Avec la découverte de possibles « traces de vie » sur Mars par le rover Perseverance, on a grandement parlé de biosignatures. De quoi s’agit-il exactement ? Explications.

La Nasa aurait trouvé une « biosignature potentielle » sur Mars. Une phrase à la fois simple et ambigüe qui pourrait faire croire au grand public qu’il s’agit d’une preuve définitive d’une présence extraterrestre sur Mars. Mais la réalité est un peu plus complexe, comme toujours.

Qu’est-ce qu’une biosignature ?

Une biosignature est une trace chimique ou physique qui peut être raccordée à la vie.

Dans cette définition, une trace de pas dans le sol semblant appartenir à un animal peut être une biosignature, comme un os de dinosaure ou un fossile d’ammonite. De même, la présence de dioxygène et de diazote dans l’air que nous respirons est une biosignature dans le sens où ces gaz ne sont présents que parce qu’ils sont produits par les êtres vivants — mais pas l’oxygène.

Le terme vient de « bio » signifiant vivant, et « signature » pour la trace ou la marque.

Mais, lorsqu’on parle de biosignature, c’est bien souvent dans le cadre de l’exobiologie : la recherche de vie en dehors de la Terre. Le but est ici de trouver l’équivalent d’une trace de pas dans le sol sur une autre planète, ce qui est évidemment très compliqué.

Biosignature et indice de vie, quelle différence ?

Les deux termes sont assez proches, mais un indice de vie est « moins solide ». Il s’agit d’un signal qui pourrait être associée à la vie, mais qui n’est pas confirmé. Une biosignature est un véritable indicateur biologique qui peut être raccordé à la vie.

En d’autres termes, tant que l’indice de vie n’a pas été validé et n’a pas été considéré comme une preuve absolue de la présence de vie, ce n’est pas une biosignature.

Quelles sont les principales biosignatures ?

On différencie plusieurs types de biosignatures :

  • La biosignature chimique est une substance organique, une molécule ou un processus chimique repéré. C’est le cas, par exemple, de ce qui est soupçonné autour de l’échantillon martien Sapphire Canyon. On peut aussi trouver ce type de biosignature atmosphérique dans les gaz entourant une planète ou à travers des processus métaboliques comme la photosynthèse.
  • La biosignature physique est une trace qui semble créée par un être vivant. Il peut s’agir d’une marque physique dans le sol ou préservés dans un gaz. Des traces retrouvées sur Terre peuvent servir de modèles pour savoir quoi chercher sur d’autres planètes.
  • La biosignature morphologique serait, d’un côté, encore plus spectaculaire, puisqu’il s’agirait tout simplement de la trouvaille d’un fossile extraterrestre. Des recherches espèrent mettre la main sur des micro-fossiles ou autres textures biologiques.

Quelles biosignatures faut-il rechercher ?

Les différentes approches sont complémentaires, mais actuellement ce sont avant tout les biosignatures chimiques qui sont plus faciles à détecter à distance sur les exoplanètes en analysant leur atmosphère.

Forage de l'échantillon de Cumberland en 2013. // Source : NASA/JPL-Caltech/MSSS
Forage de l’échantillon de Cumberland en 2013. // Source : NASA/JPL-Caltech/MSSS

Sur Mars, les astromobiles comme Perseverance et Curiosity portent l’espoir de trouver des biosignatures physiques, voire morphologiques, mais cette technique nécessite de l’exploration sur place. Il s’agit de trouver une trace laissée par un être vivant, et c’est ce que pense avoir distingué la NASA avec l’échantillon Sapphire Canyon.

Une biosignature prouve-t-elle forcément la vie ?

Même dans le cas de cet échantillon martien qui suscite énormément d’espoirs, la certitude n’est pas absolue, car pour pouvoir qualifier une trace, quelle qu’elle soit, de biosignature, il faut avant tout avoir éliminé toutes les autres possibilités. C’est ce qui s’est produit avec le cas de la phosphine sur Vénus.

Dans un premier temps, une étude affirmait que ce gaz avait été retrouvé dans l’atmosphère, ce qui correspondait donc à une biosignature puisqu’il est produit par des êtres vivants. Par al ensuite, d’autres travaux ont pointé du doigt le fait que la phosphine pouvait apparaître de bien d’autres manières, sans pour autant inclure d’activité biologique. Il ne s’agissait plus d’une biosignature.

Signature de la phosphine dans le spectre de Vénus. // Source : ALMA (ESO/NAOJ/NRAO), Greaves et al. & JCMT (East Asian Observatory)
Signature de la phosphine dans le spectre de Vénus. // Source : ALMA (ESO/NAOJ/NRAO), Greaves et al. & JCMT (East Asian Observatory)

Pour Mars et Sapphire Canyon, la situation est la même. Pour l’instant, l’explication liée au vivant semble la plus probable puisque ces marques sont typiques de ce qu’auraient laissé des microbes, mais nous ne sommes pas à l’abri d’avoir affaire à un autre processus abiotique. S’il est démontré que cet indice peut aisément être expliqué sans faire intervenir la vie, finie la biosignature martienne !

Biosignature et astrobiologie

La recherche de biosignature est centrale dans de nombreuses missions spatiales impliquant de l’astrobiologie. Les missions martiennes Perseverance, puis ExoMars, mais également les télescopes comme James Webb sont conçus en partie pour détecter ce type de trace.

Reste que les incertitudes sont telles que ces études réclament un dialogue entre plusieurs disciplines allant de la chimie organique à la paléontologie pour construire un cadre d’interprétation solide.

Image du roc possédant de possibles biosignatures
Image du roc possédant de possibles biosignatures. // Source : Nasa/JPL-Caltech/MSSS

Des recherches difficiles

En astrobiologie, la principale difficulté concerne l’éloignement des sources. Les signaux sont si faibles qu’il est délicat d’identifier une quelconque biosignature.

En plus, les atmosphères planétaires sont extrêmement complexes, ce qui laisse la porte ouverte à de nombreux faux positifs, des signaux abiotiques qui semblent pourtant avoir été créés par des êtres vivants. Tout cela nécessite des instruments extrêmement précis pour pouvoir le tri et découvrir plusieurs biosignatures atmosphériques combinées.

De la biosignature à la technosignature

Au-delà de la biosignature, un autre concept existe : celui de technosignature. Ici, on cherche un indice d’une trace de vie intelligente.

Certaines radiations ou ondes radio, par exemple, pourraient être des indices pour dire qu’une autre civilisation extraterrestre est visible depuis l’espace. Il en est de même pour les lumières artificielles, visibles sur une autre planète, comme elles le sont sur la Terre vue de l’espace.

Aucune technosignature n'a été détectée sur les objets interstellaires Borisov et Oumuamua. // Source : Capture d'écran YouTube Grunge
Aucune technosignature n’a été détectée sur les objets interstellaires Borisov et Oumuamua. // Source : Capture d’écran YouTube Grunge

Tout cela reste sujet à caution, parce que ces hypothèses se fondent sur le fait qu’une civilisation alien, si elle existe, aurait forcément développé des outils semblables aux nôtres. Également, la notion même de biosignature est limitée en ce qu’elle repose sur le seul exemple connu de la vie : et il est sur la Terre.

Si une tout autre forme de vie existe, et qu’elle ne repose pas sur le carbone, serions-nous capables d’identifier ses traces comme des biosignatures ? Il s’agit-là d’une limite qui rend difficile d’imaginer autre chose que ce que l’on connait. La science repose sur la multiplicité des expériences, mais nous n’avons qu’un seul exemple : le nôtre.

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