Le signal envoyé par Delta n’est pas bon. Connu des bidouilleurs depuis plusieurs années (il s’appelait auparavant GBA4iOS), Delta est un logiciel capable d’émuler les jeux Nintendo, Super Nintendo, Nintendo 64, Game Boy Color, Game Boy Advance et Nintendo DS sur iPhone. Sur l’App Store, sa commercialisation a longtemps été interdite, puisque l’émulation n’était pas permise par Apple.
Au début du mois d’avril, Apple a revu sa politique et autorise désormais l’émulation. Le Digital Markets Act, le règlement européen sur le numérique, a probablement motivé cette décision. La volonté de la marque est de ne pas laisser les magasins alternatifs faire de l’ombre à son App Store, notamment avec des émulateurs qui risquent d’attirer du monde.
Le 17 avril, Delta a fait sa grande apparition sur l’App Store… à 27 exceptions près. Les pays de l’Union européenne n’ont pas accès à l’application dans le magasin d’Apple, puisqu’ils doivent passer par l’AltStore, un magasin alternatif créé par le développeur de Delta. Pire, les Européens doivent payer, alors que les utilisateurs de l’App Store ont accès à Delta gratuitement.
L’App Store européen va-t-il perdre des applications ?
La non-disponibilité de Delta sur l’App Store européen n’augure rien de bon.
Pour rendre son propre magasin payant (1,80 euro par an) plus compétitif, le développeur Riley Testut a décidé de faire de Delta une exclusivité de l’AltStore. Son objectif est d’inciter un maximum d’Européens à installer son service, tout en espérant qu’ils utiliseront l’AltStore pour télécharger d’autres applications. En l’état, la présence de Delta sur l’App Store français aurait rendu son AltStore assez dispensable.
Avec le DMA, l’Union européenne souhaite offrir le choix aux Européens. Un des objectifs du règlement est de mettre fin au « monopole » de l’App Store, en permettant aux développeurs et aux utilisateurs d’accéder à d’autres sources pour installer des applications.
Ici, le DMA a l’effet inverse. Il ne crée pas plus de choix, mais plus de complexité. L’Union européenne, sans qui Delta ne pourrait pas exister dans l’App Store, est le seul territoire privé de Delta dans l’App Store. La décision de Riley Testut, qui est pourtant un fervent défenseur de l’open source, ouvre la porte à un marché européen des applications très fragmenté. Un géant comme Meta, qui sait ses applications dispensables en Europe, pourrait-il prendre le risque de retirer Facebook, Instagram et WhatsApp de l’App Store, en faveur de son propre magasin ? La possibilité existe.
Autre fait regrettable : le DMA et les magasins alternatifs ne concernent que l’iPhone, alors que l’App Store est ouvert à tous les appareils Apple. Seule la version App Store de Delta fonctionne sur iPad, Mac et Vision Pro, la version AltStore est exclusive à l’iPhone… La version européenne de l’application est encore inférieure.
Sans le vouloir, Delta fait le jeu d’Apple, qui se réjouit certainement de voir le DMA avoir de premiers effets négatifs pour les Européens. L’objectif de la marque est de monter ses utilisateurs contre les régulateurs, dans l’espoir qu’ils prennent parti pour elle. Delta est le premier exemple d’une liste qui pourrait rapidement s’agrandir.
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