La Hadopi s'est intéressée à l'idée selon laquelle les pirates sont ceux qui consommeraient également le plus d'œuvres culturelles en toute légalité. Dans ses conclusions, l'étude note que les pirates ne sont pas ceux qui dépensent le plus. Mais ils ne sont pas non plus ceux qui dépensent le moins.

Y a-t-il un lien entre les pratiques illicites et les dépenses culturelles ? C'est à cette question qu'a cherché à répondre la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), en confiant à son Département Recherche, Études et Veille (DREV) le soin "d'analyser l’articulation entre les pratiques de consommation sur Internet et les dépenses culturelles en général".

Derrière cette question, il s'agit surtout de vérifier l'idée selon laquelle les pirates sont ceux qui consommeraient également le plus d'œuvres culturelles en toute légalité. Réponse de la Haute Autorité ? Non, il n'y a pas de corrélation évidente entre le montant du panier et la nature de la consommation.

"Le coefficient observé pour la nature licite / illicite de la consommation ne permet pas de considérer que ce paramètre soit corrélé au montant de la dépense", affirme la Hadopi dans son étude publiée ce jeudi. Et l'autorité publique d'enfoncer le clou : "il n’y a pas de lien de causalité entre la consommation illicite et les dépenses culturelles".

L'étude souligne plutôt que ce qui aura réellement une influence dans la dépense culturelle, c'est le rapport qu'entretient le consommateur à ce domaine. Si sa fréquence de consommation est déjà élevée et s'il fait montre d'un appétit particulier, il aura tendance à dépenser davantage. Ces deux facteurs pèsent plus lourd que tous les autres.

Mais si l'enquête ne remarque pas de corrélation ni de causalité force est de constater que l'étude dit, en filigrane, que les pirates ne sont pas les derniers à acheter légalement des œuvres, même si d'autres facteurs pèsent plus lourdement. Ce qui est déjà en soi remarquable, bien que d'autres études, notamment publiées par la Hadopi, ont souligné le contraire (les pirates dépensent le plus).

Dans l'enquête conduite par Ifop pour le compte de la Hadopi, 2101 internautes Français âgés de 15 ans et plus ont été invités à détailler leurs acquisitions (gratuites et payantes) d’œuvres culturelles (physiques et dématérialisées) sur une période d'un mois

Les précédentes observations de la Hadopi

Par le passé, Il est pourtant arrivé à la Haute Autorité de constater, sous une méthodologie et un prestataire différents, que "les internautes déclarant un usage illicite ont une dépense (de biens culturels) légèrement supérieure à la moyenne", et qu'ils "sont moins nombreux que la moyenne à déclarer 'aucune dépense'", dans une étude publiée au début de l'année 2011.

Deux ans plus tard, rebelote. Une nouvelle étude toujours publiée par la Hadopi a noté que les pirates (ou ceux qui se reconnaissent comme tels) dépensent autant d'argent tous les mois pour la culture sur Internet que ceux qui ne déclarent que des usages licites. Ces études se concentraient sur le panier des consommateurs et n'établissaient aucune corrélation.

Déjà de nombreuses études sur le sujet

Le fait de savoir si les pirates sont aussi ceux qui consomment  le plus d'œuvres culturelles en toute légalité a donné lieu à de nombreux travaux, pas seulement lancés sous l'impulsion de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet. En la matière, les travaux ne manquent pas pour établir un lien entre piratage et consommation culturelle.

Citons par exemple le travail conduit en 2008 à la faculté de Rennes, qui a été poursuivi en 2010 en partenariat avec le laboratoire M@rsoin. Des constats similaires ont eu lieu au Canada, au Royaume-Uni, en Allemagne et aux USA. Attention, toutefois : toutes ces études, qu'elles proviennent de la Hadopi ou non, n'ont pas utilisé la même méthodologie. Gare aux comparaisons précipitées.


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