La réalité virtuelle sera-t-elle un jour indispensable à la pratique de la médecine ? En tout cas, elle est bien partie pour jouer un rôle de plus en plus important dans le secteur de la santé au regard des multiples annonces qui ont eu lieu ces derniers mois.
En effet, cette technologie d’immersion apparaît aujourd’hui comme un outil pratique pour traiter des situations parfois très différentes; qu’il s’agisse de s’entraîner avant de pratiquer une opération délicate, de détecter plus tôt des troubles neurologiques, de traiter l’obésité, d’accompagner les proches en difficulté ou de faciliter le bon déroulement d’une intervention chirurgicale.
En matière de prise en charge des personnes paraplégiques, la réalité virtuelle est aussi tout à fait prometteuse. Certes, ce n’est pas une surprise — en 2016, elle a été mise en œuvre par des professionnels pour aider des paraplégiques à reprendre partiellement le contrôle de leurs jambes –, mais la dernière avancée rapportée par l’école polytechnique fédérale de Lausanne constitue une démonstration supplémentaire.
Ici, l’idée derrière l’emploi de la réalité virtuelle est d’atténuer la douleur fantôme, soit la douleur ressentie par certains patients au niveau des membres paralysés alors qu’ils ne devraient normalement rien percevoir dans les régions du corps ayant subi de graves lésions. Pour y parvenir, il fallait berner le cerveau grâce à des stimuli venant d’autres endroits du corps.
« Nous avons réussi à provoquer une illusion : le sujet avait l’impression que ses jambes avaient été légèrement frappées, alors qu’en fait il recevait ces tapes dans le dos, au-dessus de la lésion de la moelle épinière », raconte le neuroscientifique Olaf Blanke, qui a conduit une étude sur le sujet. « Pendant que nous faisions cela, les sujets ont également déclaré que leurs douleurs avaient diminué ».
Pour duper son cerveau, le patient portait un casque de réalité virtuelle et était doté de fausses jambes. Dans le casque, l’intéressé voyait quelqu’un lui tapoter les jambes avec un bâton. Au même moment, un autre bâton le touchait dans le dos, au même rythme que le premier bout de bois. Progressivement, le stimuli tactile au niveau du dos a été confondu avec le stimuli visuel provenant du casque.
« Le stimulus visuel l’emporte sur le stimulus tactile »
Une superposition qui n’est pas immédiate, raconte Olad Blanke : « il faut environ une minute de tapotements simultanés pour que l’illusion se concrétise. Le tapotement sur le dos est transféré aux jambes parce que le stimulus visuel l’emporte sur le stimulus tactile ». Le plus impressionnant étant que le patient avait pourtant tout de l’expérience en cours et son cortex s’est quand même fait avoir.
La méthode employée ici n’est pas sans rappeler le principe de la « boîte miroir » qu’un confrère, Vilayanur S. Ramachandran, a inventé. Il s’agit « d’utiliser le reflet du membre encore présent de façon à ce que le cerveau ait un retour à ses stimulations; le patient observe son membre restant en se penchant du même côté de façon à voir le reflet qui paraît être le membre fantôme. Bien évidemment, les stimulations envoyées au bras fantôme doivent être en corrélation avec les mouvements du reflet, le patient doit pour cela produire des mouvements symétriques. Ainsi, le retour visuel est rétabli », détaille Wikipédia.
De la VR thérapeutique pour la maison
Pour l’école polytechnique fédérale, ces travaux ouvrent la voie à la mise au point de procédés visant à manipuler le cerveau pour des raisons thérapeutiques, en jouant sur le conflit entre stimuli et sur la manière dont le cerveau finit par arranger ça, quitte à modifier sa perception du réel pour redonner de la cohérence aux sensations que capte le corps.
D’ailleurs, la conception d’une « technologie de réalité virtuelle qui automatise les stimulations visio-tactiles – une thérapie numérique immersive – que des individus souffrant d’une lésion de la moelle épinière ou d’autres douleurs chroniques, peuvent utiliser régulièrement à la maison » est d’ores et déjà lancée.
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