Même les mondes virtuels en 3D ont désormais leur propre modèle d’IA. World Labs, startup spécialisée dans « l’intelligence spatiale » et la génération d’environnements 3D à partir d’images, de textes ou de vidéos, vient de dévoiler son modèle maison. Baptisé Marble et présenté en bêta privée il y a deux mois, celui-ci est disponible pour le grand public depuis le 12 novembre 2025.
Comment fonctionne World Labs ?
World Labs est une jeune pousse américaine encore discrète, mais déjà très en avance dans son domaine. La société a été cofondée par Fei-Fei Li, figure majeure de l’IA moderne et pionnière de la vision par ordinateur. Leur idée : doter l’IA d’une véritable compréhension de l’espace en trois dimensions, pour qu’elle ne se contente plus de générer des images ou du texte, mais qu’elle fabrique des mondes. Marble, son modèle multimodal, est la pièce maîtresse de cette vision. Il s’agit d’un générateur de mondes 3D capable de produire des environnements complets — géométrie, textures, volumes, objets — à partir d’entrées très variées : un simple prompt textuel, quelques photos, une vidéo panoramique ou même un croquis de disposition spatiale. Sur son site, la firme donne un exemple : « Une cuisine de hobbit détaillée et habitée, remplie de paniers tressés et de bouilloires en cuivre, baignée d’une douce lumière bleue pâle et d’une ombre ambiante apaisante ».

Le résultat est assez bluffant, mais World Labs prévient : les prompts textuels offrent un contrôle limité, l’IA étant obligée d’inventer tout ce que le texte ou la photo ne décrit pas. C’est notamment à ce moment que la mécanique interne de l’outil se met en marche. Une fois le texte, la vidéo ou la photo fournie, Marble analyse les données pour en extraire la géométrie implicite (murs, sols, objets), les volumes, les matériaux et les relations spatiales. Une étape comparable à la vision robotique, mais enrichie d’une couche générative. L’IA reconstruit ensuite un environnement complet en trois dimensions, invente les zones hors champ et génère un monde navigable et éditable, comme un niveau de jeu.

L’utilisateur peut éditer son monde virtuel en 3D
Marble propose plusieurs outils d’édition intégrés. Click & Expand étend automatiquement un environnement en générant des zones supplémentaires cohérentes. Compose permet de fusionner plusieurs scènes pour créer un monde plus vaste. Chisel, un outil avancé basé sur l’IA, permet de construire la structure de façon un peu grossière d’un monde avec des formes simples (blocs, plans, etc.) ou en important des assets 3D, puis d’appliquer un prompt textuel pour en contrôler le style. À noter qu’il est également possible de modifier une zone précise d’un monde via une instruction textuelle.

Une fois le monde édité selon vos besoins, reste à choisir la manière dont vous souhaitez l’exporter. La première option consiste à exporter votre scène sous forme d’éclaboussures gaussiennes (Gaussian splats). Cette technique représente un environnement 3D non pas avec des surfaces solides, mais avec des milliers de petites particules semi-transparentes. Ensemble, ces particules forment une image très détaillée et très proche de ce que Marble génère en interne. Ce format est notamment pertinent pour visualiser un monde tel qu’il a été imaginé par le modèle. Vous pouvez d’ailleurs les afficher directement dans votre navigateur grâce à Spark, le moteur de rendu open source de World Labs, basé sur THREE.js. Marble permet aussi d’exporter un monde sous forme de maillage triangulaire, c’est-à-dire une structure 3D composée de milliers de petits triangles. C’est le format le plus courant dans l’industrie du jeu vidéo, de la VR ou du cinéma, car il est compatible avec la majorité des logiciels (Unity, Unreal Engine, Blender, etc.).
La firme indique que plusieurs types de maillages peuvent être générés :
- des maillages haute qualité, qui cherchent à reproduire au mieux l’apparence visuelle des éclaboussures gaussiennes.
- des maillages de collision, utilisés pour détecter les obstacles ou permettre à un personnage de marcher dans une scène
- des maillages basse fidélité, suffisants pour des simulations rapides ou pour tester une physique simple
En parallèle, la startup a aussi lancé Marble Labs, un laboratoire créatif et communautaire, entièrement dédié à la génération de mondes 3D. À noter que Marble dispose d’une version gratuite permettant de générer quelques mondes 3D, mais sans les outils avancés ni l’export. Pour un usage pro ou commercial, il faudra passer aux abonnements payants afin de bénéficier de l’ensemble des fonctionnalités.
World Labs a de la concurrence, mais pas trop
World Labs n’évolue pas seul sur ce nouveau terrain de l’IA spatiale. Plusieurs acteurs — des géants comme Google DeepMind ou Niantic Spatial, mais aussi des startup spécialisées telles que Decart ou Odyssey — développent, eux aussi, des modèles capables de comprendre ou de générer des environnements en 3D. La différence, selon World Labs, tient au fait que Marble produit des mondes persistants, navigables et exportables, là où nombre de solutions concurrentes se concentrent encore sur la simulation, la reconstruction partielle ou des prototypes de recherche. World Labs a d’ailleurs attiré des investissements majeurs de la part de fonds de capital-risque comme Andreessen Horowitz (a16z), New Enterprise Associates (NEA) et Radical Ventures. Parmi les autres investisseurs notables : Marc Benioff, Ashton Kutcher, ainsi que des entreprises technologiques comme Adobe, AMD, Databricks et Nvidia. Résultat, en septembre 2024, World Labs a levé pas moins de 230 millions de dollars.
Tandis que bon nombre de concurrents se concentrent sur un segment très spécialisé du marché de la 3D ou de la simulation, la jeune pousse ambitionne de proposer des fonctionnalités destinées tant aux créateurs (jeux, VFX, design) qu’aux usages industriels (robotique, simulation, smart environments). Reste à voir comment un outil de cette envergure sera accueilli.
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