Sommé par les autorités brésiliennes de supprimer des comptes sur X, Elon Musk a décidé de s’opposer à la justice au nom de la « liberté d’expression ». Le milliardaire dit qu’il préfère perdre tous ses revenus au Brésil plutôt que de devoir se soumettre à une forme de censure, quelle qu’elle soit. L’issue de cette opposition reste incertaine.

Quand Elon Musk a acheté Twitter, le milliardaire avait assuré qu’il désirait faire régner la liberté d’expression absolue. Il promettait néanmoins qu’il respecterait les règlementations locales, puisqu’il avait conscience que la liberté d’expression variait d’un pays à un autre. Depuis, malgré quelques passes d’armes avec certaines autorités (dont l’Union européenne), Elon Musk applique cette règle. X (le nouveau nom de Twitter) n’est pas le roi de la modération, mais collabore avec les autorités. Il y a un écart entre ses prises de position publiques et ce qu’il fait réellement.

Cette trêve est-elle sur le point de cesser ? De plus en plus actif politiquement (il s’affiche même à des festivals d’extrême droite), Elon Musk ne cesse de répéter depuis des semaines que les médias mentent, que les politiques sont dangereux, que l’immigration détruit la société et que X est le seul territoire avec de la liberté d’expression absolue sur la planète. Dernier exemple en date : son intention de ne pas respecter une décision de justice brésilienne et de la dénoncer publiquement.

Elon Musk crée un précédent et se place au-dessus d’un État

Le 6 avril, le compte de Twitter en charge des affaires publiques a tweeté un long message pour dénoncer une situation au Brésil.

« X Corp. a été contraint par des décisions de justice de bloquer certains comptes populaires au Brésil. Nous avons informé ces comptes que nous avons pris cette mesure. […] Le peuple brésilien, quelles que soient ses convictions politiques, a droit à la liberté d’expression, à une procédure régulière et à la transparence de la part de ses propres autorités » pouvait-on lire dans le message.

Dans la foulée, Elon Musk s’est lui-même saisi de l’affaire, pour s’en prendre à Alexandre de Moraes, le Juge du Tribunal suprême fédéral en charge de la demande. Elon Musk menace de ne pas suivre l’ordre et défend les comptes sanctionnés.

Elon Musk s'en prend publiquement au Juge du Tribunal suprême fédéral à l'origine de la demande.
Elon Musk s’en prend publiquement au Juge du Tribunal suprême fédéral à l’origine de la demande. // Source : X

Que se passe-t-il vraiment ? Elon Musk étant Elon Musk, le drama a vite viré au règlement de compte politique.

Plusieurs des comptes retweetés par Elon Musk diffusent des messages pro-Bolsonaro (l’ancien dirigeant d’extrême-droite du Brésil) et partagent l’idée selon laquelle Lula, le président actuel du Brésil, serait un extrémiste dangereux au service de la censure. Le milliardaire croit faire le bien en s’opposant à la justice brésilienne, qu’il suspecte de vouloir faire taire les opposants de Lula. Elon Musk se présente en tant que combattant de la tyrannie de la pensée, sans que l’on sache exactement quelles sont la pensée et les faits reprochés aux comptes suspendus.

Elon Musk menace de publier des documents confidentiels.
Elon Musk menace de publier des documents confidentiels. // Source : X

Peu importe le combat, est-ce le rôle du propriétaire d’un réseau social ?

Rapidement, la tension entre Elon Musk et le Brésil a gagné en intensité. Le juge menace X d’une amende de 18 300 euros par compte réactivé, Elon Musk lui demande de démissionner. Il semble peu probable d’arriver à un accord, alors qu’Elon Musk se dit prêt à perdre tous ses revenus et à fermer les bureaux de Twitter au Brésil pour son combat.

Peu importe les opinions politiques, la question qu’il faut se poser est celle du rôle d’une personnalité comme Elon Musk dans ce type de situation. Est-ce à un milliardaire, qui plus est la plus grande fortune de la planète, de dicter à un État comment il doit se comporter ? Elon Musk aurait-il eu le même courage face à la Chine ou à l’Arabie Saoudite, deux nations avec qui il fait des affaires ? Tous les ans, Twitter collabore avec de nombreux gouvernements. Le voir dénoncer un complot au Brésil et braver la justice crée un précédent inédit.

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