Ce projet d’IRM est une révolution médicale. De premières images viennent d’être obtenues. Mais pourquoi les scientifiques ont-ils utilisé une cucurbitacée, à savoir un potimarron, pour cette expérimentation ?

« Grâce à cet IRM extraordinaire, nos chercheurs ont hâte de pouvoir étudier plus finement l’organisation anatomique et structurelle du cerveau. Ces travaux permettront sans doute des applications cliniques majeures », affirme Stanislas Dehaene, sur le site du CEA-Paris-Saclay.

Il dirige la plateforme française de neuro-imagerie Neurospin. Et dans cette déclaration, il fait référence au projet Iseult, qui vient de faire ses preuves. Il s’agit du « plus puissant » IRM au monde destiné à l’imagerie chez l’être humain. Sa force tient en son aimant, une petite merveille d’ingénierie :

  • 132 tonnes.
  • 5 mètres de longueur, 5 mètres de diamètre extérieur, 90 centimètres de diamètre intérieur.
  • Un champ magnétique nominal de 11,7 teslas (un record, et les IRM hospitaliers habituellement utilisés comptent 1,5 à 3 teslas).
  • Ce champ est alimenté par un courant électrique de 1 500 ampères — résultat, les bobines de conducteur sont en permanence refroidies par de l’hélium à l’état superfluide à 1,8 kelvin (-271,35 degrés Celsius).

Cette technologie de pointe est utile pour le résultat final que l’on souhaite obtenir : les images scannées. Le processus de recherche a consisté à transformer cet aimant hors du commun en imageur de très haute résolution. Et le CEA a dévoilé, le 7 octobre 2021, les toutes premières images obtenues grâce à cette IRM. Celles-ci atteignent une résolution de 400 microns dans les 3 dimensions, soit une prouesse.

Images du potimarron réalisées à partir de l’IRM du projet Iseult. // Source : CEA

Images du potimarron réalisées à partir de l’IRM du projet Iseult.

Source : CEA

Sur les images ci-dessus, il n’y a rien d’humain : il s’agit d’un potimarron — communément appelé citrouille. Si cela peut apparaître insolite, il y a aussi une logique derrière ce choix.

Une cucurbitacée de saison au cœur de la révolution médicale

La citrouille n’a pas été choisie au hasard sur le plan purement scientifique. Si un potimarron a été utilisé par les chercheurs pour cette expérimentation, c’est « car sa consistance riche en eau et sa taille présentent des points communs avec notre cerveau ». Et le potimarron possède de « multiples textures ». Le pourcentage d’eau dans le corps humain peut surprendre, car les proportions, en fonction des organes, sont assez élevées. Les évaluations peuvent varier, mais le cerveau contient jusqu’à 80 % d’eau, par exemple. Les potimarrons, de leur côté, contiennent autour de 90 % d’eau — comme beaucoup de légumes d’ailleurs.

La salle de commande, pendant le scan du potimarron. // Source : CEA

La salle de commande, pendant le scan du potimarron.

Source : CEA

Démontrer l’efficacité de l’IRM avec une citrouille sert donc de « proof of concept », démontrant la faisabilité concrète de l’innovation.

En l’occurrence, la démonstration est une réussite. L’équipe de recherche décrit les images comme prometteuses, et espère pouvoir encore optimiser l’équipement pour atteindre une résolution de 100 ou 200 microns au lieu de 400 (le chiffre est plus bas, mais la résolution est plus haute, car plus précise). Comme on peut le voir en regardant la haute précision des scans du potimarron, dont on perçoit les fibres et les pépins avec une impressionnante acuité, une telle performance d’imagerie permet d’accéder à bien davantage d’informations.

Ce projet pourrait constituer une révolution médicale, qui se ferait « au bénéfice de la recherche fondamentale, des sciences cognitives et de la connaissance des pathologies cérébrales », comme Alzheimer ou Parkinson. Cela pourrait aussi accélérer les diagnostics médicaux.

Une prochaine étape, en plus de l’optimisation des paramètres, sera de passer de la citrouille à l’humain : après validation des autorités sanitaires, l’équipe de recherche pourra faire appel à des volontaires pour éprouver l’équipement en conditions réelles.

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