L’Univers est de plus en plus chaud. Des scientifiques tentent de comprendre pourquoi dans une étude de la revue The Astrophysical Journal (accessible en prépublication), publiée en octobre 2020 et présentée le 10 novembre par l’université d’État de l’Ohio. Les auteurs ont exploré l’histoire thermique de l’Univers, au cours des derniers 10 milliards d’années — pour rappel, l’Univers est âgé d’environ 13,8 milliards d’années.
« Nous avons obtenu de nouvelles contraintes sur l’histoire thermique de l’univers », écrivent les scientifiques. Selon leurs travaux, la température moyenne du gaz dans l’Univers a augmenté de plus de 10 fois au cours de cette période. Aujourd’hui, cette température est estimée à environ 2 millions de kelvins (soit un peu moins en degrés Celsius, puisqu’il faut retrancher 273,15 à une température en kelvins pour la convertir en degrés Celsius). Mais pourquoi cette hausse de température ?
Formation des structures
Pour le comprendre, il faut d’abord rappeler que la mesure des scientifiques s’inscrit dans la continuité des travaux de James Peebles, cosmologue américain et lauréat du prix Nobel de physique en 2019, connu pour sa prédiction de l’existence du fond diffus cosmologique (la plus ancienne lumière encore présente dans l’Univers). Il a aussi travaillé sur les implications de la matière noire dans l’évolution des structures de l’Univers. Comprendre la formation des structures, c’est-à-dire le processus par lequel les structures (les galaxies) que l’on observe dans le ciel actuel ont pu se former à partir d’un état homogène et dense, est une question centrale en cosmologie.
Ici, on parle de modèles larges de formation de galaxies (on ne se situe pas à l’échelle des galaxies individuelles). On pense que cette structure à grande échelle s’est formée par un effondrement gravitationnel de la matière noire et du gaz. « Au fur et à mesure que l’Univers évolue, la gravité rassemble la matière noire et le gaz de l’espace dans des galaxies et des amas de galaxies », explique Yi-Kuan Chiang, chercheur associé au CCAPP (Center for Cosmology and Astroparticle Physics) de l’université d’État de l’Ohio, auteur principal de l’étude, cité dans le communiqué annonçant l’étude. La violence de ce déplacement est telle que de plus en plus de gaz est chauffé, décrit-il.
En vérifiant la température de l’Univers, les scientifiques peuvent mieux cerner l’évolution de la formation des structures. Avec le temps, l’Univers devient de plus en plus chaud, à cause de l’effondrement gravitationnel de la structure cosmique, résume le communiqué. « L’histoire thermique cosmique […] est dictée par la croissance des structures lorsque les baryons [ndlr : particules composant la matière ordinaire] sont chauffés par choc dans des halos de matière noire qui s’effondrent », expliquent aussi les auteurs. Il n’est pas impossible que ce chauffage continue à l’avenir.
Le décalage vers le rouge : qu’est-ce que c’est ?
Pour prendre cette mesure, les scientifiques ont établi une comparaison entre la température de gaz éloignés (donc anciens) et de gaz plus proches (donc plus récents) de notre planète. Pour cela, des données issues de deux misions ont été mobilisées : celles de l’observatoire spatial Planck (dont l’objectif est l’étude des variations de température du fond diffus cosmologique) et du Sloan Digital Sky Survey (« Relevé numérique du ciel Sloan », dont l’objectif est d’obtenir une cartographie de 25 % du ciel). En combinant les deux jeux de données, les scientifiques ont évalué les distances du gaz à l’aide de ce qu’on nomme le décalage vers le rouge : cette mesure, très utile en cosmologie, est en lien direct avec l’expansion de l’Univers. À cause de cette expansion de l’Univers, la lumière d’une galaxie lointaine peut apparaître plus rouge. C’est la mesure de ce décalage qui permet de donner une estimation de l’âge d’objets célestes éloignés et anciens, dont la lumière a mis plus de temps pour arriver vers nous.
En associant une méthode d’estimation de la température à la lumière, les auteurs ont donc pu mesurer la température moyenne des gaz dans l’Univers, à la fois dans le passé et aujourd’hui. C’est ainsi que les chercheurs ont pu déduire que le chauffage de l’Univers est lié au processus de formation des grandes structures que sont les galaxies.
Évidemment, ce processus n’a aucun lien avec le réchauffement que nous connaissons actuellement sur Terre, tiennent à préciser les scientifiques : les échelles sont incomparables et les phénomènes ne sont pas corrélés.
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