Le partenariat a été annoncé sobrement le 28 septembre 2022, lors de la conférence Smartcon : Chainlink, un réseau décentralisé travaillant dans la blockchain, et Swift, une messagerie bancaire, vont collaborer.
Dit comme cela, la nouvelle n’a rien d’exceptionnel — sans connaître les deux entités, elle pourrait même paraitre assez dérisoire. Pourtant, Swift est l’un des outils financiers les plus puissants de ce monde, et Chainlink est un organisme central dans l’industrie des crypto-monnaies. Leur partenariat est un signal majeur.
Qu’est-ce que Swift ?
Afin de mieux comprendre ce qui est en jeu, il faut tout d’abord revenir au début : c’est quoi, Swift ? Swift, pour Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication, ou société pour les transferts financiers interbancaires, est une entreprise basée en Belgique. Son rôle est primordial : Swift est un réseau de messagerie, et il permet aux banques de communiquer entre elles.
Son rôle est de transmettre des messages, comme des ordres de paiement, des virements, des opérations sur titre ou encore des transactions de trésoreries. Swift assure également la sécurité de ces messages. En clair, une énorme partie des activités bancaires mondiales repose sur Swift.
Swift est d’ordinaire une organisation plutôt discrète, qui n’est connue que des personnes travaillant dans les banques ou les institutions financières. Mais, au mois de février, juste après le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, elle s’est retrouvée au centre de l’actualité internationale, lorsque plusieurs banques russes ont été déconnectées du réseau Swift.
Chainlink, qu’est-ce que c’est ?
À l’opposé, Chainlink est une entreprise spécialisée dans la blockchain et dans les structures décentralisées. Plus précisément, Chainlink développe des « oracles », un terme utilisé dans le secteur des crypto-monnaies pour décrire des sortes de ponts, faisant le lien entre une blockchain et des infrastructures, et des informations externes. En quelque sorte, Chainlink permet à un grand nombre de blockchains d’être reliées et de communiquer avec le monde physique grâce à ses oracles.
En plus des oracles, Chainlink est également connue pour un protocole d’interopérabilité entre blockchain qu’elle a mis au point. Le CCIP (pour Cross-Chain Interoperability Protocol, ndlr) permet d’envoyer des messages et transférer des crypto-monnaies à travers de nombreuses blockchains.
Ces actions ne sont pas habituellement possibles naturellement, les blockchains ne pouvant pas communiquer entre elles. De nombreux bridges (ponts) ont été créés pour permettre des opérations entre chaînes, mais ces derniers sont régulièrement la cible de hackers. Chainlink offre une interface de messagerie universelle et des smart contracts qui permettent de transmettre des ordres à travers les chaines de blocs très simplement, sans avoir à utiliser ces ponts.
Qu’est-ce que Swift et Chainlink vont faire ensemble ?
Les deux entreprises ont beau évoluer dans des univers très différents, elles partagent tout de même certaines similarités — et c’est pour cela que leur collaboration a autant de sens.
Swift et Chainlink vont conjointement travailler pour développer une « preuve de concept ». Le but est que le système CCIP permette à Swift d’envoyer des messages sur des blockchains, et ainsi d’ordonner des transferts de fonds en crypto-monnaies — ou d’autres opérations. Concrètement, si les deux entreprises parviennent à trouver une solution, Swift pourra utiliser le CCIP pour « transmettre des actifs entre différentes blockchains de façon sécurisée », explique Cryptoast. Le tout, sans avoir à passer par un intermédiaire, et sans avoir à inclure un bridge.
La nouvelle est très importante, car elle représente l’intérêt de plus en plus poussé des structures de la finance traditionnelle pour les crypto-monnaies, mais surtout, parce que Swift possède un grand nombre de clients. Plus de 11 000 banques utilisent Swift pour leur communication : si elles décident de passer également par elle pour leurs opérations en crypto, l’entreprise aura très rapidement un rôle central dans le secteur.
C’est une décision d’autant plus stratégique que de plus en plus d’États lancent leur propre monnaie numérique. Les MNBC (pour monnaie numérique de banque centrale) sont des devises numériques, comme le bitcoin et l’ethereum, mais qui ne sont pas décentralisées : ces dernières sont gouvernées par les banques centrales, d’où leur nom. Elles fonctionnent cependant sur un système de registres numériques (très semblables aux blockchains, mais centralisés), ce qui veut dire que la technologie CCIP se montrerait d’une grande utilité pour réaliser les ordres de paiement.
Ce n’est pas la première fois que Swift et Chainlink travaillent ensemble. Jonathan Ehrenfeld Solé, le directeur stratégique de Swift, a précisé que les deux entités avaient commencé il y a déjà quelques années un projet concernant l’émission et le remboursement d’obligations. « Ce nouveau partenariat entre Chainlink et Swift et le protocole d’interopérabilité entre blockchains va rapprocher le secteur de la finance traditionnelle, et la finance numérique », a-t-il également déclaré. Et peut-être même permettre à Swift de s’imposer comme un acteur central de la finance décentralisée.
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