TikTok a été banni pour la première fois depuis son existence sur le sol français. Le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé plusieurs mesures mercredi 15 mai face aux violentes émeutes en Nouvelle-Calédonie. Après avoir décrété l’état d’urgence dans la collectivité d’outre-mer, il a déclaré que le réseau social chinois serait également banni. La plateforme serait utilisée par les groupes responsables de violences sur l’archipel.
Contacté par Numerama, le cabinet du Premier ministre nous a répondu que « Tiktok a effectivement été interdit mercredi par le PM et le gouvernement en raison des ingérences et de la manipulation dont fait l’objet la plateforme dont la maison mère est chinoise. L’application est utilisée en tant que support de diffusion de désinformation sur les réseaux sociaux, alimenté par des pays étrangers, et relayé par les émeutiers ».
Pour légitimer son interdiction, Nicolas Hervieu, enseignant en droit public à Science Po nous rappelle que le premier ministre s’appuie sur la loi de 1955 relative à l’état d’urgence – modifiée en 2017 – qui dispose que « le ministre de l’Intérieur peut prendre toute mesure pour assurer l’interruption de tout service de communication au public en ligne, provoquant à la commission d’actes de terrorisme ou en faisant l’apologie ».
Interrogé ce matin par BFM TV, Emmanuel Poinas, vice-président du tribunal de Nouméa, a déclare que TikTok, offre « des possibilités de diffuser de l’information qui n’est pas forcément fiable. En l’état, la diffusion d’informations non fiables ne peut que développer des risques de trouble et d’émeutes ».
TikTok utilisé par les opposants au projet de loi constitutionnelle
Sur TikTok, de nombreux groupes et opposants au projet de loi constitutionnelle lancent des appels à la mobilisation. Jusque-là, rien d’illégal. Concernant l’implication de puissance étrangère, on tombe sur quelques réactions appelant à l’insurrection, provenant de comptes liés à mouvements panafricains ou d’émancipation de l’Afrique.
L’interdiction de TikTok pourrait être justifiée par le gouvernement et passée auprès d’un juge, car elle vise un réseau social précis et un territoire qui est administré différemment, en dehors des règles de l’Union européenne. « C’est possible parce que c’est une collectivité non départementalisée avec un statut particulier » analyse l’avocat Alexandre Archambault auprès de Numerama. « Si la question de sa légalité est soulevée, le juge peut dire que les émeutiers ont accès à d’autres réseaux sociaux et que l’interdiction a été appliquée pour des raisons précises contre une entreprise en particulier », ajoute-t-il.
L’entreprise n’a pas réagi pour l’instant à son bannissement.
L’Azerbaïdjan suspecté de campagnes de désinformation
Ce 16 mai sur France 2, Gérald Darmanin a accusé l’Azerbaïdjan de mettre de l’huile sur le feu en Nouvelle-Calédonie. « Je regrette qu’une partie des leaders indépendantistes calédoniens aient fait un deal avec l’Azerbaïdjan, c’est incontestable » a-t-il déclaré au micro de télématin.
Sur TikTok, une chaine avec quelques abonnées, lié eà l’Azerbaidjan, relaie des messages anti-gouvernement.
En novembre 2023, l’Azerbaïdjan était déjà accusé d’ingérence étrangère par Matignon. Un rapport de Viginum, l’organisme de lutte contre les ingérences numériques étrangères, dévoilait une campagne de manipulation contre la France : plus de 1 600 publications accompagnées de visuels ou des hashtags ont été publiées sur X, avec pour thématique le boycott des JO.
La France soutient l’Arménie, touchée par le dernier conflit avec son voisin azéri. Les forces Azéris ont capturé la région disputée du Haut-Karabagh en septembre 2023, et l’Arménie s’est tournée depuis vers Paris pour développer son armée. Bakou soutient de nombreux mouvements indépendantistes en France en réponse. Confronté aux dernières déclarations de Gérald Darmanin, le pays a dénoncé des accusations infondées.
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