La Lune abrite une forme de rouille, ont montré les données récoltées par Chandrayaan-1. La présence d’hématite a beaucoup surpris les scientifiques : comment ce minerai qui a besoin d’eau et d’oxygène est-il arrivé là ?

Une forme de rouille découverte sur la Lune a laissé les scientifiques perplexes. Dans une étude publiée le 2 septembre 2020 au sein de la revue Science Advances, ils rapportent la présence d’hématite, un minerai de fer qui a normalement besoin d’eau et d’oxygène pour exister.

« L’hématite (Fe2O3) est un produit d’oxydation commun sur la Terre, Mars et certains astéroïdes », soulignent les auteurs. Sa présence sur la Lune est bien plus étonnante. Plus largement, « les détections sans ambiguïté de minéraux ferriques formés dans des conditions très réductrices sur la Lune sont restées insaisissables », ajoutent-ils. Ils soupçonnent que la présence d’hématite pourrait être expliquée par la Terre.

Carte de la face visible de la Lune. Le bleu représente la présence d'eau détectée sur la Lune. // Source : ISRO/NASA/JPL-Caltech/Brown Univ./USGS (photo recadrée)

Carte de la face visible de la Lune. Le bleu représente la présence d'eau détectée sur la Lune.

Source : ISRO/NASA/JPL-Caltech/Brown Univ./USGS (photo recadrée)

L’hématite est plus répandue sur la face visible

Ce minéral a été détecté sur la Lune grâce aux données de Chandrayaan-1, une sonde de l’Organisation indienne pour la recherche spatiale (ISRO), qui s’est placée en orbite autour de l’astre en 2008. Les scientifiques ont malheureusement perdu contact avec le vaisseau 9 mois plus tard, mais la mission n’a pas été vaine : elle a permis de collecter de précieuses données, dont la présence d’eau glacée. À son bord, la sonde embarquait l’instrument baptisé Moon Mineralogy Mapper, ou M3, un spectromètre fourni par l’Agence spatiale américaine (Nasa). La carte ci-dessus est issue des données de cet instrument. M3 a pu repérer les zones où la lumière était réfléchie en surface sur la Lune, et voir que les pôles de l’astre avaient une composition particulière.

En étudiant ces pôles lunaires observés par la sonde, les chercheurs ont été surpris de trouver de l’hématite, plus répandue sur la face visible que sur la face cachée de la Lune. On sait que l’hématite se forme quand le fer est exposé à l’oxygène et l’eau. Sans eau liquide ni oxygène sur la Lune, comment cette matière a-t-elle pu se retrouver là ? « Nous proposons un modèle où l’oxygène du vent terrestre, l’eau dans le régolithe lunaire et la chaleur de l’impact de la poussière interplanétaire créent un environnement pour que le régolithe s’oxyde et forme de l’hématite », proposent les chercheurs.

La source de l’oxygène : notre planète

Autrement dit, la source de l’oxygène sur la Lune ne serait autre que notre planète, et tout particulièrement son champ magnétique (qui nous protège du vent solaire). Ceci expliquerait pourquoi la formation d’hématite est plus prononcée sur la face visible de la Lune. L’hydrogène transporté par le vent solaire devrait empêcher la formation de l’hématite, mais la magnétosphère terrestre (la région d’influence de son champ magnétique) bloque le vent solaire. En phase de pleine Lune, lorsque l’astre est de l’autre côté de la Terre par rapport au Soleil, l’hématite a de bonnes chances de pouvoir se former. Enfin, les poussières qui bombardent régulièrement la Lune créent de la chaleur au moment de ces impacts, libérant les molécules d’eau en surface sur la Lune, ce qui doit favoriser l’oxydation.

Tous les mystères liés à cette détection sont loin d’être résolus et d’autres données seront probablement nécessaires pour mieux comprendre les interactions entre l’eau et la roche lunaire. Les chercheurs proposent d’étudier la présence d’hématite dans des cratères lunaires qui n’ont pas le même âge : ainsi, il serait possible de « révéler l’évolution de l’atmosphère de la Terre au cours des derniers milliards d’années », concluent-ils.

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