Les aurores n’apparaissent pas que sur Terre. Depuis près de 40 ans, les astronomes planétaires étudient également les « émissions aurorales de rayons X » visibles sur Jupiter. Elles apparaissent lorsque les ions (atomes chargés électriquement) entrent en collision avec l’atmosphère jupitérienne. C’est là une part de l’explication. Mais le mystère est ailleurs : comment les ions atteignent-ils cette atmosphère ?
Grâce à l’analyse des données de la sonde Juno de la Nasa en orbite autour de la planète, et du télescope à rayons X (XMM-Newton) de l’ESA, une nouvelle étude publiée ce vendredi 9 juillet 2021 dans Science Advances fait le jour sur ce phénomène. Pour la première fois, les ions ont été observés en train de « surfer » sur la magnétosphère de Jupiter et ses ondes électromagnétiques.
Une « magnifique chaîne d’événements »
La piste vers une réponse est apparue lorsque les astronomes, notamment l’auteur en chef de cette étude Zhongua Yao, ont repéré ce qui n’était pas habituel dans ces aurores, en comparaison de ce qu’il se passe sur Terre. Effectivement, sur notre planète, les aurores ne peuvent être observées qu’à des angles spécifiques : à 65 et 80 degrés de latitude au niveau des pôles magnétiques. À une latitude plus élevée, les aurores disparaissent, car elles ne peuvent plus se former : les lignes du champ magnétique se désalignent de la Terre pour se connecter aux vents solaires. Cela signifie que, du point de vue de notre connaissance d’un champ magnétique planétaire, il ne devrait pas y avoir d’aurores dans la plus haute latitude de Jupiter.
Pourtant, les émissions aurorales à rayons X de Jupiter ont bien lieu dans ces latitudes qui contredisent les prédictions. Cela signifie que le champ magnétique est « fermé » : les lignes du champ magnétique se désalignent à un pôle, et se connectent non pas aux vents solaires, mais à nouveau à la planète, à l’autre pôle. Pour investiguer de ce côté, Zhongua Yao et son équipe ont lancé des simulations informatiques, qui ont permis de déterminer que les aurores à plusieurs champs magnétiques fermés de ce type, mais qui s’étendent sur des millions de kilomètres dans l’espace, faisaient une boucle lointaine avant de revenir vers le « corps » de Jupiter.
Ce début de réponse restait insuffisant. Les astronomes ont donc utilisé le fameux téléscope XMM-Newton, pour observer Jupiter en continu pendant 26 heures. En parallèle, la sonde Juno a survolé les zones où l’équipe prédisait l’origine des aurores. Le couplage des données a permis de découvrir que cette origine est à trouver dans les fluctuations mêmes du champ magnétique jupitérien. Quand la planète tourne, elle entraîne son champ magnétique dans ce mouvement et celui-ci est frappé par le vent solaire, qui est un flux de plasma en grande partie composé d’ions. Ces particules chargées électriquement sont alors entrainées et comprimées contre le champ magnétique. Au cours de ce processus, se créent des ondes électromagnétiques qui vont « caler » les ions sur les lignes du champ.
Comme l’illustre l’Agence spatiale européenne dans un commentaire de la découverte, il faut imaginer que les ions « surfent » sur les lignes du champ magnétique, au sein de ces ondes électroniques. Ils sont entrainés sur des milliers de kilomètres, puis, en suivant le mouvement, sont ramenés vers Jupiter et percutent l’atmosphère. C’est ce qui crée les aurores de rayons X. Il s’agit, selon les auteurs de la découverte, d’une « magnifique chaîne d’événements ».
Comme à chaque fois qu’un mystère est résolu, ce sont plein de nouveaux mystères qui sont également découverts, ouvrant de nouvelles pistes de recherche, aussi bien pour étudier les champs magnétiques d’autres planètes que des aurores très particulières sur Terre appelées aurores ioniques. Plus largement, les ondes électromagnétiques à l’origine des aurores jupitériennes pourraient bien jouer « un rôle important dans le transfert d’énergie d’un endroit à l’autre du cosmos ».
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