Si l’astéroïde Apophis porte le nom d’un dieu du chaos, il est pourtant sans grand danger. Il se contentera de « frôler » la Terre en 2029. Ce sera même une vraie aubaine pour les scientifiques.

Apophis n’est pas seulement le dieu égyptien du mal et du chaos ou le grand méchant des premières saisons de Stargate SG-1. Ce nom désigne aussi un astéroïde massif de 340 mètres de large. S’il revient régulièrement dans vos fils d’actualité, c’est parce qu’une prédiction originelle estimait qu’il pourrait entrer en collision avec la Terre en 2029. Mais rassurez-vous : ce n’est pas le cas.

L’objet suscitait déjà une certaine inquiétude il y a plus de dix ans (comme le montre cette archive d’un JT de France 2 en 2005). Cette fois-ci, c’est par un tweet d’Elon Musk publié le 18 août 2019 qu’Apophis est revenu sur le devant de la scène. Le podcasteur Joe Rogan a tweeté un article du journal britannique Express, intitulé « Choc d’astéroïde : la Nasa se prépare pour le ‘colossal Dieu du Chaos’ qui arrive dans 10 ans ». Musk l’a retweeté, en précisant : « Un nom excellent ! Pas besoin de s’inquiéter pour celui-ci, mais un gros rocher va probablement frapper la Terre et nous n’avons actuellement aucune défense ».

L'astéroïde Aophis va seulement frôler la Terre, sans l'impacter, en 2029. // Source : Capture Youtube / Nasa Video

L'astéroïde Aophis va seulement frôler la Terre, sans l'impacter, en 2029.

Source : Capture Youtube / Nasa Video

Apophis restera longtemps inoffensif

Les orbites de la Terre et d’Apophis sont assez proches, si bien que le 13 avril 2029, l’astéroïde passera à seulement 30 000 kilomètres de notre planète. Les techniques d’analyse des trajectoires sont suffisamment poussées pour que les scientifiques puissent être confiants : la probabilité qu’Apophis percute la Terre lors de cette rencontre est nulle. Ce ne sera pas non plus le cas en 2036, lorsque l’objet céleste s’approchera de nouveau de la Terre.

Pour mesurer ce type de probabilités, il existe une mesure très précise : l’échelle de Turin. L’ambiguïté autour d’Apophis provient des toutes premières prédictions de la Nasa par rapport à cette échelle. Lors de sa découverte, en 2004, les scientifiques l’avaient placé au niveau 4, soit plus de 1 % de chance d’une « collision capable de provoquer une destruction régionale ». Dorénavant, Apophis est classé au niveau 0.

Une aubaine scientifique plus qu’une inquiétude

Autant dire qu’à ce stade, Apophis est loin de causer un quelconque chaos et ne doit pas être sujet à inquiétude. En revanche, il constitue une véritable aubaine pour les scientifiques. « L’approche d’Apophis en 2029 sera une opportunité incroyable pour la science », affirmait en avril dernier Marina Brozović, spécialiste de l’analyse radar à la Nasa.

Il est rare qu’un astéroïde de cette ampleur frôle à ce point la planète. Ce sera la première fois qu’une telle observation sera possible dans l’histoire. Les scientifiques ont dix ans pour s’organiser afin d’être parés pour étudier Apophis sous toutes ses coutures, à l’aide de télescopes radars et optiques.

C’est une chance qui compte double. Comprendre les astéroïdes fait progresser les connaissances en astronomie, certes, mais cela permet également de développer une stratégie de « défense planétaire ». Il n’y a pas de risque zéro concernant une éventuelle menace provenant d’un impact d’astéroïde, dans un futur lointain. Puisque les technologies permettent de prédire un tel impact, le mieux est tout simplement d’avoir la capacité de s’y préparer. Et on s’en rapproche.

3 stratégies potentielles et sérieuses pour contrecarrer un astéroïde

Contrairement à ce que prétend Elon Musk dans son tweet, plusieurs projets sérieux sont d’ores et déjà dans les cartons afin d’éviter l’impact d’un astéroïde. L’utilisation d’un impacteur cinétique (kinetic impactor) est la solution la plus viable. Le principe : envoyer un ou plusieurs engins spatiaux percuter à très grande vitesse l’astéroïde, pour le dévier de sa course. La Nasa a programmé la mission DART (Double Asteroid Redirection Test) pour 2022 : l’objectif sera de tester grandeur nature cette méthode sur Didymos, un double astéroïde potentiellement dangereux.

Illustration d'un impacteur cinétique. // Source : Nasa

Illustration d'un impacteur cinétique.

Source : Nasa

L’utilisation d’une bombe nucléaire est parfois évoquée, mais souvent mal interprétée. Faire exploser un astéroïde pourrait être une idée aux conséquences fâcheuses. Il risquerait non pas de ne pas se détruire, mais plutôt de se disloquer en une pluie de milliers de bouts de roche projetés sur la planète. En revanche, la détonation d’une bombe à quelques centaines de mètres de l’objet pourrait libérer suffisamment d’énergie pour avoir un impact sur sa trajectoire.

La dernière stratégie sérieusement imaginée semble presque tout droit sortie d’un épisode de Star Trek : un tracteur gravitationnel (gravity tractor). Plutôt que de venir impacter directement l’astéroïde, cet engin viendrait voler à ses côtés pour, progressivement, au fil des mois et des années, l’emporter dans une nouvelle direction.

En dehors de la méthode nucléaire, qui n’est qu’un dernier recours, contrer un astéroïde demande du temps, de la préparation. Pour construire des engins comme un impacteur cinétique ou un tracteur gravitationnel, il faudra des années voire des décennies. Mais ce n’est pas un souci, car la détection des astéroïdes dangereux est possible très en amont. Qui plus est, d’après la Nasa, « aucun astéroïde connu ne pose de risque significatif d’un impact avec la Terre pour les 100 prochaines années ». Le plus grand danger actuellement enregistré (0,2 % de chance) est l’impact en 2185 de l’astéroïde 2009FD.


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