Depuis plus de 10 ans, Mark Zuckerberg, le créateur de Facebook, répète sans cesse que l’humanité portera un jour des lunettes connectées. Meta, son entreprise, a déjà sorti deux paires : les Ray-Ban Stories et les Meta Ray-Ban. La première n’était pas vraiment convaincante, la deuxième rencontre un succès planétaire et est, avouons-le, excellente. Toutes deux ont néanmoins un défaut important : elles ne servent qu’à prendre des photos/vidéos et à écouter de la musique, elles ne possèdent pas d’écrans.
Avec Orion, un prototype de lunettes présenté en octobre 2024, Meta a pour la première fois quelque chose qui ressemble à ce qu’il présente comme le remplaçant du smartphone. Le produit est encore loin d’être prêt (on estime son coût de production à plus de 10 000 dollars par unité, pour une qualité encore perfectible), mais est très clairement une des démonstrations les plus convaincantes de l’informatique du futur. Quand on le porte, des applications transparentes apparaissent au milieu de sa vision.
Un Apple Vision Pro intégré à des lunettes de vue : la prouesse des Meta Orion
Sur le papier, l’expérience proposée par Meta avec les lunettes Orion ressemble beaucoup à celle d’Apple avec son casque Vision Pro.
Des icônes ronds apparaissent au milieu du vrai monde, on peut les agrandir en les regardant et les ouvrir en tapotant son pouce et son index. Ces applications prennent ensuite la forme de fenêtres flottantes que l’on peut déplacer dans le monde réel. Seule différence : Meta limite pour l’instant le multitâche à trois fenêtres côte-à-côte, quand Apple permet une liberté totale.

Si Meta et Apple partagent une vision commune en matière « d’informatique spatiale », les deux constructeurs ont une approche très différente au niveau du format.
Là où Apple fait le pari de la qualité et de l’immersion avec un imposant casque qui coupe du vrai monde, mais qui réplique la vision grâce à des caméras, Meta mise sur des lunettes beaucoup plus discrètes avec des verres transparents. L’exploit d’Orion est là : on voit le monde avec ses yeux, pas au travers d’écrans. Les applications virtuelles qui s’invitent au milieu du regard le font grâce à des micro-projecteurs holographiques MicroLED qui ciblent directement l’œil, tout en laissant la lumière passer au travers (les applications sont transparentes). Le verre, en carbure de silicium, coûte une fortune à produire, mais permet ce mélange entre réel et virtuel.

Autre avantage d’Orion par rapport aux casques comme l’Apple Vision Pro ou le Meta Quest : le champ de vision. Si Apple offre, paradoxalement, une image plus large (100 degrés versus 70 degrés), Meta a l’avantage de ne pas enfermer l’utilisateur dans un casque. Les applications sont cantonnées au milieu de la vision (il y a suffisamment de place pour en afficher trois simultanément), mais la vue s’étend sur les côtés. On se sent beaucoup moins enfermé : Orion augmente la vision sans donner l’impression de porter un produit sur la tête. Le champ de vision du prototype de Meta est aussi nettement supérieur à celui des Snap Spectacles, son principal concurrent.
Après 30 minutes avec Orion, notre constat est sans appel : aucun produit n’est aussi abouti aujourd’hui. Le format des lunettes (98 grammes), malgré des bordures épaisses, règle aussi tous les problèmes de confort des casques de réalité mixte : on pourrait parfaitement porter Orion du matin au soir, à la maison, dans la rue et au travail. Reste pour Meta à améliorer la batterie (2-3 heures aujourd’hui), à affiner le design et à optimiser Orion pour les différentes vues. Il est aujourd’hui impossible de greffer des verres correcteurs à Orion. Autre « problème » : l’ordinateur qui permet aux lunettes d’avoir une interface et de lancer des applications est déporté dans un boîtier sans-fil. Les lunettes seules ne sont que des lunettes.

Ne vous faites pas avoir : Orion n’est qu’un prototype
Avec Orion, Meta a-t-il son « moment iPhone », comme le pronostiquent plusieurs suiveurs de l’entreprise ?
Il nous est difficile de partager cet enthousiasme pour une raison simple : Orion n’est qu’un prototype. Meta n’imagine pas commercialiser Orion, ou ses successeurs pour le grand public, avant 2030. Apple, Samsung et Google, dans leurs laboratoires fermés à la presse, n’ont-ils pas des produits aussi avancés ? Le plus impressionnant ici est l’étonnante ouverture de l’entreprise de Mark Zuckerberg, qui prend le risque de montrer un produit incomplet pour partager sa vision. Il y a aussi la question du prix : un prototype à 10 000 dollars (un tarif non confirmé par l’entreprise) n’est malheureusement pas représentatif de l’état d’une technologie.

Prenons un exemple concret : contrairement à ce que les visuels partagés par Meta laissent penser, tout est flou dans Orion. Le champ de vision est large, les couleurs sont bonnes, la luminosité des images virtuelles est correcte, mais on a l’impression de voir des applications sans mise au point. Meta pronostique un produit final avec une meilleure résolution (34 pixels par degré, vs. 13 pixels aujourd’hui) mais la marque est très loin de ce qu’elle propose avec ses propres casques Meta Quest. Ce constat renforce le contraste entre l’Apple Vision Pro et Orion : l’un mise tout sur la qualité, l’autre sur le confort. On se demande d’ailleurs ce que donnerait Orion en extérieur ou dans une salle avec un mauvais éclairage, même si la qualité de projection était bluffante pendant notre démo.
Autre constat : les lunettes de Meta ne sont pas encore stables. Pendant notre démonstration de 30 minutes, les représentants de la marque ont redémarré à plusieurs reprises les lunettes, qui refusaient de lancer une application. Orion est un produit phénoménal, mais ne sert pour l’instant qu’à illustrer une vision. Celle de Mark Zuckerberg.
Un bracelet, le suivi du regard et de l’IA : Meta a plusieurs bonnes idées
Quand on porte Orion pour la première fois, on doit configurer le suivi du regard. Meta reprend ici l’interface de visionOS : il faut suivre un point blanc avec ses yeux pour étalonner le casque. Le suivi du regard fonctionne ensuite plutôt correctement : l’élément regardé s’agrandit et peut être sélectionné avec un tapotement des doigts. Il y a eu quelques approximations dans notre test, mais il est probable que le problème disparaisse avec l’entraînement.
En revanche, Meta innove sur un aspect intéressant : le contrôle gestuel. La marque fait un pari inédit dans l’industrie : l’utilisateur d’Orion doit porter un bracelet qui lit les signaux nerveux du poignet. L’intérêt est double pour l’utilisateur :
- Il peut sélectionner des choses avec les mains dans le dos ou dans les poches.
- Chaque interaction avec le virtuel renvoie une vibration, ce qui amplifie l’impression de mélange entre le réel et le virtuel. Ce second aspect a particulièrement retenu notre attention : l’immersion est excellente.

Le contrôle gestuel s’avère particulièrement impressionnant sur Orion grâce à ce petit bracelet aux multiples capacités. Le seul geste difficile à appréhender est celui des glissements dans les applications, qui nécessitent de fermer son poing et de bouger son pouce. Il est compliqué d’imaginer que Meta le conservera d’ici la version finale.
Parmi les usages qui nous ont les plus impressionnés :
- Grâce à une IA générative, Orion peut légender des objets du vrai monde. On peut afficher sur des ingrédients leurs noms et leurs calories, puis faire apparaître une recette sur la table. On peut imaginer que nos lunettes pourront un jour traduire des panneaux ou des journaux en temps réel en superposant des informations en forme d’hologrammes.
- Meta permet de jouer sur Orion, en exploitant la taille réelle d’une pièce. Cette proposition est très différente des jeux VR classiques qui isolent du monde. Ici, des jeux apparaissent au milieu du regard.
Bref, les Meta Orion sont des lunettes au potentiel monstre. Reste à savoir quand est-ce que le grand public pourra acheter un produit similaire… et à quel prix ? En attendant, les rumeurs annoncent des Meta Ray-Ban avec un petit écran pour les notifications fin 2025.
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