La NASA a annoncé que sept premiers pays ont rejoint les accords Artémis sur l’exploration spatiale. Mais c’est surtout l’absence des grandes puissances qui a été remarquée.

Les accords Artémis ont désormais une force juridique à l’international. Le 13 octobre, l’agence spatiale américaine a mis en scène la signature de ce nouveau texte, présenté ce printemps, qui entend organiser l’exploration de l’espace profond, c’est-à-dire au-delà de l’orbite terrestre — comme la Lune ou Mars.Et à cette occasion, les dirigeants de sept agences spatiales nationales ont rejoint la Nasa.

Outre les États-Unis, les pays suivants se sont engagés à respecter les principes contenus dans les accords Artémis : l’Australie, le Canada, les Émirats arabes unis, l’Italie, le Japon, le Luxembourg et le Royaume-Uni. Ce n’est pas une liste arrêtée : dans un communiqué, la Nasa s’attend à ce que d’autres États — notamment les membres de l’Agence spatiale européenne — s’emparent de ces accords.

L’objectif des accords Artémis est de « renforcer et mettre en œuvre le traité de 1967 sur les principes régissant  les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique », explique la Nasa. En somme, il s’agit de prolonger et de préciser le traité de l’espace de 1967, qui est signé et ratifié par la grande majorité des pays, dont les principales puissances spatiales.

Les accords Artémis portent sur dix points : l’exploration pacifique, le secours d’urgence, la transparence des activités, l’interopérabilité des systèmes, la mise à disposition des données scientifiques, l’immatriculation des objets spatiaux, la gestion des débris spatiaux, l’utilisation des ressources spatiales, la protection du patrimoine spatial et la déconfliction des activités.

De nombreux éléments du logo du programme Artémis font écho à celui d'Apollo. // Source : Nasa

De nombreux éléments du logo du programme Artémis font écho à celui d'Apollo.

Source : Nasa

Les grandes puissances spatiales absentes

Si la liste des signataires inclut les États-Unis, qui est la principale puissance spatiale, mais aussi, le Japon et le Royaume-Uni, deux autres nationales spatiales significatives, elle se démarque par l’absence des autres grandes nations qui comptent dans ce secteur. Ni la Russie ni la Chine ne sont signataires, pas plus que l’Inde. On ne trouve pas non plus la France, qui est aussi une puissance qui compte.

Contacté à ce sujet par Numerama pour savoir si l’Hexagone prévoit de signer ces accords, et le cas échéant à quelle date, le Centre national d’études spatiales n’a pas été en mesure de nous répondre au moment de la publication de cet article.

L’absence de l’Inde, la Chine et la Russie est notable, car ces pays ont soit déjà une capacité d’alunissage, soit une capacité de conduire des vols habités, soit les deux. La Chine, par exemple, a déjà réussi un alunissage et à opérer sur place un astromobile. Quant à l’Inde, elle n’est pas loin de réussir l’alunissage : elle avait échoué avec Chandrayaan-2. Chandrayaan-3 sera son prochain essai.

On peut toutefois s’attendre à ce que dans les mois et les années à venir, des pays comme la Russie — avec qui les États-Unis coopèrent à travers la Station spatiale internationale –, l’Inde, la France et les autres pays de l’Agence spatiale européenne finissent par rejoindre les accords Artémis. Lors d’un congrès, leurs agences et quelques autres avaient partagé la scène avec la Nasa pour évoquer le futur de l’exploration lunaire.

Le cas de la Chine est beaucoup plus compliqué. Lors de ce même congrès, le patron de la Nasa avait rappelé que « la loi nous interdit de travailler avec la Chine », rendant difficile la perspective de voir Pékin suivre la proposition de Washington. La rivalité stratégique de plus en plus prononcée entre les deux superpuissances sur Terre parait en outre éloigner de plus en plus tout rapprochement dans l’espace.

Des accords Artémis critiqués

L’existence des accords Artémis fait toutefois l’objet de critiques, même si le texte traite aussi de problématiques bien réelles et entend éviter que l’espace ne soit un lieu sans foi ni loi où chacun ferait ce qui lui chante, avec des risques évidents de dérives. Mais les accords Artémis contiennent aussi une disposition à la portée incertaine, autorisant la mise en place de « zones de sécurité ».

Or, cela pourrait déboucher sur des appropriations de vastes zones pour en collecter les ressources. Du fait de l’avance américaine en matière d’exploration spatiale — aussi bien dans le secteur public que privé –, ces accords sont aussi perçus comme un moyen pour les USA de sécuriser cet avantage en poussant les autres pays à adopter sa lecture juridique via cet accord bilatéral — qui n’est pas un traité international de l’ONU, comme le traité de l’espace.

Cela explique sans doute pour partie l’absence, justement, des autres grandes puissances spatiales, pour le moment en tout cas. Elles pourraient ne pas vouloir se lier juridiquement à l’interprétation américaine de ce qu’il faut ou ne pas faire dans l’espace. D’ailleurs, le patron du programme spatial russe a critiqué les plans trop américano-américains de la part de la Nasa sur la Lune.

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