« Revendez votre ancien téléphone et profitez d’une remise de 700 euros » !
Quand on achète un smartphone, la plupart des revendeurs incitent leurs clients à renvoyer leur appareil actuel. Une opération dans laquelle tout le monde est censé gagner, puisque le client bénéficie d’une belle remise grâce à la vente de son terminal (avec un prix parfois majoré) et que le vendeur récupère un produit qu’il peut revendre à un tarif plus élevé à une plateforme de reconditionnement. Il s’agit aussi d’une action écologique, car de nombreux smartphones dorment dans des tiroirs.
Si la revente de son vieux téléphone semble alléchante, elle peut de temps en temps s’avérer décevante.
Sur le net, des centaines de témoignages relatent de mauvaises expériences qui, très souvent, placent le client dans une position inconfortable. La plupart des reprises se déroulent normalement, mais il vaut mieux prendre des précautions.
Des prix revus à la baisse : attention avec les estimations en ligne
Quand on fait reprendre un téléphone, on doit répondre à plusieurs questions. Quel est le nom du modèle ? Peut-il s’allumer ? Les boutons sont-ils fonctionnels ? La vitre est-elle intacte ? Le revendeur propose alors une estimation, généralement très alléchante et proche de la valeur du produit d’occasion, avec pour principal avantage de ne rien avoir à faire soi-même à part renvoyer son produit. Ce sont surtout les smartphones Apple et Samsung qui intéressent les reconditionneurs, puisque ce sont ceux qui se revendent le mieux.
Plusieurs jours après l’envoi, le reconditionneur contacte le client. Certaines reprises se déroulent convenablement, mais un nombre considérable arrive avec une mauvaise surprise : « À la suite d’une analyse réalisée par l’un de nos techniciens, il apparait que l’état de votre mobile n’est pas conforme à la description », écrit par exemple Nest Green, qui est notamment le partenaire de SFR. Nous avons nous-mêmes vécu cette expérience avec un iPhone 11, avant de constater que des centaines de personnes indiquaient avoir connu une expérience similaire.
Dans notre cas, ce qui était reproché à l’appareil est la présence de rayures à l’arrière. Les images envoyées par le reconditionneur, prises avec une lumière très vive, sont incontestables : il y a bien des traces d’usure au dos de l’appareil. Ce n’est pas réellement surprenant pour un appareil âgé de cinq ans, même s’il a été majoritairement utilisé avec une coque, mais c’est assez pour faire baisser la valeur de reprise de 135 à 85 euros selon Nest Green, soit moins que sa valeur sur le marché de l’occasion. Il est impossible de contester l’expertise : il faut choisir entre oui et non.
Sur X (ex-Twitter), plus de 120 personnes ont répondu à l’appel à témoignages lancé par Numerama, parfois avec des récits encore plus problématiques. « J’ai envoyé un smartphone à faire reconditionner, ils devaient me le reprendre plus de 300 euros » écrit, par exemple, Alexis. Le reconditionneur lui refuse ce prix à cause de rayures, il décide de récupérer son appareil et constate « que l’écran est fracassé, le smartphone est tordu et ne s’allume même plus ». Le reconditionneur a-t-il abimé l’appareil pendant ses tests ? C’est évidemment impossible à prouver.
« Avec Back Market, le repreneur a passé la valeur de 300 euros à 10 euros ! Je lui ai fait une contre offre : aucune réponse. Au bout de deux mois, Back Market a validé d’office la reprise à 300 euros », témoigne Jean-Philippe. « On m’a envoyé des photos d’un téléphone clairement plus usé que celui que j’ai envoyé, mais évidemment rien pour le prouver », écrit Blackwarrior, alors que Raphaël raconte qu’on lui a « proposé 1/3 du prix, car l’écran ne s’allumait pas ». Il a fait revenir son téléphone, qui fonctionnait parfaitement. « J’avais pris des photos du téléphone avant et quand je leur ai envoyé les photos, le prix est revenu au prix de départ. Miracle », déclare de son côté Axel, qui s’en est mieux sorti que certains. La plupart des témoignages recueillis peuvent être consultés en réponse à notre tweet. Une grande majorité d’entre eux concernent Back Market, le numéro 1 du secteur, même si d’autres revendeurs sont montrés du doigt.
Que se passe-t-il en cas de refus de la contre-proposition ? Tout dépend des revendeurs. Certains font payer les frais de retour aux clients, avec parfois des tarifs si élevés qu’ils incitent à accepter l’offre. D’autres, comme Nest Green, le renvoient gratuitement. Nous avons de notre côté récupéré un iPhone 11 en très bon état, mais le reconditionneur a conservé la boite, ce qui aurait pu compliquer sa revente. Heureusement, une reprise en magasin, dans un Apple Store, nous a permis de le revendre au tarif maximal, soit 165 euros (les rayures ont été considérées comme normales).
Comment éviter les mauvaises surprises ? Notre meilleur conseil est de filmer l’appareil sous tous les angles, avec un flash, avant de l’emballer. Cette preuve vidéo est le meilleur moyen de contester un problème grave, notamment si le produit revient abîmé. Il est fort probable que vous n’en aurez pas besoin, mais puisque le nombre de témoignages en ligne est considérable, autant être prudent.
Une grille très encadrée, mais parfois « punitive », comment fonctionnent les reconditionneurs ?
Les reconditionneurs jouent-ils volontairement sur les valeurs de reprise maximales pour attirer les clients ? Sans doute, c’est le jeu du marketing, mais il serait malhonnête de résumer le phénomène ainsi.
Plusieurs employés de centres de reconditionnement ont accepté de nous répondre anonymement et confirment l’existence de grilles volontairement « punitives », mais déplorent surtout des déclarations mensongères des clients. « Tu n’as pas idée du nombre de clients qui renvoient des appareils en sale état, mais qui demandent la valeur maximale », nous indique l’un d’entre eux.
Pour mieux comprendre le fonctionnement d’un centre de reconditionnement, Numerama a envoyé une dizaine de questions à plusieurs acteurs, dont Back Market, Nest Green et Recommerce, qui ont tous accepté de répondre, voire d’ouvrir les portes de leurs centres pour prouver qu’il n’existe pas d’abus volontaires. Numerama avait visité début 2024 le centre de reconditionnement de Reborn, dans le Sud de la France, mais cet acteur ne reprend pas les appareils de particuliers.
« La reprise d’un téléphone rentre dans notre process de flux de reprise dans l’atelier. Le téléphone est réceptionné par nos équipes avec prise de photo immédiate. Le téléphone passe ensuite dans des machines de diagnostic automatique (qui réalise plus de 70 tests et plus de 200 points de mesure). Nous sommes aujourd’hui les seuls à les utiliser de manière industrielle. Ensuite le téléphone est revu par un opérateur pour déterminer le grading », explique Alexandre Kurzynski, le CFO de Nest Green. Il explique que « le téléphone circule dans des bacs sécurisés en mousse et dispose d’une enveloppe de protection », afin d’éviter d’être endommagé pendant le processus de reconditionnement.
De son côté, Back Market se défend en expliquant n’être qu’une plateforme qui fait appel « à des partenaires reconditionneurs comme Nest Green ». Le plus connu des sites de revente explique que « si l’état réel de l’appareil diffère de la description initiale, le reconditionneur peut proposer une contre-offre avec des preuves justifiant la nouvelle estimation (photos, rapports de test). Si le client refuse, l’appareil est renvoyé gratuitement sous deux jours ouvrés, aux frais de Back Market. Nous surveillons rigoureusement les pratiques des reconditionneurs : en cas d’abus, des sanctions allant jusqu’à leur exclusion du programme peuvent être appliquées. »
« Le cœur de métier de Recommerce depuis 2009 est de racheter des produits usagés à leur juste valeur », déclare Augustin Becquet, le directeur général de l’entreprise, à Numerama. « Nous travaillons de manière exclusive sur la reprise avec Bouygues Telecom, Free, Boulanger en France, ainsi qu’avec d’autres gros acteurs partout en Europe », précise-t-il. « Recommerce ne renégocie que très rarement et uniquement pour les parcours en ligne quand le client a souvent délibérément essayé de voir son produit plus beau qu’il n’est en réalité », ajoute son directeur général, qui indique son service présente moins de risques que d’autres marketplaces concurrentes, qui ont des grilles différentes.
Chez Nest Green, la renégociation est plus courante : « Sur les reprises B2C, nous sommes à 40 % de rénégociation. Dans l’énorme majorité des cas, le client accepte la contre-proposition. Nous suivons le taux de rénégociation par modèle, par opérateur pour être sûr d’être le plus juste avec le client. Nous voulons éviter les déclarations mensongères, mais nous savons également que le client n’est pas un spécialiste », précise l’entreprise. Nest Green ajoute être un des seuls à faire « de la réparation totale. Avec dans certains cas des opérations directement sur la carte mère afin de prolonger la vie du produit au maximum ». C’est une des raisons qui explique pourquoi un reconditionneur doit parfois baisser les prix : pour revendre, il doit réparer. Pour réparer, il a besoin d’argent.
Quelle solution pour ne pas avoir de mauvaises surprises avec la reprise d’un téléphone ? Tous nos témoins sont unanimes : la reprise en magasin est une valeur sûre. Même Recommerce, par l’intermédiaire de son directeur général, le dit : « Lors de parcours magasin, le prix au client est garanti et le montant tout de suite reversé, il n’y a donc aucune surprise pour le client. Le diagnostic est réalisé avec l’aide d’un vendeur. »
Faut-il totalement renoncer aux reprises en ligne ? Non, car elles présentent plusieurs avantages et sont faciles à mettre en œuvre (et qu’il s’agit aussi d’un geste pour l’environnement). Mais on ne peut que vous inciter à la prudence avant de renvoyer un appareil : des problèmes peuvent subvenir et tout laisse penser que ces litiges sont assez courants.
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