Maintenant que le télescope spatial James Webb est complètement opérationnel, la science va commencer. 13 programmes ont été retenus pour être les premiers champs de recherche. Parmi eux, un est dirigé par un Français qui a très hâte de se servir de cet observatoire extraordinaire.

Pour le James Webb Space Telescope (JSWST), la science commence ! Mais que va-t-il faire maintenant que tous les instruments sont déployés, calibrés, et qu’il est capable de voir une myriade de détails à travers l’Univers ?

Depuis plusieurs décennies maintenant, il est devenu habituel de voir des études scientifiques sur des galaxies ou des exoplanètes se terminer par : « Nous en saurons plus avec les observations du JWST ». Ce qui signifie qu’avec un engin si attendu, les chercheurs et les chercheuses du monde entier seront nombreux à se ruer sur le moindre créneau d’observation disponible afin de faire avancer leurs recherches.

Des années de travail pour 35 heures d’observation

Heureusement, pour éviter la cohue, une sélection de programmes a déjà été établie. Treize programmes d’observations, les « Early Release Science Programs » qui seront menés dans les cinq prochains mois pour scruter des galaxies, des trous noirs, des planètes, des étoiles, ou notre propre système solaire. Parmi eux, un programme dirigé par un Français, Olivier Berné. L’astrophysicien de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie va s’intéresser de très près à la nébuleuse d’Orion. « Nous nous préparons depuis des années, raconte-t-il à Numerama. Dès 2014 nous avons commencé à construire notre projet et nous avons été sélectionnés en 2017. Depuis, nous menons des simulations, nous travaillons sur des algorithmes… Tout ça pour savoir comment utiliser au mieux les instruments le moment venu. »

nébuleuse d'Orion
La nébuleuse d’Orion par le télescope spatial Hubble. // Source : Nasa

Tant d’années de recherches avant un grand final qui s’annonce bref. L’équipe aura droit à tout juste 35 heures d’observations. Mais pourquoi s’intéresser à Orion ? « C’est une région où se forment les étoiles, précise Olivier Berné. Non seulement c’est très représentatif de comment s’est formé notre propre Soleil, mais en plus c’est suffisamment proche de nous pour pouvoir l’observer correctement. Grâce à Orion, nous pouvons comprendre nos origines. »

C’est une zone mesurant 24 années-lumière, visible depuis l’hémisphère Nord, même à l’œil nu si les conditions sont bonnes. Elle a été prise en photo par d’autres télescopes spatiaux comme Hubble ou Spitzer. Même les astronomes amateurs peuvent s’amuser à la trouver dans le ciel, voire à en observer ses détails.

Olivier Berné travaillait déjà sur Orion en 2008, à une époque où le JWST était en ligne de mire et apparaissait comme un aboutissement. Ses instruments seront particulièrement intéressants pour observer la nébuleuse plus en détail.

  • NIRSpec aura le même objectif, mais plutôt sur des petits détails.

Avec tout cet attirail, l’équipe d’Olivier Berné devrait être capable de distinguer les moindres détails d’Orion, avec une précision jamais atteinte auparavant. « Il y aura des découvertes, cela ne fait aucun doute, assure le chercheur. Mais j’espère que nous aurons aussi des surprises, car nous allons changer d’échelle. Cela n’a rien à voir avec les observations déjà faites. »

L’observation devrait avoir lieu en septembre, lorsque la nébuleuse sera visible pour le télescope. En attendant, les astronomes au sol multiplient les préparatifs pour que tout soit fin prêt une fois le JWST bien en place.

Des données pour toute la communauté scientifique

Cela dit, les premières images ne seront pas réservées à l’équipe en charge du programme, mais bien à toute la communauté scientifique. « C’est une des conditions des « Early Releases », justifie Olivier Berné. Il faut que les données puissent servir à l’ensemble de la communauté scientifique. C’est une première ! »

Ce qui veut dire que la première étude basée sur les observations du JWST qui sera publiée à propos d’Orion ne viendra peut-être pas de l’équipe d’Olivier Berné, mais d’autres chercheurs qui auront récupéré les images. « La différence, c’est que nous nous sommes beaucoup préparés pour interpréter ce que nous allons voir. Nous avons testé les outils, nous avons fait les simulations, nous sommes dans les starting-blocks ! »

« Nous avons testé les outils, nous avons fait les simulations, nous sommes dans les starting-blocks ! »

Olivier Berné

Le programme d’observation d’Orion et les douze autres sélectionnés dans ces « Early Releases », ont été choisis car ils sont censés être représentatifs de ce que peut faire le télescope. Mais aussi car les découvertes peuvent avoir des répercussions importantes sur nombre de recherches. Par exemple, Orion est censée être similaire à d’autres régions plus lointaines où se forment les étoiles. L’observer plus en détail sera sans doute utile pour interpréter différemment des signaux venus de nébuleuses plus difficiles à observer dont les données acquises sont parcellaires.

Parmi les autres programmes sélectionnés, il s’agira d’explorer des quasars, des noyaux de galaxies. Mais aussi des trous noirs supermassifs, ou encore des exoplanètes, dans l’espoir d’en trouver présentant des indices de vie. Il devrait d’ailleurs être possible d’obtenir des informations sur leur atmosphère. Enfin, le JWST pourra aussi servir à redécouvrir des astres beaucoup plus proches de nous. Un des programmes consiste à admirer Jupiter et ses satellites afin de mieux connaître leur atmosphère et la composition des nuages. Tous ces programmes ne concernent que les cinq premiers mois d’observation du télescope. Autant dire que les découvertes risquent d’être nombreuses.

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