Le chapitre Bételgeuse sera-t-il fermé un jour ? Peut-être pas, si l’on en croit une nouvelle étude parue le 5 août 2021 dans Nature Communications et qui apporte de nouveaux éléments troublants sur la géante rouge. Des chercheurs de l’Académie chinoise des Sciences affirment que la baisse de luminosité de l’étoile est due à une tache stellaire gigantesque.
Cette diminution de l’intensité lumineuse entre octobre 2019 et mars 2020 avait été très commentée, certains y voyaient les prémices d’une explosion en supernova. Finalement, en juin dernier, des chercheurs français menés par l’astrophysicien Miguel Montargès avaient conclu avec une solution un peu moins spectaculaire : un nuage de poussière. Un obstacle entre l’étoile et l’observateur (nous), qui a provoqué une baisse de la lumière visible.
Et désormais, rebondissement ! La professeure Sofya Alexeeva a analysé le spectre proche de l’infrarouge pendant la phase de diminution de la lumière, afin d’en déduire la température à la surface. Elle explique : «Nous avons mesuré la présence d’oxyde de titane et de cyanure, des molécules qui survivent davantage dans un environnement plus froid, ce qui a pu nous confirmer que l’étoile avait bien une baisse de température ».
Une étoile qui refroidit
Plus précisément, ce serait une diminution de 170 Kelvins, soit une centaine de degrés Celsius. Mais par quoi serait-elle causée ? D’après les auteurs, la meilleure solution serait une tache géante. La possibilité avait déjà été envisagée par le passé : une étude parue en juin 2020 décrivait un astre recouvert de taches jusqu’à 70% de sa surface totale. Le résultat d’un cycle similaire à celui qui se retrouve sur notre Soleil.
Dans cette dernière étude, les chercheurs ont utilisé des instruments différents pour arriver à la même conclusion. Selon les auteurs, la présence de poussière n’aurait pas provoqué une baisse de luminosité dans ces longueurs d’onde proches de l’infrarouge. En d’autres termes, la température de Bételgeuse chute vraiment, et pas seulement sa luminosité vue de la Terre. Les auteurs ajoutent : «Nos résultats sont cohérents avec différentes observations et sont peu compatibles avec un assombrissement provoqué par un nuage de poussière ».
Pour enfoncer le clou, ils précisent que ce type de taches sombres est fréquent sur les géantes rouges, et qu’elles semblent compatibles avec la baisse de la température observée.
Redeviens poussière
Alors, fin de l’histoire ? Pas forcément. Miguel Montargès, qui avait défendu la thèse du nuage de poussière, n’est pas d’accord avec leur conclusion, explique-t-il à Numerama : «C’est une étude qui dit qu’une tache froide est compatible avec les observations, et c’est vrai. Mais cela ne nous dit rien sur la présence ou non de poussière ».
Pour l’astrophysicien français, ce papier n’apporte pas plus d’éléments que celui de 2020 qui arrivait à la même conclusion. Pire, il élude la possibilité d’un autre scénario. « Notre étude n’est même pas citée, déplore Miguel Montargès, et c’est dommage quand il s’agit de relancer un tel débat. » D’autant plus que l’étude non citée n’excluait pas la possibilité d’une telle tache. Elle ajoutait même que les deux phénomènes, la pulsation naturelle de l’étoile, et le nuage de poussière devant, avaient pu se produire en même temps. Ce scénario est privilégié, car cela correspond bien au cycle observé de Bételgeuse, mais aussi aux variations observées sous différentes longueurs d’onde.
«La présence d’une tache correspond plutôt bien aux observations générales, résume Miguel Montargès. Mais si on va dans le détail et dans toutes les longueurs d’onde, la poussière explique beaucoup plus.»
La conclusion définitive de cette histoire arrivera-t-elle un jour ? En attendant, Bételgeuse reste scrutée de près par les astronomes du monde entier, espérant qu’elle daigne révéler de nouveaux indices.
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