En France, les Douanes ont pour la première fois employé des Bitcoins pour piéger un trafiquant français. Les agents se sont servis des dispositions juridiques contenues dans la loi Loppsi 2 pour se faire passer pour des clients, en vue de constater les faits.

Voilà une nouvelle qui ne va pas améliorer l'image de marque du Bitcoin. Au cours d'une audition organisée ce mercredi par la commission des finances du Sénat sur les enjeux liés au développement des monnaies virtuelles, le directeur national du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), Jean-Paul Garcia, a révélé que ses services ont utilisé les bitcoins pour interpeller un trafiquant.

Selon les éléments fournis par Jean-Paul Garcia et par le DNRED, contacté par l'AFP, des agents des douanes ont acheté, avec le feu vert du parquet, des Bitcoins afin d'acheter des stupéfiants (en l'occurrence, des amphétamines), grâce aux dispositions juridiques prévues par la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi 2).

Ainsi, l'article 67 bis-1 du Code des douanes prévoit  notamment "qu'aux seules fins de constater l'infraction d'importation, d'exportation ou de détention de produits stupéfiants, d'en identifier les auteurs et complices et d'effectuer les saisies […], les agents des douanes […] peuvent, sur l'ensemble du territoire national […] et sans être pénalement responsables de ces actes" :

  • Acquérir des produits stupéfiants ;
  • Participer sous un pseudonyme à des échanges électroniques ;
  • Être en contact sous ce pseudonyme avec les personnes susceptibles d'être les auteurs de l'infraction
  • Extraire, acquérir sous ce pseudonyme ou conserver des données sur les personnes susceptibles d'être les auteurs de l'infraction ainsi que sur les comptes bancaires utilisés.

Une fois l'infraction constatée, les agents des douanes sont ensuite passés par le registre public des transactions de Bitcoin. Celui-ci conserve "toujours une preuve publique qu'une transaction a eu lieu, qui peut potentiellement être utilisée dans un recours contre des entreprises aux pratiques frauduleuses", précise une foire aux questions consacrée à la monnaie virtuelle.

Les douaniers ont alors contacté le site Bitcoin-Central, une place de marché européenne qui permet de changer des Euros en Bitcoins et inversement. La plateforme a communiqué l'identité du propriétaire de l'adresse Bitcoin. Domicilié dans le département de la Loire, il a été interpellé en décembre et 300 grammes d'amphétamines ont été retrouvés chez lui, selon Jean-Paul Garcia.

Si cette affaire est une première en France, ce n'est pas le cas à l'international. L'été dernier, les autorités américaines sont intervenues à quelques reprises :

L'agence anti-drogues américaines, la DEA, a procédé à des saisies dans le cadre d'une opération menée contre un utilisateur fréquentant le site Silk Road, qui a été décrit comme "l'eBay de la drogue". Uniquement accessible via le réseau TOR, Silk Road a été neutralisé par le FBI. Cependant, le site est réapparu depuis avec une adresse adresse TOR.

Outre Jean-Paul Garcia, l'audition menée par la commission sénatoriale présidée par Philippe Marini a conduit les élus à entendre d'autres représentants des pouvoirs publics :

Delphine d’Amarzit, chef du service du financement de l’économie de la direction générale du Trésor, Denis Beau, directeur général des opérations à la Banque de France (qui a publié une note listant les dangers du Bitcoin), et Jean-Baptiste Carpentier, directeur du service Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN).


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