Cette nouvelle forme d’informatique pourrait bouleverser tous les systèmes pour IA que nous avons connus jusqu’ici. ExtropicAI, une start-up américaine fondée par d’anciens ingénieurs de Google, a lancé le 29 octobre 2025 une alternative au matériel informatique traditionnel.
Sa particularité ? Celui-ci ne fonctionne pas uniquement grâce à l’électricité, comme une puce classique, mais exploite les fluctuations et le bruit stochastique des systèmes physiques. Des termes impressionnants, mais qui se rapprochent en réalité du fonctionnement des êtres vivants. Et petit bonus : cette approche serait jusqu’à 10 000 fois moins coûteuse en énergie, selon la firme.
Une informatique qui pense comme le vivant
Contrairement aux processeurs classiques, qui exécutent des calculs déterministes et rigides, les circuits développés par ExtropicAI fonctionnent sur un principe probabiliste, plus proche du raisonnement biologique.
Dans la nature, le cerveau — comme les organismes vivants– ne traitent pas l’information de manière binaire, mais en évaluant des possibilités et des degrés d’incertitude. C’est exactement ce que font les TSU (Thermodynamic Sampling Units) d’ExtropicAI : au lieu de chercher une seule réponse exacte, ils explorent plusieurs options possibles, un peu comme le fait un neurone lorsqu’il « hésite » entre différentes connexions.

Pour atteindre ce fonctionnement, ExtropicAI s’appuie sur un phénomène fondamental : le bruit thermodynamique. Ce petit désordre naturel, présent dans toute matière, provient de l’agitation des électrons sous l’effet de la chaleur. Dans les circuits électroniques classiques, ce bruit est perçu comme un parasite qu’il faut éliminer à tout prix. ExtropicAI fait justement l’inverse : elle l’exploite. Ce bruit devient la source d’aléa physique dont ses circuits ont besoin pour effectuer leurs calculs probabilistes, un peu comme le cerveau utilise les fluctuations neuronales pour s’adapter. Les puces d’ExtropicAI utilisent donc bien l’électricité, mais elles exploitent le bruit thermodynamique présent dans tout circuit électronique comme moteur du calcul, au lieu de l’éliminer comme le font les architectures classiques.
Un pari ambitieux face aux géants de la puce comme Nvidia
Or tout l’enjeu est là : dans les machines classiques, le hasard n’existe pas vraiment. Les ordinateurs ne savent qu’imiter l’imprévisible. Les générateurs dits « pseudo-aléatoires » produisent des suites de nombres qui paraissent chaotiques, mais qui restent entièrement déterministes : si l’on relance le même calcul avec la même « graine », on obtient exactement la même séquence. Les TSU d’ExtropicAI ne se contentent pas de tirer au hasard : elles intègrent le bruit physique dans le calcul lui-même. Autrement dit, l’aléa n’est pas un simple ingrédient ajouté au-dessus du silicium, mais un composant fondamental du processus de traitement.
En pariant sur un calcul fondé sur le désordre physique plutôt que sur la précision mathématique, ExtropicAI trace une voie radicalement différente de celle des géants du secteur. Mais dans une industrie dominée par les GPU de Nvidia, cette approche alternative devra encore prouver qu’elle peut passer du laboratoire au marché.
Une technologie industrialisable à grande échelle ?
Des idées proches avaient déjà émergé, notamment dans le domaine de l’informatique probabiliste et des « p-bits », ces dispositifs expérimentaux exploitant les fluctuations thermiques ou les régimes mésoscopiques. Toutefois, la plupart de ces prototypes nécessitaient des conditions cryogéniques ou restaient impossibles à produire à grande échelle.

Bien que l’idée de la start-up ne soit pas inédite, celle-ci propose une implémentation et une intégration inédites orientées vers l’IA moderne, avec l’ambition d’être la première plateforme matérielle probabiliste réellement programmable et industrialisable à grande échelle — un objectif qu’elle devra encore démontrer, sans perdre son avantage thermodynamique.
De plus, l’écosystème logiciel d’ExtropicAI est encore embryonnaire. Les développeurs sont aujourd’hui formés à CUDA, TensorRT ou PyTorch, tous taillés pour les GPU Nvidia. Convaincre cette communauté de migrer vers une approche thermodynamique exigera un changement de paradigme autant qu’un produit performant. ExtropicAI promet quant à lui que ses systèmes pourront être intégrés dans des data centers sobres, voire dans des appareils autonomes, sans nécessiter les puissants ventilateurs ou alimentations des puces classiques.
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