Le sujet des vaccins n’a jamais été autant scruté, car ils sont au cœur de toutes les attentes en ce moment. Les laboratoires du monde entier travaillent à développer un vaccin contre la maladie Covid-19, à l’origine d’une pandémie dont la deuxième vague se profile en cette rentrée 2020. La situation sanitaire actuelle génère une période intense de diffusion d’idées reçues, fake news et théories du complot, et ces vaccins à venir font partie de ces informations fausses ou biaisées. Mais les « antivax », comme ils sont parfois appelés, ne sont pas nouveaux.
Qu’en est-il à notre époque de la confiance dans les vaccins ? La réponse est différente en fonction des continents et même des pays. C’est tout l’objet d’un travail synthétique publié ce jeudi 10 septembre 2020. « Il y a de plus en plus de preuves de retards ou de refus de vaccination dus à un manque de confiance dans l’importance, la sécurité ou l’efficacité des vaccins, ainsi que des problèmes persistants d’accès [aux vaccins]. » Cette étude rassemble donc des centaines de rapports et des dizaines de milliers d’entretiens sur les croyances nationales. Le champ des données va de 2015 à 2018/2019, sur 149 pays, concernant plus de 280 000 personnes.
Les chercheurs rappellent que la confiance vaccinale se divise en trois éléments : celle envers l’importance des vaccins, celle envers leur sécurité, et celle envers leur efficacité. Ce sont les trois éléments qu’ils ont analysés dans leur étude.
La confiance dépend de beaucoup de facteurs
À l’échelle mondiale, la confiance envers l’importance, la sécurité et l’efficacité des vaccins varient énormément et changent dans le temps. L’Europe est l’un des continents du monde où cette confiance est en moyenne la plus basse. En revanche, c’est aussi là qu’elle s’est le plus améliorée entre 2015 et 2019. Par contraste, il y a des pays où la défiance contre les vaccins a bondi : Afghanistan, Indonésie, Nigeria, Pakistan, Corée du Sud, Japon.
Les auteurs expliquent que des facteurs contextuels peuvent permettre de comprendre ces données. Il y a des raisons démographiques qui, selon les auteurs de cette étude, sont très cohérentes statistiquement à travers le monde. « Le fait d’être un homme ou d’avoir moins d’années d’études [est] associé à une diminution des chances de prise vaccinale. Des comportements positifs de recherche d’informations et le fait de faire davantage confiance aux travailleurs de la santé qu’à d’autres sources, tel le cercle social, pour obtenir des conseils médicaux et sanitaires, sont associés à des chances accrues de prise vaccinale. »
Il peut aussi y avoir des raisons sociales et politiques. En Indonésie, le gouvernement religieux est l’une des causes les plus importantes, puisque les dirigeants s’étaient exprimés en la défaveur des vaccins. En Corée du Sud, les auteurs pointent « la mobilisation en ligne contre les vaccins », très intense et qui a été « identifiée comme un obstacle majeur à la vaccination ». Une communauté en ligne nommée ANAKI a « fortement plaidé contre la vaccination des enfants ».
Au Japon, des craintes ont commencé à naître en 2013 sur l’innocuité du vaccin contre le papillomavirus humain. Face à cette crainte, le gouvernement a décidé de suspendre sa recommandation : une décision « applaudie par les groupes anti-vaccins, mais pas par la communauté scientifique mondiale ». Pour les auteurs de cette synthèse, la façon dont les responsables de la santé ont abordé la crainte du vaccin anti-papillomavirus, ainsi que la persistance d’une épidémie de rubéole en raison des faibles taux de vaccination, montre « que le programme de vaccination japonais continue de poser des problèmes qui doivent être résolus ». L’approche politique de la vaccination peut être déterminante.
Il faut retenir que cela peut s’améliorer
Sur la carte de confiance, on peut observer que la France est l’un des pays les plus en rouge. La confiance dans les vaccins y a été « constamment basse depuis 2015 ». Pour autant, l’optimisme est au rendez-vous. La synthèse montre que, comme dans d’autres pays d’Europe (Royaume-Uni, Finlande, Italie, Irlande…), cela va mieux. En France, en 2018, une personne sur cinq déclarait estimer que les vaccins sont sûrs. À la fin 2019, c’était un français sur trois. La confiance envers la sécurité des vaccins a donc significativement augmenté dans le pays.
L’intérêt principal de l’étude, au-delà de faire un bilan, est surtout de montrer à quel point cette confiance vaccinale fluctue tant elle est soumise à de nombreux facteurs. C’est aussi en cela qu’elle pousse à être optimiste, puisqu’elle montre que cela peut s’améliorer de manière très significative, même lorsque les niveaux de confiance sont au plus bas. Le point aveugle de cette étude reste évidemment l’année 2020 et la pandémie : il n’est pas encore possible de savoir quel impact aura ce contexte sur la confiance vaccinale. Les antivax ont été très bruyants en cette période, mais cela n’est pas forcément représentatif de la réalité de la population, ni même du fait que ces personnes ne vont pas voir leurs croyances évoluer.
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