Le Règlement général sur la protection des données (RGPD) en 2016, le Digital Markets Act sur les marchés numériques (DMA) en 2022, le Digital Services Act sur les services numériques (DSA) la même année, mais aussi la règlementation sur l’IA (AI Act) en 2024, ou encore la Data Act et la Cyber Resilience Act, en 2023 et 2024…L’Union européenne n’a pas chômé en l’espace d’une décennie.
En quelques années, l’Union européenne s’est imposée comme la spécialiste de la régulation du numérique avec des règles strictes sur les données personnelles, la cybersécurité, l’intelligence artificielle, la lutte contre les pratiques illégales, le droit à la concurrence et ainsi de suite.
Cette régulation du numérique, qui n’existe nulle par ailleurs au monde (en tout cas pas avec ce niveau d’exigences et de contraintes), est aussi vivement critiquée. On entend souvent que l’Europe se met des bâtons dans les roues en se privant de toute compétition mondiale. Elle régule le numérique dans ses frontières, mais peine à être compétitive en conséquence.

Les avertissements ne datent pas d’hier. On se souvient de la sortie du chef de l’État français fin 2023 sur l’AI Act. Aux yeux d’Emmanuel Macron, légiférer si tôt sur l’IA est une erreur : « On peut décider de réguler beaucoup plus vite et beaucoup plus fort que nos grands compétiteurs, mais on régulera des choses qu’on ne produira plus ou qu’on n’inventera pas. »
À l’automne 2024, l’ex-président de la BCE, Mario Draghi, a produit un rapport alarmant sur le décrochage de la compétitivité européenne. Parmi les nombreux problèmes relevés dans ce document a été mentionné l’excès de régulation dans le numérique. Cela affecte la capacité de l’UE à innover, face à la Chine et aux États-Unis notamment.


L’Europe lance le chantier pour simplifier le cadre réglementaire du numérique
Aujourd’hui, le signal d’alarme est officiellement entendu. Ce mercredi 19 novembre, la Commission européenne promet « des règles numériques de l’UE plus simples […] pour économiser des milliards d’euros pour les entreprises et stimuler l’innovation ». Cela, dans le cadre d’un « nouveau paquet numérique » proposé par Bruxelles.
L’objectif, résument les services de la présidente Ursula von der Leyen, est que les entreprises européennes, qu’il s’agisse de jeunes pousses ou de très grands groupes, « consacrent moins de temps au travail administratif et à la conformité, et plus de temps à innover et à se développer ». En creux, donc, il s’agit de relâcher un peu la bride.
Parce que les ajustements sont nombreux et divers, la Commission masse toutes les mesures qu’elle en tête dans un « omnibus numérique » qui doit réviser les règles dans des secteurs variés : l’IA, la cybersécurité ou bien les données. Les leviers à actionner diffèrent d’un domaine à l’autre, mais il en a deux qui vont particulièrement être scrutés.
Moins de bandeaux de cookies… L’Union européenne veut rendre le web plus vivable
Le premier concerne les fameux bandeaux de cookies liés au RGPD, et pour lesquels il faut dire sur chaque site visité si on est d’accord ou non, ou si on veut juste les cookies essentiels. On savait depuis des mois qu’une réforme était dans les tuyaux, afin de rendre l’expérience de navigation un peu plus conviviale, sans valider en permanence des bannières.
Dans le communiqué de Bruxelles, on parle donc de moderniser ce cadre pour « améliorer l’expérience » en ligne. Objectif : réduire l’apparition de ces bannières avec l’idée de pouvoir déterminer un consentement global, en un clic, qui serait mémorisé dans le navigateur et / ou le système d’exploitation — avec la possibilité éventuelle de changer après coup.

Un planning plus souple sur l’IA : l’Europe veut se relancer
Autre modification forte : repousser le calendrier d’application des règles à haut risque d’un maximum de 16 mois. Pour l’IA classée dans la catégorie à haut risque, les règles sont censées s’appliquer à partir d’août 2026. Avec ce nouveau cadre, on glisserait donc à décembre 2027. Là encore, il s’agit de laisser du temps de préparation pour les sociétés.
Les modèles à haut risque sont ceux qui sont les plus sensibles, parce qu’ils peuvent affecter les droits fondamentaux des individus. Ils impliquent des domaines sensibles tels que la santé, les transports, la carrière professionnelle, les contrôles biométriques, l’éducation et le parcours scolaire, la reconnaissance faciale et la détection des émotions, les décisions de justice, la sécurité, le contrôle aux frontières ou encore les actes administratifs.
Avec l’AI Act, l’Europe a choisi de réguler l’IA selon une échelle de risques comptant quatre niveaux : risque minimal, risque limité, risque élevé et risque inacceptable. Cette dernière catégorie est interdite dans l’Union. On trouve par exemple la police prédictive, la notation sociale, la duperie par IA et cinq autres pratiques.

Un parcours législatif qui débute à peine
Il reste maintenant à voir comment cet omnibus numérique va évoluer, car il n’en est qu’au début de son périple. D’abord parce qu’il ne va pas forcément couvrir la totalité des sujets numériques, ensuite parce que le texte est déjà la cible de critiques — avec, comme reproche central, celui de détricoter tout un édifice protecteur pour le citoyen.
De fait, le périmètre et le contenu de l’omnibus numérique est susceptible de bouger significativement dans les mois à venir. Désormais, toutes ces propositions vont être examinées par le Parlement et la Conseil, qui réunit les États membres. On ignore encore quand et si ce chantier ira à son terme, mais au moins la discussion est officiellement ouverte.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Toute l'actu tech en un clin d'œil
Ajoutez Numerama à votre écran d'accueil et restez connectés au futur !
Tous nos articles sont aussi sur notre profil Google : suivez-nous pour ne rien manquer !












