L’interaction entre science et société a rarement été autant au cœur du débat public, entre la pandémie depuis début 2020 et l’intensification de l’enjeu écologique. Mais il se trouve justement que les relations entre les scientifiques et le « grand public » ne sont pas de tout repos. Une enquête Ispsos / Institut Sapiens du 19 octobre 2022, réalisée auprès de 1 000 Français et Françaises, pointe un manque de confiance.
L’opinion personnelle avant celle d’un scientifique ?
La force de la parole scientifique semble défiée par l’opinion personnelle. La moitié des personnes interrogées considèrent leur propre jugement comme équivalent à celui d’un scientifique — et 40 % font « davantage confiance à leur expérience personnelle qu’aux explications des scientifiques pour savoir si un fait est vrai ou faux scientifiquement ». Les Français interrogés sont plus nombreux à faire confiance à leur proche plutôt qu’aux autorités scientifiques (et la défiance est encore plus forte quand il est question de science dans les médias : 56 % n’ont pas confiance).
La question de l’indépendance de la science semble tout particulièrement inquiéter les Français. Plus de la moitié (56 %) des personnes interrogées considèrent que que les scientifiques « ne sont pas indépendants et se laissent influencer par des groupes de pression ». L’inquiétude est particulièrement dirigée vers la capacité des scientifiques à être « capables d’indépendance » face au gouvernement ou aux entreprises privées.
De la même façon, le problème a tout l’air d’être une méfiance sur la question de la transparence. La moitié des Français ont des doutes sur la disposition des scientifiques à être transparent dans le domaine du nucléaire — une confiance toutefois en augmentation depuis le dernier sondage — et dans les biotechnologies ou le climat. Dans quelques domaines très spécifiques, la confiance est plus élevée : c’est le cas pour les vaccins (à 63 %) et les énergies renouvelables (65 %).
Cela a forcément des conséquences sur l’appréhension de ce qui relève, ou non, d’une fake news. D’après le sondage, il n’y aurait que 51 % des Français à savoir que le Didier Raoult avait tort lorsqu’il affirmait que l’hydroxychloroquine était efficace contre le covid. Côté environnement, 30 % des Français estiment « qu’il n’y a pas de consensus scientifique sur l’origine humaine du réchauffement climatique » (alors que ce consensus est plus que prouvé).
L’espoir est dans la science : les points positifs à retenir de cette enquête
Ce sondage est cependant bien long de dresser un constat pleinement pessimiste sur la relation entre la science et la société. Au contraire : pour les 3/4 des Français interrogés, « la science et la technologie sont une source d’espoir face aux problèmes du futur ». Et cette même proportion est favorable aux recherches dans la plupart des domaines possibles — énergies renouvelables, vaccins, virus, génétique, santé humaine.
Quatre chiffres clés :
- 72 % estiment que la science peut apporter des solutions aux problèmes actuels
- 72 % pensent même qu’elle est la principale réponse
- 76 % font confiance aux chercheurs du secteur public pour trouver ces solutions
- 68 % font confiance aussi aux chercheurs du privé
Mais trouver des solutions n’est pas perçu comme une amélioration de la vie quotidienne. Seules 56 % des personnes interrogées pensent que les générations du futur vivront mieux qu’aujourd’hui grâce aux sciences et technologies.
Un besoin de confiance science/société
Le sondage d’Ipsos / Institut Sapiens semble clairement montrer que le lien entre la science et le grand public est bien assis. Mais le problème n’est autre que la confiance : les Français et les Françaises semblent avoir du mal à identifier quels scientifiques croire, ou même à se représenter pourquoi la méthode scientifique solidifie davantage certains propos.
On en revient alors toujours à la même problématique : la science doit prendre une meilleure place dans les médias, tant sur le plan quantitatif que qualitatif, à travers une pédagogie plus intense et apaisée.
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