Le dernier jukebox à vinyles sortait des usines de Crosley il y a plus de 25 ans. La mythique firme américaine de Cincinnati avait été alors reconvertie en géant de la Hi-Fi, premier constructeur de platine au monde. Aujourd’hui, le retour à la galette aidant, Crosley rêve de grand retour et réédite ses pièces iconiques.

Technostalgie est le nouveau rendez-vous hebdomadaire de Numerama. Chaque semaine, nous raconterons l’histoire d’une technologie vieille ou moins vieille en ne gardant qu’une chose à l’esprit : l’objet ramené à la vie doit nous plonger dans une douceur nostalgique. 

Il y a bien quelques passionnés d’automobile, ou d’histoire moderne qui se souviendront des véhicules Crosley, la fulgurante marque de Cinicinnati fondée par Powell Crosley au début des années 1920. Le génie qu’était Crosley a littéralement touché à toutes les grandes innovations de l’époque, la radio pour commencer, puis les moteurs, les avions et surtout l’automobile. En pleine seconde guerre mondiale, Crosley devient un des fleurons de l’industrie américaine. Mais une décennie après la fin de la guerre, en 1956, la marque est poursuivi par la faillite et fini par tomber aux oubliettes de l’histoire.

La marque Crosley à la fin des années 1950 a commercialisé de l'électroménager, des voitures et même

Les produits phares de Crosley durant les années 1950

Mais son nom et sa mythologie fait encore rêver de nombreux américains qui nourrissent une nostalgie de ces années où l’industrie était encore un chemin semé de rêves et d’embûches, et où les inventeurs étaient les vrais héros de la working class.

Crosley : des voitures et des vinyles

Aujourd’hui, le temps de Powell Crosley et son american dream est fini et cette page de l’histoire de la marque a été tournée lorsque Bo LeMastus, collectionneur de voitures Crosley, a racheté pour une bouchée de pain le nom et le logo Crosley au début des années 1980. Depuis ce passionné d’automobiles d’époque s’est échappé des métropoles américaines pour rejoindre Louisville, où il vit de restauration de moteur des années 1940 et de vinyles.

Alors que le jeune LeMastus travaille pour MMC après la fin de ses études, c’est à cette époque qu’il supervise le rachat de la licence Crosley pour lancer une manufacture de produits électroniques inspirés de l’imaginaire du passé de la marque. La marque Crosley devient alors une référence dans le monde de la HiFi où ses platines rétro se vendent à merveille. Jusqu’à, bien sûr, l’avènement du CD. Mais LeMastus persévère et garde une clientèle fidèle.

Ainsi, Crosley survit jusqu’à aujourd’hui et la patience de LeMastus se montre désormais très payante. La marque est désormais un leader du secteur et ne cesse de séduire des néophytes du vinyle avec des produits originaux, rétro et accessibles. Preuve du retour en lumière de cette marque : elle est aujourd’hui l’un des principales fournisseurs des rayons vinyles d’Urban Outfitters — la référence du e-commerce pour hipster.

Et la tendance de la galette ne faiblissant aucunement, Crosley continue d’éditer de nouveaux modèles de platines dont raffolent les jeunes d’Instagram.

Le Jukebox, ultime phœnix de l’ère vinyle

Mais si nous avons choisi de vous parler de Crosley, ce n’est pas seulement parce que vous allez souvent croiser cette marque chez vos amis piqués aux vinyles, mais parce qu’elle a décidé en 2017 de rééditer une magnifique pièce de collection, son original Jukebox CR1209A, qui sort à nouveau de son atelier dans le Kentucky.

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On pensait le Jukebox relégué aux brocantes et antiquaires, achevé par la technologie. Pourtant, en tant que tel, le Jukebox n’a jamais trouvé d’égal technologique. Remémorez-vous le temps où vos parents, âgés d’une vingtaine d’années, contre quelques pièces, choisissaient de passer le dernier Kate Bush dans le bar à coté de la fac ? Eh bien aujourd’hui, malgré les Sonos, les Spotify et autres bidules, le Jukebox n’a jamais été remplacé.

Le Jukebox est pourtant l’objet d’une passion qui se vit en collectif, de la musique que l’on partage et que l’on admire. Enfant, je me souviens des heures passées à observer les bras mécaniques de la machine saisir les disques et les lancer vers le lecteur d’un geste sec mais précis, avant de les déposer sur le socle tourbillonnant de la platine. Et enfin, on pouvait entendre les premiers crépitements du diamant qui atterrissait avec la délicatesse d’un avion de ligne sur un bon vieux 45 tours de Fleetwood Mac.

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Les cinéphiles savent également le charme du Jukebox, toujours ami des scènes musicales dans le cinéma américain. On imagine que la scène de Jukebox la plus culte de ces dernières années est celle de Boulevard de la Mort, où Vanessa Ferlito choisit Down on Mexico des Coasters pour offrir un des plus beaux lap-dance du cinéma US.

Death Proof, 2007

Death Proof, 2007

Vous pourrez objecter qu’il ne s’agit donc que d’une passion de nostalgique, voire d’une psychose de gamin mélancolique. Mais nous ne sommes pas seuls à rester émerveillés devant le CR1209A de Crosley. Alors qu’elle était exposée au CES de Las Vegas, la créature dévoreuse de disques a rassemblé des foules de curieux selon Mashable.

Pour ceux à qui la bête fait de l’oeil, sachez qu’il faudra patienter puisque les 16 premiers modèles réalisés par la firme sont déjà tous réservés par des collectionneurs certainement fortunés, puisque, le Jukebox coûte pas moins de 11 995 $. Mais au-delà de la simple réédition d’un objet légendaire, la marque a quand même ajouté à son gros lecteur de vinyles quelques fonctionnalités qui rappellent que nous sommes au 21e siècle : télécommande, bluetooth et mode aléatoire.

Pour ce qui est des capacités de la machine, elle peut avaler jusqu’à 70 petit 45 tours qui se sélectionnent bien sûr sur le traditionnel et étincelant tableau de bord qui vient orné la face avant du monstre. Selon le constructeur, une édition pour 33 tours, bien plus utilisés aujourd’hui, est également prévue.


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