Longtemps resté dans l’ombre du Bitcoin, le Ripple est désormais LA crypto-monnaie en vogue. En 2017, cette monnaie virtuelle a pulvérisé ses homologues en enregistrant la meilleure performance de l’année. Pas tout à fait décentralisée, mais pas vraiment centralisée non plus, quelle est donc cette devise hybride ?

Il y a neuf ans naissait la crypto-monnaie originelle, celle qu’on ne présente plus aujourd’hui : le bitcoin. L’engouement qu’elle génère en ce moment est d’ailleurs tel que le sujet s’est peut-être glissé dans vos discussions de repas de famille à Noël. Confortablement installé au dessus de la barre des 10 000 € en décembre, le bitcoin semble s’être hissé ces derniers mois au statut de crypto-monnaie star.

Quartz / Données : Crypto Compare

Quartz / Données : Crypto Compare

Et pourtant, la crypto-monnaie la plus connue du grand public n’est pas forcément la plus prisée. Si la valeur du bitcoin a crevé le plafond l’année passée — entre le 1er janvier et le 31 décembre, elle a bondi de plus de 1 000 % –, cette hausse vertigineuse ne suffit pourtant pas à la classer parmi les dix crypto-monnaies les plus performantes de l’année.

Non, cet honneur revient au Ripple. Tandis que le bitcoin ne dépasse pas la quatorzième place du classement des devises les plus dynamiques, le Ripple se hisse en tête de la liste — devant NEM, Ardor, Stellar ou Ethereum — avec une performance de 36 018 %.

2004, la première vague

Mais quelle est donc cette monnaie virtuelle dont tout le monde parle désormais ? Le Ripple — terme qui signifie « vague », ou « ondulation » — tire son nom de l’entreprise qui en est à l’origine : en 2004, le développeur Ryan Fuguer, spécialisé dans les systèmes décentralisés, cherche à mettre au point un système monétaire inspiré par son précédent travail sur un système d’échange local, à Vancouver, au Canada.

La première forme prise par le Ripple est un service financier, Ripplepay. Il doit servir à fournir des opérations de paiement sécurisées aux membres d’une communauté en ligne, dans un réseau à dimension mondiale. Mais il faut attendre 2011 pour voir véritablement émerger le Ripple en tant que système de monnaie numérique, dont les transactions sont vérifiées par un processus bien spécifique.

Contrairement au minage d’unités de Bitcoin qui repose sur la blockchain, le protocole de paiement Ripple exige que les transactions soient vérifiées par consensus entre les membres du réseau. On les appelle aussi les validateurs.

ripple-ondulation

Plus rapide que le Bitcoin et moins énergivore : voilà comment les inventeurs du Ripple — Ryan Fuguer a, entre temps, été rejoint par Jed McCaleb et Chris Larsen — conçoivent leur version de la monnaie numérique. Cependant, Ryan Fuguer quitte le projet, remis entre les mains du reste de l’équipe : en 2012, celle-ci fonde la société Open Coin.

Un protocole de paiement

C’est cette entreprise, rebaptisée un an plus tard Ripple Labs, qui développe le protocole de paiement RTXP, pour « Ripple Transaction Protocol » — toujours fondé sur les travaux de Ryan Fuguer. Ce protocole permet de réaliser un transfert direct d’argent entre deux parties.

L’une des particularités de Ripple est que son protocole ne prend pas seulement en charge sa propre monnaie, le ripple (ou XRP) : les transactions financières peuvent être effectuées dans n’importe quelle monnaie fiduciaire ou même une autre crypto-monnaie. Les XRP sont « pré-minés », c’est à dire que tous les jetons en circulation ou qui vont l’être existent déjà.

La sécurité des transactions en Ripple s’appuie sur un réseau de serveurs indépendants, chargés de comparer en permanence leurs relevés de transactions. Ces serveurs ont une particularité : ils peuvent appartenir à n’importe qui, même des banques. Les détenteurs de ces serveurs sont les fameux validateurs.

Les serveurs peuvent appartenir à des banques

En septembre 2013, Ripple devient un logiciel libre et open source ; Ripple Labs reste le principal contributeur de son système de vérification mais désormais le réseau peut fonctionner sans l’entreprise : c’est à ce titre que l’on peut considérer qu’il est décentralisé.

À partir de là, Ripple s’ouvre au marché bancaire et aux institutions financières. La première banque à l’utiliser est allemande : il s’agit de Fidor Bank, une banque en ligne dont le siège est situé à Munich. Le protocole Ripple est ensuite adopté par une poignée de banques américaines, puis par la Commonwealth Bank of Australia.

Décentralisée… mais pas vraiment

La proximité du Ripple avec le secteur bancaire a probablement fait grincer les dents de plus d’un Bitcoin addict. Cette crypto-monnaie hybride permet en effet aux banques et aux services financiers d’intégrer le protocole Ripple dans leurs propres systèmes. En cela, elle est davantage centralisée que la première des monnaies virtuelles.

Pour qu’une transaction en Ripple ait lieu, deux paramètres sont requis. Premièrement, une institution financière doit détenir les fonds. Ensuite, des fonds spéculatifs ou des bureaux d’échange de devises sont chargés de fournir des liquidités dans la devise qu’ils souhaitent échanger.

Par ailleurs, l’ambivalence du Ripple repose sur son système de validation. Le réseau de cette crypto-monnaie est, par nature, moins éclaté que celui du Bitcoin. En effet, un validateur du réseau Ripple s’engage à suivre une charte, rédigée par l’entreprise Ripple Labs. C’est ce qui fait dire à Alexandre Stachtchenko, président de La Chaintech interrogé par nos confrères de l’Usine digitale, que c’est un « réseau fermé. »

Pas étonnant, dès lors, que le Ripple soit moins un OVNI pour les institutions bancaires que pour les habitués du Bitcoin. D’une certaine manière, le Ripple semble faire le grand écart entre les monnaies traditionnelles et les crypto-monnaies — dont l’essor a pourtant été intimement lié à la crise traversée par les institutions bancaires.

Peut-on vraiment comparer le Ripple aux autres crypto-monnaies ?

Logiquement, là où le Bitcoin n’emporte pas toujours l’adhésion des acteurs traditionnels, le Ripple rebute moins les investisseurs traditionnels et les banques centrales. La validation des transactions par un organe central et le fait que le protocole ne dépende pas des XRP différencie Ripple des autres crypto-monnaies. Malgré leur diversité, elles ont un principe commun, celui de générer des transferts de valeurs indépendants d’une organisation centrale.

Or, c’est un élément fondamental pour comprendre pourquoi la performance du Ripple dépasse de loin celle du Bitcoin : ce protocole ne poursuit pas les mêmes buts que ses homologues. Au contraire, le Ripple semble plutôt là pour rendre les échanges bancaires plus faciles, rapides et économiques.

Le protocole Ripple ne poursuit pas les mêmes buts que les autres crypto-monnaies

L’appui des validateurs de renommée internationale, comme les banques (comme UBS, Banco Santander, Unicredit) qui ont intégré Ripple dans des programmes tests, renforce la réputation du Ripple. A contrario, la présence de tels membres dans le réseau alimente une critique régulièrement adressée au Ripple, à savoir que la crypto-monnaie serait finalement à la botte du système bancaire.

Finalement, la véritable valeur du Ripple ne se mesure peut-être pas tellement au prisme d’une comparaison avec le Bitcoin, l’Ether ou toute autre crypto-monnaie ; les institutions bancaires ont joué (et continuent probablement de jouer) un rôle clé dans la réputation du Ripple.


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