Aussi étonnant que cela puisse paraître, je n’ai jamais joué à un seul Silent Hill. J’ai pourtant dévoré chaque nouveau Resident Evil, parfois à des âges où je n’y étais pourtant pas autorisé. Je me suis rué sur les deux The Evil Within, j’ai tressailli devant les Outlast, les premiers Dead Space m’ont mis mal à l’aise. Et même un titre comme Tormented Souls, old-school à souhait, n’a pas échappé à ma curiosité.
Silent Hill n’a toujours été qu’un rendez-vous manqué, et l’annulation du projet porté par Hideo Kojima, Norman Reedus et Guillermo Del Toro n’a pas aidé. Mais 2024 est enfin l’année de cette rencontre rêvée : un remake de Silent Hill 2, commandé par Konami à Bloober Team, sort sur PS5 et PC le 8 octobre 2024. L’occasion idéale de s’y mettre (pas besoin d’avoir joué au premier opus), même si on a entendu tout et son contraire à son sujet. Selon certains fans, Silent Hill 2 serait un jeu vidéo trop mythique pour être retouché, surtout par un studio annexe. À leur plus grand désarroi, force est de reconnaître que le remake est brillant sur bien des points. Désolés les haters et les saboteurs.
Points forts
- Une belle réalisation
- Une modernisation respectueuse
- Quelle ambiance…
Points faibles
- Combats perfectibles
- La version PS5 mérite d’être peaufinée
- Âmes sensibles, s’abstenir
Silent Hill 2 vous mettra mal à l’aise
Plusieurs fins possibles
Le remake de Silent Hill 2 possède huit fins différentes, soit deux de plus que l’original.
N’ayant pas joué au Silent Hill 2 original, je ne saurais pas déceler les évolutions en détail. Mais, de ce que j’ai pu lire çà et là, Bloober Team s’en tire avec brio, alors qu’il lui restait tant à prouver (d’où un certain scepticisme initial). Sa relecture est fidèle et les quelques changements ne dénaturent rien. Quelques-uns accusent le jeu de « wokisme », car les personnages féminins sont moins sexy qu’auparavant — une polémique sans intérêt. Le remake de Silent Hill 2 étend l’expérience en lui donnant un second souffle nécessaire pour s’inscrire dans une époque plus contemporaine. Une simple remasterisation n’aurait pas suffi.
En 2024, Silent Hill 2 reste ce jeu à l’ambiance unique, terriblement angoissante — mais qui n’a jamais brisé le quatrième mur. Souvent, il ne se passe pas grand-chose. Néanmoins, tous ces moments instillent un malaise permanent qui donne envie de reposer la manette pour jouer à quelque chose de plus joyeux et accueillant. Le brouillard, caractéristique de la ville de Silent Hill, est tellement épais que l’on n’y voit rien à moins de cinq mètres. Cette visibilité réduite ne facilite rien, remplacée plus tard par des décors intérieurs souvent plongés dans le noir. Vive la lampe torche pour se repérer un minimum dans cette plongée cauchemardesque, un tantinet mélancolique.
Alimentée par le moteur Unreal Engine 5, la réalisation de Silent Hill 2 est de bonne facture, avec une emphase sur les éclairages et les reflets pour donner du corps au rendu. Il est simplement dommage de devoir composer avec une assise technique loin d’être irréprochable sur PlayStation 5. Avec le mode d’affichage basé sur les performances (lire : la fluidité de l’image), on doit composer avec des ralentissements et des scintillements grossiers. Une mise à jour, ou la PlayStation 5 Pro, devrait permettre d’améliorer la situation.
Les développeurs activent de nombreux leviers pour nous plonger dans l’effroi. Aux jump-scares impitoyables, au détour d’un couloir dans la pénombre, s’ajoute un incroyable travail sur le sound design. C’est un élément essentiel du genre survival-horror, et ce remake de Silent Hill 2 s’en donne à cœur joie sur les bruitages malaisants. On n’oubliera jamais ce passage démoniaque par une prison dans laquelle les barreaux grincent à la moindre vibration provoquée par les mouvements des créatures capables de marcher au plafond. Tous ces silences entrecoupés qui glacent le sang, au sein d’environnements délétères. Et quand la radio grésille, ce n’est vraiment pas bon signe.
En s’aventurant dans ce remake avec le cœur bien accroché, on comprend mieux pourquoi Silent Hill 2 revendique un statut d’œuvre culte dans le genre horrifique. C’est amplement mérité, d’autant que l’histoire est toujours aussi prenante. On y suit un homme, James Sunderland, qui se rend à Silent Hill après avoir reçu une lettre de sa femme, qui a succombé d’une maladie trois ans plus tôt. La ville, désertée, est plongée dans une réalité étrange, habitée par des entités étranges et agressives. James y croise d’autres survivants, qui sont tous venus chercher quelque chose à Silent Hill. Le voyage se déroule avec un poids psychologique palpable.
Difficulté
Vous pouvez indépendamment régler la difficulté des combats et des énigmes. En normal, vous ne manquerez jamais de munitions tandis que les puzzles sont bien réglés.
Hôtel, résidence, hôpital… James Sunderland est amené à visiter le moindre recoin de Silent Hill, en quête d’indices sur la mystérieuse lettre qu’il a reçue. En résulte une expérience qui mélange de l’exploration (avec de nombreux allers/retours), des énigmes à la difficulté bien dosée (ni trop simple, ni trop alambiquée) et sans doute un peu trop d’action. En effet, Silent Hill 2 ne brille pas particulièrement par ses combats, un peu trop rigides et guère intéressants une fois passé l’effet de surprise. Le design des monstres est réussi, mais ils n’opposent pas une résistance suffisamment mémorable pour apprécier les confrontations.
Le gameplay est fonctionnel, jamais grisant, et les monstres font davantage office de gimmicks à mesure que les heures défilent. Ce qui vaut aussi pour les boss — sauf l’effroyable Pyramid Head. Les nombreux changements apportés par Bloober Team ont en tout cas été vivement applaudis par Masashi Tsuboyama, le directeur du Silent Hill 2 de 2021.
Pour lui, la réinvention est une réussite et il adoube le passage à une caméra libre (la vue était fixe à l’origine) sur Twitter : « Le changement notable concerne la caméra (la perspective). Passer à une caméra libre a un impact significatif sur plein d’aspects, comme les combats, le level design, la création artistique… Bien que l’impact sur l’histoire soit limité, cela change tout pour le feeling du jeu. Pour être honnête, je ne suis pas satisfait avec la caméra d’il y a 23 ans. La profondeur et l’angle étaient limités par le processus de chargement des données. C’est un travail continu et complexe qui n’a jamais été récompensé. » Rassurez-vous, le fait de pouvoir contrôler la caméra n’inhibe pas le sentiment de peur lié au hors-champ.
Visiter Silent Hill, en revanche, est une vraie réussite. Les environnements, bien agencés et charpentés, sont gorgés de secrets à découvrir et on apprécie beaucoup la manière dont les indices sont confiés. Concrètement, James Sunderland n’hésitera jamais à griffonner sa carte des lieux, pour se souvenir qu’il y a un élément important sur lequel il faudra peut-être se pencher plus tard. Ce qui veut dire qu’on n’hésite jamais à jeter un coup d’œil aux différents plans pour s’y retrouver. On peut vite se perdre à Silent Hill et, clairement, on n’en a pas vraiment envie.
Le verdict
Silent Hill 2
Voir la ficheOn a aimé
- Une belle réalisation
- Une modernisation respectueuse
- Quelle ambiance…
On a moins aimé
- Combats perfectibles
- La version PS5 mérite d’être peaufinée
- Âmes sensibles, s’abstenir
Le remake de Silent Hill 2 est un véritable tour de force. Scruté de près par une horde de fans prêts à bondir au moindre faux-pas, le studio Bloober Team orchestre une relecture époustouflante du chef-d’œuvre de Konami. Toujours aussi pesante, sans jamais être trahie, l’atmosphère du jeu est sublimé par l’Unreal Engine 5 et les avancées technologies observées depuis 2001.
On retiendra un peu moins les combats de Silent Hill 2, moins réussis que le reste. Mais le trip psychologique de James nous emmène dans les méandres d’un enfer méticuleusement construit et raconté. On ne se sent jamais vraiment à l’aise dans ce survival-horror, ce qui en dit beaucoup sur ses qualités intrinsèques. Les haters peuvent ravaler leur salive : non seulement ce remake est excellent, mais il est en plus adoubé par le directeur créatif de l’opus original.
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