Isaac aime les librairies. // Source : Netflix

Le sujet reste toutefois encore peu approfondi, puisqu’Isaac est au début de son chemin. Mais, on peut faire confiance à Alice Oseman, la créatrice de la saga, pour développer la question : son roman Loveless y est en grande partie dédié.

Source : Montage Numerama

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