Si l’ère Trump s’achève en novembre 2020, alors le gouvernement américain aura l’attention des géants de la tech. Ce ne sera pas grâce à Joe Biden, qui n’est pas particulièrement investi dans les problématiques liées au numérique et aux nouvelles technologies, mais grâce à sa colistière qui deviendra vice-présidente en cas de victoire : Kamala Harris. La sénatrice de Californie a été choisie par Joe Biden et son équipe après un long processus, au cours duquel plusieurs figures démocrates étaient pressenties.
Joe Biden a fini par choisir Kamala Harris, qu’il dit avoir vue à l’œuvre quand elle travaillait avec Beau Biden, procureur général du Delaware et fils de Joe Biden décédé des suites d’un cancer du cerveau : « Ils se sont battus contre de grandes banques, ont soutenu des travailleurs et ont protégé des femmes et des enfants de maltraitances », a indiqué le candidat à la Maison-Blanche dans un tweet. « Joe Biden peut unir les Américains, car il a passé sa vie à se battre pour nous. Et en tant que président, il construira une Amérique qui sera digne de nos idéaux », a renchéri Kamala Harris dans sa première prise de parole en tant que colistière.
Mais pour Joe Biden, Kamala Harris a aussi un autre atout : la Californie et sa puissante Silicon Valley.
Kamala Harris, avocate, procureure et sénatrice californienne
Cela ne fait aucun doute que Kamala Harris est proche des entreprises de l’État américain qu’elle représente. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder la liste de ses soutiens privés quand elle faisait campagne pour son élection au Sénat : des dirigeants de Facebook, Yahoo, Google, eBay, Nest, Airbnb, Salesforce et même la veuve de Steve Jobs, Laurene Powell Jobs, ont donné pour sa campagne. Laurene Powell Jobs l’a même fait intervenir lors de la conférence Code 2017 à ses côtés, grand séminaire organisé par Recode où des personnalités de tous les milieux discutent des enjeux de la tech.
Même si elle a baigné dans l’univers californien, la sénatrice s’est fait connaître pour les combats mentionnés par Biden, qui ne touchent pas forcément l’univers de la Silicon Valley. Il n’empêche qu’elle n’a pas été complètement absente des discussions liées à l’activité économique et industrielle la plus importante de son État.
Dès 2012, elle avait pu obtenir des géants de l’époque (Apple, Google, Amazon, Microsoft et… HP et RIM, l’entreprise qui construisait les BlackBerry) un accord pour indiquer les pratiques liées à la vie privée des applications mobiles dans les magasins virtuels. Elle avait alors eu une phrase prophétique, alors que Facebook balbutiait et que ni l’affaire Cambridge Analytica, ni le RGPD n’existaient : « Votre vie privée ne doit pas être le prix à payer pour utiliser une application, mais c’est trop souvent le cas », avait-elle annoncé, encore procureure générale.
Plus récemment, Harris s’est illustrée avec d’autres sénateurs pour mettre en évidence les biais des intelligences artificielles, sur la couleur de peau ou le genre. Un sujet qui a été confirmé par de nombreuses études et que Harris a cherché à politiser, afin d’imposer un cadre à ces recherches. Toujours sur l’intelligence artificielle, Harris a fait partie d’un groupe de sénateurs demandant à ce que son usage soit régulé au niveau fédéral.
L’oreille des géants
Pour des observateurs de la politique américaine liée aux enjeux de la tech, Kamala Harris est un choix plus judicieux qu’Elizabeth Warren, figure démocrate du démantèlement des géants du web. Au New York Times, qui a fait un portrait en plusieurs vidéos de celle qui était aussi candidate à l’investiture démocrate pour la présidentielle 2020, elle affirme, pragmatique, que le démantèlement n’est pas sa priorité : « Je veux m’assurer que les entreprises de la tech soient régulées pour que les Américains n’aient pas à craindre pour leur vie privée, ajoutant qu’il faut la possibilité de choisir ce que les entreprises font des données personnelles ».
Dans Recode, on peut lire pourtant que Harris n’a rien de quelqu’un qui ne serait que dans la demi-mesure. Bien au contraire : le fait qu’elle ait gagné la confiance des géants de la tech pourrait lui donner une opportunité historique de créer des lois fortes qu’ils respecteraient. On pense bien entendu aux enquêtes sur l’anti-concurrence qui se jouent actuellement partout dans le monde — un sujet que Harris n’a pas encore développé, mais sur lequel elle pourrait, mieux que quiconque, porter le programme démocrate. En tant que vice-présidente, représentant l’intérêt de toutes les Américaines et tous les Américains, elle aurait plus de liberté qu’en étant sénatrice d’un État porté par ces géants.
Quoi qu’il en soit, Joe Biden et Kamala Harris auront fort à faire avant de s’attaquer aux enjeux des nouvelles technologies. Leur élection, si elle advient, aura lieu dans un climat où l’Amérique est profondément divisée et ne parvient pas à endiguer l’épidémie de coronavirus.
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