Le conflit ouvert entre Israël et le Hamas vient de provoquer le début d’une enquête formelle de l’Union européenne contre X (ex-Twitter). En cause, les pratiques du réseau social en matière de désinformation.

La pression monte sur X. Le réseau social américain, anciennement dénommé Twitter, fait désormais l’objet d’une procédure formelle visant à contrôler sa bonne conformité au Digital Services Act (DSA). La plateforme est suspectée d’avoir pris des mesures insuffisantes contre la désinformation depuis le déclenchement de l’attaque du Hamas contre Israël.

Précisément, la Commission européenne lance une demande d’information « suite à des indications reçues par [ses] services concernant la diffusion présumée de contenus illicites et de désinformation, en particulier la diffusion de contenus terroristes et violents et d’incitations à la haine. La demande porte également sur le respect d’autres dispositions du DSA. »

Depuis le 7 octobre, date à laquelle le mouvement du Hamas a lancé une offensive meurtrière sur le territoire israélien, de nombreux contenus circulent sur les réseaux sociaux, dont une partie est de la désinformation — comme cet enfant prétendument brûlé par une bombe au phosphore tirée par Israël, alors qu’il s’agit en fait d’un jeune Kurde en Syrie blessé en 2019.

Échange de courriers entre Bruxelles et X

Le 10 octobre, Thierry Breton, commissaire en charge du numérique et du marché intérieur, avait déjà rendu publique une lettre adressée à Elon Musk, le propriétaire de X pour lui rappeler les obligations de l’entreprise américaine en matière de modération — depuis la fin août, le DSA s’applique à X ainsi qu’à quelques autres très grandes sociétés du net.

Cette démarche, qui a ensuite été répliquée avec Meta (Facebook) et TikTok, via des courriers envoyés à Mark Zuckerberg et à Shou Zi Chew, a toutefois fait l’objet de critiques quant à sa forme. En effet, il a été pointé le caractère juridiquement fragile d’une missive envoyée à Elon Musk, l’actionnaire de X, au lieu de l’adresser au responsable légale de la plateforme.

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Thierry Breton. // Source : © European Union 2023 – Source : EP

X avait d’ailleurs répondu à Thierry Breton, via un courrier partagé par le compte de la société en charge des affaires gouvernementales internationales, et par Linda Yaccarino, nommée officiellement en mai 2023 comme directrice exécutive du site. La fin du courrier de la CEO de X relevait d’ailleurs l’absence de légalisme dans la démarche de Thierry Breton.

« Cette réponse est établie sur le fait que votre lettre constitue l’expression d’une préoccupation, mais ne constitue pas une notification formelle ou une demande au titre de la DSA ou de toute autre disposition légale », pouvait-on lire. Visiblement, la remarque a bien été comprise, puisque la requête formelle dans le cadre du DSA est partie le 12 octobre.

L’enquête lancée par la Commission européenne sur les pratiques de X en matière de lutte contre la désinformation est la toute première de l’ère DSA. Ce nouveau texte n’est en effet appliqué que depuis peu — le 25 août 2023 pour les géants du net. Le DSA vise à recadrer les pratiques des entreprises en ligne, en les soumettant à des obligations supplémentaires.

X trébuche déjà devant le DSA à cause de la modération

X est régulièrement pointé du doigt sur le dossier sensible de la modération des contenus. Une étude pour l’Union européenne avait montré que l’entreprise était la moins bonne des six examinées, avec Facebook, TikTok, Instagram, YouTube et LinkedIn. Wired, dans son édition du 9 octobre, notait que la guerre entre Israël et le Hamas était en train de noyer X dans la désinformation.

De fait, X aura mis moins de 50 jours à se retrouver dans le viseur du DSA. Il n’est toutefois pas dit que la plateforme sera condamnée en bout de course. L’action lancée par Bruxelles n’en est encore qu’à un stade très préliminaire et l’issue de la procédure demeure ouverte. Rien ne dit que des sanctions seront prises contre la société, qui aura à cœur de montrer ses efforts de modération.

X, en outre, pourra arguer que la lutte contre la désinformation n’est pas toujours évidente. Si des fake news grossières sont facilement repérables et modérables, d’autres publications peuvent avoir un statut plus délicat à déterminer. D’autant que la notion de désinformation n’est pas spécifiquement définie dans le DSA, ce qui laisse un flou dans le texte.

Théoriquement, le DSA offre plusieurs leviers d’action si une sanction doit être appliquée. La plus significative est l’amende de 6 % du chiffre d’affaires mondial annuel — il s’agit d’un montant maximal. Il existe aussi des sanctions journalières et des peines complémentaires. Si les choses sont très graves et répétées, il y a même la possibilité d’interdire le service dans l’Union.

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