Un an après son lancement, le télescope spatial James Webb a pu observer nombre d’exoplanètes, de galaxies lointaines ou d’étoiles en formation. Un bilan enthousiasmant qui fait espérer le meilleur pour la suite.

Désormais, le 25 décembre n’est pas que le jour de Noël, mais aussi l’anniversaire du télescope le plus ambitieux depuis des décennies. Le télescope spatial James Webb souffle sa première bougie aujourd’hui, un an jour pour jour après son lancement. Une année qui semble être passée à toute vitesse entre le suivi quasi quotidien de son voyage, le déploiement de ses miroirs, puis à partir de juillet les photos distillées au cours des mois, toutes plus impressionnantes les unes que les autres.

Source : Nasa
Les Piliers de la Création. // Source : Nasa

Mais, maintenant que les informations envoyées par le télescope ont eu le temps, pour certaines, d’être digérées, étudiées et remises en contexte, il est grand temps de faire un premier bilan. Est-ce que cet observatoire est si révolutionnaire que ce qui était promis ?

« Oui, clairement, affirme Lucie Leboulleux, spécialiste des exoplanètes à l’Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble. Il tient toutes ses promesses et a pu progresser sur tous les domaines prévus : l’observation d’exoplanètes, mais aussi celle des galaxies lointaines et les zones de formation d’étoiles. Il a apporté des réponses absolument partout. »

« Un niveau de précision qui dépasse toutes les attentes »

Dans tout cela, la chercheuse a été particulièrement marquée par l’étude de WASP-39 b, une exoplanète dont on a pu analyser le spectre, c’est-à-dire l’ensemble des molécules qui composent une atmosphère. Ce qui a permis d’identifier du dioxyde de carbone, une première en dehors du Système solaire. « C’est la première fois que nous avons un signal aussi précis, précise Lucie Leboulleux. Ce qui est intéressant, c’est que le CO₂ est lié à la vie, et même si cette planète est très certainement inhabitable, cela veut dire que la détection de CO₂ sur d’autres planètes plus semblables à la Terre est possible. »

Mais il n’y a pas que les planétologues qui profitent de James Webb, Romane Le Gal, astronome à l’Observatoire des Sciences de l’Univers de Grenoble est plutôt fascinée par d’autres images, comme la nébuleuse de la Carène : « C’est une pouponnière d’étoiles, une zone où naissent les étoiles. Cette image en particulier est époustouflante, car on peut voir les moindres détails : les grumeaux de matière qui se forment, les poussières et les gaz qui créent un disque avant l’apparition d’une étoile… C’est un niveau de netteté et de précision qui dépasse toutes les attentes. »

Nébuleuse de la Carène. // Source : NASA, ESA, CSA, and STScI
La nébuleuse de la Carène. // Source : NASA, ESA, CSA, and STScI

Ces observations ont donné lieu à un véritable branle-bas de combat chez les spécialistes de la discipline, car maintenant que le télescope spatial a fourni une image d’une telle qualité, les autres télescopes comme l’ALMA au Chili, se sont mis à pointer leurs antennes vers la même zone afin de fournir d’autres types de données et mieux comprendre tous les phénomènes en cours. « Le but est d’avoir une vision globale, ajoute Romane Le Gal, identifier les moindres molécules dans le gaz, la poussière ou la glace. »

« Ces images sont fascinantes, car elles donnent un contexte, résume Olivier Berné, astrophysicien à l’Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie de Toulouse. Avoir ces images globales est très utile après pour faire de la spectroscopie, et c’est ce que nous faisons à propos de la nébuleuse d’Orion ». Cette autre zone où les étoiles naissent massivement fait partie des programmes « early releases », c’est-à-dire les premières cibles de l’observatoire au tout début de sa mise en route. Et les données sont déjà nombreuses. « Pour l’instant, nous avons surtout des confirmations de ce que nous pensions, tempère Olivier Berné. Mais à partir de la rentrée, nous allons mener des observations supplémentaires pour aller plus loin, plus dans le détail, et trouver l’explication des phénomènes autour de la formation des étoiles. »

« Ce n’est que le début », prévoient les astronomes

« La prochaine étape, c’est celle des surprises, assure Romane Le Gal. Nous avons eu les réponses que nous connaissions déjà, maintenant nous allons vers l’inattendu, avec des compléments d’information qui risquent de nous surprendre, c’est ce qu’on espère en tout cas ! »

Parmi les surprises attendues : la nébuleuse de l’Iris qui devrait être dans le viseur du télescope en 2023. Une zone hostile et très peu dense où se forment pourtant des molécules géantes de fullerène, des chaînes de 60 atomes de carbone, ce qui est étonnement gros et complexe pour un tel milieu. L’instrument scientifique de pointe pourrait expliquer les phénomènes qui mènent à sa création.

James Webb a pris la galaxie fantôme (M74) en photo dans le spectre infrarouge. // Source : ESA
James Webb a pris la galaxie fantôme (M74) en photo dans le spectre infrarouge. // Source : ESA

« Je pense que nous aurons d’autres surprises en 2023, assure Olivier Berné. Quand nous tombons sur l’inattendu, il faut du temps pour vérifier et savoir exactement ce qu’on a vu, mais ça va arriver ! »

Lucie Leboulleux voit encore plus loin : « Ce n’est que le début. Le déploiement du miroir et toute la mise en place du télescope ont été si parfaits que ça ouvre les possibilités pour envoyer un engin encore plus grand d’ici à quelques dizaines d’années. On craint toujours une mauvaise résolution, un instrument mal déployé, ou une sensibilité moindre, mais là, tout est tellement optimal que les perspectives sont bien meilleures. »

Si 2022 a été l’année où James Webb a montré l’étendue de ses capacités, 2023 pourrait bien être celle des premières grandes découvertes surprenantes. En tout cas, professionnels comme amateurs pourront admirer les images attendues de la nébuleuse de l’Iris, d’Orion, ou même d’Uranus et de Neptune.

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